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01/03/2000 | FRANCE | N°99-82532

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 01 mars 2000, 99-82532


ARRÊT N° 2
REJET des pourvois formés par :
- l'administration des Impôts, le procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence,
contre l'arrêt de ladite cour d'appel, 5e chambre, en date du 11 février 1999, qui, dans la procédure suivie contre X... des chefs de fraude fiscale et omission d'écritures en comptabilité, a prononcé la nullité de la procédure et constaté la prescription de l'action publique.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité :
Vu les mémoires produits en demande et en défense :
Sur le moyen unique de cassation, p

roposé pour l'administration des Impôts, pris de la violation des articles 1741 et 1743...

ARRÊT N° 2
REJET des pourvois formés par :
- l'administration des Impôts, le procureur général près la cour d'appel d'Aix-en-Provence,
contre l'arrêt de ladite cour d'appel, 5e chambre, en date du 11 février 1999, qui, dans la procédure suivie contre X... des chefs de fraude fiscale et omission d'écritures en comptabilité, a prononcé la nullité de la procédure et constaté la prescription de l'action publique.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité :
Vu les mémoires produits en demande et en défense :
Sur le moyen unique de cassation, proposé pour l'administration des Impôts, pris de la violation des articles 1741 et 1743 du Code général des impôts, des articles L. 47, L. 227, L. 228, L. 232 et R. 228-2 du Livre des procédures fiscales, de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, ensemble les articles 591 et 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs :
" en ce que l'arrêt attaqué a annulé les poursuites engagées du chef de fraude fiscale et d'irrégularités comptables à l'encontre de X... et constaté la prescription de l'action publique ;
" aux motifs que la société Y... ayant fait l'objet d'une procédure de liquidation judiciaire le 29 septembre 1993, seul le liquidateur a été avisé, préalablement à la vérification, de la faculté qu'il avait de se faire assister d'un conseil ; que l'Administration avait connaissance de ce que, outre la gérante de droit, X... pouvait être considéré comme gérant de fait de la société ; que celui-ci avait donc le droit d'être informé qu'il pouvait être assisté d'un conseil, préalablement à la vérification, et d'être personnellement convoqué afin que s'instaure entre lui et le vérificateur un débat oral et contradictoire au cours duquel il aurait pu faire valoir ses moyens de défense ; que l'inobservation de ces formalités était de nature à compromettre dès ce stade de la procédure, le caractère équitable du procès pénal au sens de l'article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, et que cette inobservation est aggravée par le fait que X... n'a pas été régulièrement avisé de la saisine de la Commission des infractions fiscales et de l'essentiel des griefs à son encontre ; que si le liquidateur a le pouvoir de représenter les créanciers de la masse, il n'est pas pénalement responsable du délit de fraude fiscale ; qu'ainsi, X... n'a pas bénéficié de la protection à laquelle il pouvait prétendre et que la procédure doit être annulée ;
" alors que, premièrement, la procédure de vérification, qui est une procédure administrative, est engagée à l'encontre du contribuable ; que si le contribuable est une personne morale, elle est engagée à l'encontre du représentant légal ; que par suite, c'est à l'égard du liquidateur que doivent être accomplis les actes que postule la régularité de la vérification lorsque le contribuable, personne morale, fait l'objet d'une liquidation judiciaire ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont violé les textes susvisés ;
" alors que, deuxièmement, l'article 6, paragraphe 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales ne s'applique que devant les juridictions ; que ce texte ne peut donc être invoqué pour établir l'irrégularité de la vérification ; qu'à cet égard également, l'arrêt attaqué a été rendu en violation des textes susvisés ;
" alors que, troisièmement, s'il est vrai que le juge peut se fonder sur les constatations du vérificateur, pour former sa conviction, le droit au procès équitable, tel que prévu par l'article 6, paragraphe 1, de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, est assuré dès lors que la partie poursuivie ayant eu connaissance du rapport du vérificateur, peut débattre contradictoirement de ses constatations ; qu'à cet égard encore, l'arrêt attaqué a été rendu en violation des textes susvisés ;
" et alors que, quatrièmement, et de la même manière, la procédure devant la Commission des infractions fiscales concerne le contribuable ; qu'elle est dès lors régulière si le représentant du contribuable, au moment où la Commission est saisie, a eu connaissance des griefs formulés par l'administration et a pu présenter ses observations ; qu'en décidant le contraire, les juges du fond ont de nouveau violé les texte susvisés " ;
Sur le moyen unique de cassation, proposé par le procureur général, pris de la violation de l'article L. 47 du livre des procédures fiscales, et 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt a annulé la procédure servant de fondement aux poursuites ainsi que la procédure subséquente :
" au motif que X... avait le droit d'être informé qu'il pouvait être assisté d'un conseil préalablement à toute vérification, et d'être personnellement convoqué afin que s'instaure entre lui et le vérificateur un débat oral et contradictoire au cours duquel il aurait pu faire valoir ses moyens de défense, et que l'inobservation de ces formalités essentielles préalables à toute vérification comptable par l'administration fiscale a été de nature à compromettre dès ce stade de la procédure le caractère équitable du procès pénal au sens de l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme ; inobservation aggravée par le fait que X... n'a pas été régulièrement avisé de la saisine de la Commission des infractions fiscales et de l'essentiel des griefs retenus à son encontre ;
" alors, d'une part, que la vérification a porté sur la comptabilité de la personne morale, SARL Y..., et qu'à la suite de la liquidation judiciaire de celle-ci, le liquidateur qui avait seul qualité pour la représenter a été destinataire de l'avis de vérification, ainsi que des redressements opérés ; qu'ainsi un débat oral et contradictoire a pu avoir lieu ;
" alors que, d'autre part, les dispositions de la Convention européenne des droits de l'homme ne sont pas applicables devant la Commission des infractions fiscales, organe administratif, consultatif et non juridictionnel dont la saisine a un caractère réel et non personnel " ;
Les moyens étant réunis ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué que la société Y..., dont le gérant de fait était X..., a été mise en liquidation judiciaire par jugement du 29 septembre 1993, que l'administration des Impôts a adressé au liquidateur l'avis de vérification de comptabilité de la société puis la notification de redressement, par lettres avec accusé de réception des 26 octobre 1993 et 20 mai 1994, et qu'après avis conforme de la commission des infractions fiscales, l'Administration a déposé plainte, pour fraude fiscale, contre X... en sa qualité de gérant de fait ;
Attendu que, pour faire droit à l'exception de nullité de la procédure soulevée par le prévenu, les juges énoncent que X..., dont la qualité de gérant de fait était connue de l'Administration et qui était seul susceptible, avec le gérant de droit, d'être pénalement responsable du délit de fraude fiscale, avait le droit d'être informé de la vérification et de la faculté d'être assisté d'un conseil et de bénéficier d'un débat oral et contradictoire avec le vérificateur, que l'inobservation de ces formalités essentielles a été de nature à compromettre le caractère équitable du procès pénal au sens de l'article 6.1 de la Convention européenne des droits de l'homme et qu'ainsi les droits de la défense ont été violés à l'égard du prévenu ;
Attendu qu'en prononçant ainsi, la cour d'appel a justifié sa décision ;
Qu'en effet, en cas de liquidation judiciaire d'une société faisant l'objet d'une vérification fiscale, les dispositions de l'article L. 47 du Livre des procédures fiscales et le principe d'un débat oral et contradictoire au cours de la vérification doivent bénéficier tant au liquidateur désigné dans la procédure qu'au dirigeant de la société, pénalement responsable du délit de fraude fiscale ;
D'où il suit que les moyens ne peuvent qu'être écartés ;
Et attendu que l'arrêt est régulier en la forme ;
REJETTE les pourvois.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 99-82532
Date de la décision : 01/03/2000
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

IMPOTS ET TAXES - Impôts directs et taxes assimilées - Procédure - Infractions - Constatation - Vérifications ou contrôle - Vérification de la situation fiscale ou de la comptabilité du contribuable - Formalités - Débat oral et contradictoire - Bénéficiaires - Société en liquidation judiciaire.

IMPOTS ET TAXES - Impôts directs et taxes assimilées - Procédure - Infractions - Constatation - Vérifications ou contrôle - Avis de vérification - Société en liquidation judiciaire - Destinataires

En cas de vérification fiscale d'une société faisant l'objet d'une liquidation judiciaire, les dispositions de l'article L. 47 du Livre des procédures fiscales et le principe d'un débat oral et contradictoire au cours de la vérification doivent bénéficier tant au liquidateur désigné dans la procédure qu'au dirigeant de la société, pénalement responsable du délit de fraude fiscale (arrêts n°s 1 et 2). Justifie sa décision la cour d'appel qui fait droit à l'exception de nullité de la procédure en relevant que la vérification s'est déroulée hors la présence du liquidateur et du gérant de droit de la société en liquidation judiciaire (arrêt n° 1). Justifie de même sa décision la cour d'appel qui fait droit à l'exception de nullité de la procédure résultant de l'absence d'envoi ou de remise de l'avis de vérification au dirigeant de la société en liquidation judiciaire, dont la qualité de gérant de fait était connue de l'administration des Impôts (arrêt n° 2). . .


Références :

CGI Livre des procédures fiscales L47

Décision attaquée : Cour d'appel d'Aix-en-Provence, 11 février 1999


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 01 mar. 2000, pourvoi n°99-82532, Bull. crim. criminel 2000 N° 99 p. 295
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 2000 N° 99 p. 295

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gomez
Avocat général : Avocat général : M. Di Guardia.
Rapporteur ?: Plusieurs conseillers rapporteurs :M. Roger (arrêt n° 1), Mme de la Lance (arrêt n° 2).
Avocat(s) : Avocats : la SCP Waquet, Farge et Hazan (arrêt n° 1), M. Foussard (arrêt nos 1 et 2), M. Choucroy (arrêt n° 2).

Origine de la décision
Date de l'import : 05/09/2012
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:2000:99.82532
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