AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la Caisse nationale militaire de sécurité sociale (CNMSS), agence comptable, dont le siège est 247, avenue Jacques Cartier, 83090 Toulon Cedex 09,
en cassation d'un arrêt rendu le 16 septembre 1998 par la cour d'appel de Lyon (6e chambre), au profit de M. Y...,
défendeur à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 16 mars 2000, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, M. Thavaud, conseiller rapporteur, MM. Gougé, Ollier, Mme Ramoff, M. Dupuis, Mme Duvernier, M. Duffau, conseillers, M. Petit, Mme Guilguet-Pauthe, M. Leblanc, conseillers référendaires, Mme Barrairon, avocat général, M. Richard, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Thavaud, conseiller, les observations de la SCP Ancel et Couturier-Heller, avocat de la Caisse nationale militaire de sécurité sociale (CNMSS), les conclusions de Mme Barrairon, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Vu l'article L.376-1, alinéa 4, du Code de la sécurité sociale ;
Attendu qu'après avoir déclaré M. Y... coupable des infractions qui lui étaient reprochées, le tribunal correctionnel, par jugement du 6 juillet 1995, devenu définitif, a alloué à la victime des dommages-intérêts, alors qu'aucun organisme social n'avait été appelé en déclaration de jugement commun ; que la Caisse nationale militaire de sécurité sociale a notifié, le 20 mars 1996, à M. Y... un état exécutoire pour le recouvrement des prestations versées à la victime en relation avec l'infraction et, faute de paiement, a pratiqué, le 19 juin 1996, une saisie-attribution dénoncée au débiteur le 26 juin suivant ; qu'après avoir introduit, le 28 juin 1996, une action en opposition contre l'état exécutoire, M. Y... a saisi le juge de l'exécution d'une demande de mainlevée de la saisie-attribution ;
Attendu que, pour faire droit à la demande de l'intéressé, l'arrêt attaqué retient essentiellement que, faute d'avoir préalablement engagé l'action en nullité prévue à l'article L.376-1 du Code de la sécurité sociale, la Caisse a émis un titre exécutoire irrégulier ;
Attendu, cependant, que si, en vertu de l'article L.376-1 du Code de la sécurité sociale, les caisses de sécurité sociale qui n'ont pas été appelées en déclaration de jugement commun peuvent demander la nullité de cette décision dans un délai de deux ans à compter de la date où elle est devenue définitive, l'expiration du délai ainsi imparti ne fait pas obstacle à leur demande de remboursement des prestations versées en relation de causalité avec les indemnités destinées à réparer l'atteinte à l'intégrité physique de la victime ;
D'où il suit qu'en statuant comme elle l'a fait, alors que la Caisse était fondée à exercer son recours sur les indemnités qui seraient mises à la charge de l'auteur de l'infraction, la cour d'appel, qui ne pouvait que suspendre la procédure d'exécution forcée jusqu'à la décision à intervenir sur l'assiette de ce recours, a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 16 septembre 1998, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;
Condamne M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne M. Y... à payer à la Caisse nationale militaire de sécurité sociale (CNMSS) la somme de 10 000 francs ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai deux mille.