AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1 / M. Claude Z..., demeurant ...,
2 / la Mutuelle du Mans assurances, société d'assurances mutuelles à cotisations fixes, dont le siège est ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 25 juin 1998 par la cour d'appel de Rennes (4e chambre), au profit :
1 / de M. Michel Y..., demeurant La Noé A..., 35640 Rétiers,
2 / de M. X..., demeurant ..., défendeurs à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 14 mars 2000, où étaient présents : M. Beauvois, président, M. Villien, conseiller rapporteur, Mlle Fossereau, MM. Chemin, Cachelot, Martin, Mme Lardet, conseillers, Mmes Masson-Daum, Fossaert-Sabatier, Boulanger, conseillers référendaires, M. Baechlin, avocat général, Mme Berdeaux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Villien, conseiller, les observations de la SCP Boré, Xavier et Boré, avocat de M. Z..., et de la Mutuelle du Mans assurances, de Me Choucroy, avocat de M. Y..., de la SCP Philippe et François-Régis Boulloche, avocat de M. X..., les conclusions de M. Baechlin, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Rennes, 25 juin 1998), qu'en 1994, M. Y..., entrepreneur chargé du lot "gros oeuvre" dans les travaux d'extension d'une maison de retraite, poursuivis sous la maîtrise d'oeuvre de M. X..., architecte, a chargé M. Z..., géomètre-expert, assuré par la Mutuelle du Mans assurances, de matérialiser le futur bâtiment et de fournir la cote altimétrique de plusieurs points ; qu'une erreur de calcul ayant été découverte en cours de chantier, celui-ci a dû être suspendu et l'entrepreneur a dû effectuer des travaux de démolition et de reconstruction de l'ouvrage ; que M. Y... a assigné en réparation de son préjudice M. Z... et la Mutuelle du Mans assurances, qui ont formé une demande en garantie contre M. X... ;
Attendu que M. Z... et la Mutuelle du Mans assurances font grief à l'arrêt de rejeter cette dernière demande, alors, selon le moyen, "1 ) que l'architecte, concepteur de l'ouvrage dont il est chargé de diriger la réalisation, est tenu d'une obligation de surveillance attentive ;
que le fait de confier la réalisation d'une partie de l'ouvrage à une personne hautement qualifiée, comme un géomètre-expert, ne le décharge pas de cette obligation de surveillance ; qu'en jugeant cependant qu'"il ne peut être reproché à l'architecte d'avoir éventuellement tardé à repérer une erreur d'altimétrie découlant d'une faute grossière d'un spécialiste", la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ; 2 ) que, dans ses conclusions d'appel, le géomètre soulignait qu'il avait transmis son schéma d'implantation dès le 6 avril 1994 à l'architecte, et que ce dernier, maître d'oeuvre de la construction, n'avait pas contrôlé ce schéma alors qu'il aurait été en mesure de découvrir dès ce moment l'erreur grossière d'implantation de 1,35 mètres ; qu'en jugeant que l'architecte n'avait pas pu s'apercevoir "de visu" avant le 18 mai 1994 de l'existence de cette erreur sans rechercher, comme cela lui était demandé, s'il n'aurait pas pu la découvrir en contrôlant le schéma d'implantation, dès le 6 avril 1994, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article 1147 du Code civil" ;
Mais attendu qu'ayant relevé, par motifs propres et adoptés, que le dommage était entièrement imputable à la faute du géomètre-expert, qui avait commis une erreur dans la prise en considération des points de référence, ayant entraîné une mauvaise implantation de la construction en cours, et que l'architecte, qui n'avait pas l'obligation de vérifier le travail confié à une personne qualifiée, et qui avait toutefois, après avoir constaté cette erreur au cours de ses opérations de contrôle, provoqué l'arrêt immédiat du chantier, n'avait pas commis de faute, la cour d'appel, qui n'était pas tenue de procéder à une recherche que ses constatations rendaient inopérante, et qui a exactement retenu que M. Z... et M. X... n'étant pas contractuellement liés, le recours ne pouvait avoir qu'un fondement quasi-délictuel, a pu en déduire que la demande de garantie de M. Z... devait être rejetée, l'architecte n'ayant pas engagé sa responsabilité vis-à-vis du géomètre ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne, ensemble, M. Z... et la Mutuelle du Mans assurances aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne, ensemble, M. Z... et la Mutuelle du Mans assurances à payer à M. X... la somme de 9 000 francs ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept avril deux mille.