AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société à responsabilité limitée Entreprise Minetto, dont le siège est à Authon, 04200 Sisteron,
en cassation d'un arrêt rendu le 19 mars 1998 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (3e chambre civile), au profit :
1 / de la société Rocland Rhône-Alpes, venant par absorption aux droits et obligations de la SARL Dreland, société à responsabilité limitée, dont le siège est ...,
2 / de la société à responsabilité limitée Michel et compagnie, dont le siège est 3, place de la République, 04200 Sisteron,
défenderesses à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 18 janvier 2000, où étaient présents : M. Beauvois, président, M. Villien, conseiller rapporteur, Mlle Fossereau, MM. Chemin, Cachelot, Martin, Mme Lardet, conseillers, Mmes Masson-Daum, Fossaert-Sabatier, Boulanger, conseillers référendaires, M. Weber, avocat général, Mme Berdeaux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Villien, conseiller, les observations de Me Blondel, avocat de la société Entreprise Minetto, les conclusions de M. Weber, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Donne acte à la société Minetto du désistement de son pourvoi, en ce qu'il est dirigé contre la société Michel et compagnie ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1147 du Code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 19 mars 1998), qu'en 1988 la SICA Fruits Alpes et Soleil a chargé la société Minetto de la réalisation du lot "gros oeuvre" d'un bâtiment à usage d'entrepôt frigorifique ; que cet entrepreneur a sous-traité la pose des dallages à la société Dreland, aux droits de laquelle vient la société Rocland Rhône-Alpes ; qu'après exécution le maître de l'ouvrage a refusé le dallage pour non-conformité à la commande d'origine ; que la société Dreland n'ayant pas exécuté les travaux de reprise la société Minetto les a elle-même réalisés et n'a pas réglé le prix des travaux exécutés par la société Dreland ; que le sous-traitant a alors assigné l'entrepreneur principal pour obtenir ce paiement ;
Attendu que pour accueillir cette demande l'arrêt retient, par motifs propres et adoptés, que s'il est constant que l'ouvrage réalisé par le sous-traitant n'était pas conforme aux exigences du marché conclu entre le maître de l'ouvrage et l'entrepreneur principal, il n'est pas établi que la société Dreland ait eu nécessairement connaissance de la destination de la dalle qu'elle exécutait et des conditions du marché principal, et que le sous-traitant n'est donc pas responsable du non-respect des prescriptions du devis descriptif ;
Qu'en statuant ainsi, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si en sa qualité de spécialiste des sols industriels, la société Dreland n'avait pas l'obligation de se renseigner sur les exigences du maître d'ouvrage et sur les conditions d'exploitation du revêtement qu'elle était chargée de réaliser, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a mis hors de cause la société Michel, et a condamné la société Minetto à lui payer une somme au titre de l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, l'arrêt rendu le 19 mars 1998, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ;
remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Montpellier ;
Condamne la société Rocland Rhône Alpes venant aux droits de la société Dreland aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois février deux mille.