AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société DKV euro service france, société à responsabilité limitée, dont le siège est ...,
en cassation de deux arrêts rendus le 29 juin 1994 et le 11 décembre 1996 par la cour d'appel de Paris (5e chambre sect A), au profit :
1 / de la société Transports Michel Hurel, société anonyme, dont le siège est ...,
2 / de M Jean X..., domicilié ..., pris en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan et de mandataire ad hoc au redressement judiciaire de la société Transports Michel Hurel,
défendeurs à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 1 mars 2000, où étaient présents : M. Grimaldi, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Tricot, conseiller rapporteur, M. Badi, conseiller, M. Jobard, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Tricot, conseiller, les observations de la SCP Thomas-Raquin et Bénabent, avocat de la société DKV euro service france, de Me Foussard, avocat de M. X..., ès qualités, les conclusions de M. Jobard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon les arrêts déférés (Paris, 29 juin 1994 et 11 décembre 1996), que la société des Transports Michel Hurel (société Hurel) a souscrit en 1974 un contrat de fourniture de produits pétroliers et de services annexes auprès de la société DKV euro service (société DKV) lui permettant de s'approvisionner en Europe dans les stations services du réseau de celle-ci ; que mise en redressement judiciaire le 5 mars 1990, elle a poursuivi ce contrat ; que la sté DKV a réclamé paiement de ses factures au titre de l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985 ; que celles-ci ayant été contestées par le débiteur, une expertise a été ordonnée par le premier arrêt ; que le second a accueilli, pour partie, la demande de paiement des fournitures ;
Sur le pourvoi, en tant qu'il concerne l'arrêt du 29 juin 1994 :
Vu les articles 455, 605 et 606 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que le pourvoi en cassation n'est ouvert qu'à l'encontre des dispositions figurant dans le dispositif des décisions judiciaires en dernier ressort ;
Attendu que la société DKV a formé un pourvoi contre l'arrêt du 29 juin 1994 ; que le moyen unique de ce pourvoi ne concerne aucune partie du dispositif de cet arrêt ; qu'ainsi, le pourvoi est irrecevable ;
Sur le moyen unique du pourvoi, en tant qu'il concerne l'arrêt du 11 décembre 1996 :
Attendu que la société DKV reproche à l'arrêt d'avoir statué comme il a fait alors, selon le pourvoi, qu'elle faisait valoir dans ses conclusions, qu'en vertu de la clause du contrat stipulant que "toute réclamation doit être effectuée immédiatement et au plus tard dans les huit jours qui suivent la réception de la facture", clause instituant une prescription abrégée justifiée par le bon fonctionnement du système, la société Hurel, qui n'avait "pas élevé la moindre contestation à réception des factures" qui lui avaient été adressées en "reprenant le détail de chaque opération" et étaient accompagnées d'un relevé desdites opérations, était "forclose à élever une quelconque contestation à l'encontre des factures litigieuses" ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions, dès lors que la convention des parties peut, entre professsionnels, licitement instituer une telle prescription abrégée qui, en dehors de toute restriction contractuelle, s'applique à toute "réclamation" relative aux mentions desdites factures, que celles-ci concernent la réalité des fournitures ou leur date, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que les créances nées régulièrement après le jugement d'ouverture relèvent de l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985 ;
qu'aucune disposition contractuelle ne pouvant faire échec à cette règle d'ordre public, la cour d'appel n'était pas tenue de répondre aux conclusions inopérantes dont fait état le moyen ; que celui-ci n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
DECLARE IRRECEVABLE le pourvoi formé contre l'arrêt du 29 juin 1994 ;
REJETTE le pourvoi formé contre l'arrêt du 11 décembre 1996 ;
Condamne la société DKV euro service France aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau code de procédure civile, la condamne à payer à M. X..., ès qualités, la somme de 12 000 francs ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. Tricot, conseiller le plus ancien, qui en a délibéré, en remplacement du président en son audience publique du dix mai deux mille.