AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, PREMIERE CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1 / M. B... Marche, demeurant ...,
2 / Mme Y... Marche, épouse Dupont, agissant ès qualités d'héritière de Georgina X... Santos A..., demeurant 5, rue du Château d'Eau, 52270 Roche-Bettaincourt,
3 / M. C... Marche, demeurant ...,
4 / Mme Z... Marche, demeurant 52270 Doulaincourt-Saucourt,
5 / Mme E... Marche, épouse Le Gars, demeurant ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 4 décembre 1997 par la cour d'appel de Dijon (1re Chambre, 2e Section), au profit de la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel (CRCAM) de l'Aube et de la Haute-Marne, dont le siège est ...,
défenderesse à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 25 janvier 2000, où étaient présents : M. Sargos, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président et rapporteur, MM. Aubert, Cottin, conseillers, M. Gaunet, avocat général, Mme Aydalot, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Sargos, conseiller, les observations de Me Cossa, avocat des consorts D..., de la SCP Masse-Dessen, Georges et Thouvenin, avocat de la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel de l'Aube et de la Haute-Marne, les conclusions de M. Gaunet, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur les deux moyens réunis, pris en leurs diverses branches, tels qu'ils figurent au mémoire en demande et sont reproduits en annexe au présent arrêt :
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que, constitué le 1er janvier 1985 entre les consorts F..., le GAEC de la Billebaude a pris à bail des terres et bâtiments appartenant à MM. C... et Louis D... ; que MM. Jean-Christophe et Xavier F... et le GAEC ont également acquis des consorts D... du matériel, du cheptel et des fumures financés au moyen d'un crédit-vendeur de 900 000 francs et de trois prêts de 400 000 francs, consentis les 14 février et 4 avril 1985 par la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel de l'Aube et de la Haute-Marne (CRCAM) à chacun des trois acquéreurs ; que MM. C... et Louis D... se sont portés cautions solidaires du remboursement de ces prêts ; que, les 30 juin et 30 octobre 1987, le GAEC a été placé en redressement, puis en liquidation judiciaire et, le 21 janvier 1988, cette procédure a été étendue à MM. Jean-Christophe et Xavier F... ; que la CRCAM a assigné MM. B... et Marcel D..., leur réclamant, en leur qualité de cautions, le remboursement du solde des prêts ainsi consentis ; que ceux-ci ont reproché à la CRCAM d'avoir apporté un soutien abusif aux consorts F... et de n'avoir pas garanti par un nantissement le prêt accordé au GAEC ; que l'arrêt attaqué (Dijon, 4 décembre 1997), après avoir constaté que la CRCAM renonçait à sa demande en paiement dirigée contre MM. B... et Marcel D..., en qualité de cautions de MM. Jean-Christophe et Xavier F..., a condamné ceux-ci en qualité de cautions solidaires du GAEC, au paiement de la somme de 400 000 francs et les a déboutés de leur demande en dommages-intérêts formée à titre reconventionnel ;
Attendu, d'abord, que, dans leurs conclusions, les consorts D... n'ont pas soutenu que le prêt consenti au GAEC entrait dans le cadre de l'article 672 du Code rural ; que le grief est nouveau, mélangé de fait et de droit ; qu'ensuite, sous couvert d'un grief non fondé de défaut de base légale au regard des articles 1134 et 2017 du Code civil, les consorts D... ne font qu'instaurer une nouvelle discussion quant au montant de la somme due, souverainement appréciée par la juridiction du second degré ; que, par ailleurs, celle-ci a justement observé qu'une banque est libre de choisir les sûretés personnelles et réelles assortissant, le cas échéant, les concours accordés à ses clients et qu'il appartenait, dès lors, aux cautions, avant de souscrire leur engagement, de vérifier si le GAEC avait donné d'autres garanties à la CRCAM ;
qu'enfin, la cour d'appel, qui a considéré que, dès la vente de leur exploitation, les consorts D... avaient connaissance de l'absence de fonds propres de leurs acquéreurs, puisqu'ils leur avaient consenti un crédit-vendeur et s'étaient portés cautions du remboursement des trois prêts auxquels ceux-ci avaient eu recours, a relevé que les sept prêts consentis ultérieurement aux consorts F... étaient des prêts de gestion et avaient été tous remboursés avant le prononcé du règlement judiciaire ; qu'elle a encore relevé que la situation financière de l'exploitation s'était dégradée à la fin de l'année 1986 et que la poursuite de l'activité déficitaire était imputable aux emprunteurs, lesquels avaient fourni à la banque des justificatifs erronés ; que, de l'ensemble de ces éléments, la cour d'appel a pu déduire que la CRCAM n'avait pas accordé un soutien abusif à l'exploitation ; d'où il suit qu'en aucun de ses moyens, le pourvoi ne peut être accueilli ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne les consorts D... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la Caisse régionale de crédit agricole mutuel de l'Aube et de la Haute-Marne ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Première chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf février deux mille.