AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la Société de manutention de carburants aviation (SMCA), dont le siège est Orly Sud n° 178, 94542 Orly aérogare Cedex,
en cassation d'un jugement rendu le 3 février 1998 par le tribunal des affaires de sécurité sociale d'Evry, au profit de l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) de Paris, dont le siège est ...,
défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 16 mars 2000, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, M. Dupuis, conseiller rapporteur, MM. Gougé, Ollier, Thavaud, Mmes Ramoff, Duvernier, M. Duffau, conseillers, M. Petit, Mme Guilguet-Pauthe, M. Leblanc, conseillers référendaires, Mme Barrairon, avocat général, M. Richard, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Dupuis, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la SMCA, de la SCP Gatineau, avocat de l'URSSAF de Paris, les conclusions de Mme Barrairon, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, qu'à l'issue d'un contrôle, l'URSSAF a réintégré dans l'assiette des cotisations dues par la Société de manutention de carburants d'aviation (SMCA), au titre de la période du 1er novembre 1992 au 31 décembre 1994, la fraction des indemnités kilométriques forfaitaires, versées par cette société à ses salariés utilisant leur voiture personnelle pour les besoins de leur emploi, supérieures aux limites d'exonération prévues par le barème de l'administration fiscale ; que le tribunal des affaires de sécurité sociale (Evry, 3 février 1998) a rejeté le recours de la société ;
Attendu que la SMCA fait grief au jugement d'avoir statué ainsi alors, selon le moyen, d'une part, que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motif ; que le tribunal des affaires de sécurité sociale a constaté que les estimations adoptées par la SMCA pour la fixation des indemnités kilométriques étaient plausibles et sérieuses ;
qu'en énonçant néanmoins qu'elle ne rapportait pas la preuve, qui pouvait se faire par tous moyens, que les indemnités litigieuses étaient utlisées effectivement et en totalité conformément à leur objet, le Tribunal a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, et violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; et alors, d'autre part, que les décisions doivent être motivées ; que la SMCA avait longuement expliqué, dans ses conclusions, en quoi le barème qu'elle avait adopté correspondait exclusivement aux frais consacrés par ses salariés à l'utilisation professionnelle de leurs véhicules ; qu'elle produisait en outre de nombreuses pièces à l'appui de cette démonstration ; qu'en se bornant à affirmer, de façon purement formelle, que la preuve exigée par la jurisprudence n'était pas rapportée, sans aucune analyse ni des conclusions ni des pièces de la SMCA, le Tribunal a de nouveau violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que le Tribunal a énoncé exactement que si la fraction, dépassant le barème fiscal, des indemnités forfaitaires allouées par l'employeur peut être exclue de l'assiette des cotisations, ce n'est qu'à la condition que l'employeur établisse que les sommes versées sont destinées à couvrir des charges de caractère spécial inhérentes à la fonction et qu'elles sont utilisées conformément à leur objet ;
Et attendu que le Tribunal, qui n'était pas tenu de s'expliquer sur les éléments de preuve qu'il écartait, a estimé que la SMCA n'établissait pas l'utilisation effective des allocations versées conformément à leur objet ; qu'en l'état de ces constatations et énonciations, le Tribunal a, sans se contredire, légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la SMCA aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la SMCA à payer à l'URSSAF de Paris la somme de 10 000 francs ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai deux mille.