Attendu que M. X... était salarié de la société Vico depuis le 31 juillet 1986 et exerçait les fonctions de chef de service marketing ; que, le 31 mars 1995, l'employeur lui a proposé de devenir chef de produit en raison d'une réorganisation du service marketing ; qu'à la suite du refus du salarié d'accepter cette modification, il a été licencié pour motif économique le 27 juin 1995 ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir le paiement de sommes à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, pour violation de l'ordre des licenciements et d'indemnité compensatrice de la clause de non concurrence figurant à son contrat de travail ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt de l'avoir débouté de sa demande en paiement d'une indemnité compensatrice de la clause de non-concurrence, alors, selon le moyen, que les conventions légalement formées tiennent lieu de loi entre ceux qui les ont faites ; qu'en décidant que rien n'interdirait à l'employeur de délier le salarié de son obligation de non-concurrence et de mettre ainsi fin unilatéralement à la contrepartie financière prévue au contrat de travail, la cour d'appel a violé les dispositions de l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu, d'abord, que, selon l'article 51.202 de la Convention collective nationale des sucreries, sucreries-distilleries et raffineries de sucre du 29 mai 1979, lorsqu'un salarié, dont le contrat de travail comporte une clause de non-concurrence, envisage de quitter son employeur, il peut demander à celui-ci par écrit s'il a l'intention de faire jouer cette clause ; qu'il résulte de cette disposition que l'employeur dispose d'une faculté de renoncer au bénéfice de la clause de non-concurrence ;
Et attendu, ensuite, que la cour d'appel, ayant constaté que l'employeur avait délié le salarié de son obligation contractuelle de non-concurrence dans la lettre de licenciement, a justement décidé que le salarié ne pouvait réclamer le versement de l'indemnité compensatrice ; que le moyen n'est pas fondé ;
Mais sur le deuxième moyen :
Vu les articles L. 321-1 et L. 321-1-2 du Code du travail ;
Attendu que, pour débouter M. X... de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a relevé que l'employeur avait réorganisé ses méthodes de marketing et de commercialisation dans le but d'en améliorer l'efficacité afin de sauvegarder le secteur d'activité ; que, dans le cadre de cette réorganisation, le poste du salarié a été supprimé mais que celui-ci a repris son titre initial de chef de produit, resté sous l'autorité du directeur du marketing sans modification de sa rémunération et de ses avantages acquis ; qu'elle en a conclu qu'il n'y avait donc pas eu de modification substantielle des conditions de travail du salarié entraînant pour lui un déclassement ; que, devant son refus d'accepter le poste qui lui était proposé dans le cadre d'une restructuration, l'employeur ne pouvait que le licencier pour motif économique ;
Qu'en statuant ainsi, alors, d'abord, qu'elle ne pouvait, en l'état de la proposition faite par l'employeur conformément à l'article L. 321-1-2 du Code du travail, dénier l'existence de la modification du contrat de travail, et alors, en outre, qu'il lui appartenait de rechercher si l'employeur avait tenté de reclasser le salarié, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit nécessaire de répondre au premier moyen :
CASSE ET ANNULE, en ce qu'il a débouté M. X... de sa demande de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et pour violation de l'ordre des licenciements, l'arrêt rendu le 25 septembre 1997, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai.