AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par Mme Anne-Marie X..., épouse Y..., demeurant ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 7 mars 1996 par la cour d'appel de Paris (15e chambre, section B), au profit :
1 / de la Banque parisienne de crédit, dont le siège est ...,
2 / de M. Robert Z..., demeurant ...,
défendeurs à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 4 janvier 2000, où étaient présents : M. Grimaldi, conseiller doyen faisant fonctions de président, Mme Graff, conseiller référendaire rapporteur, M. Tricot, conseiller, M. Lafortune, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Graff, conseiller référendaire, les observations de la SCP Ryziger et Bouzidi, avocat de Mme Y..., de Me Le Prado, avocat de la Banque parisienne de crédit, les conclusions de M. Lafortune, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu, selon l'arrêt déféré (Paris, 7 mars 1996), que, par actes des 18 novembre 1987 et 8 juin 1988, Mme Y... s'est portée caution solidaire, avec M. Z..., à l'égard de la Banque parisienne de crédit (la banque), des engagements de la société "A Fleur de cuir" (la société), les cautionnements de Mme Y... étant consentis à concurrence respectivement de 150 000 et 300 000 francs ; que le compte "BPC" de la société, dans les livres de la banque, étant devenu débiteur de 367 628, 09 francs et la société ayant ensuite été mise en liquidation judiciaire, la banque a assigné les cautions en exécution de leurs engagements ;
Attendu que Mme Y... reproche à l'arrêt de l'avoir condamnée à payer à la banque diverses sommes et de lui avoir refusé tout délai, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'elle avait fait valoir que son consentement avait été vicié par les manoeuvres dolosives de M. Z..., manoeuvres l'ayant induite en erreur sur le montant des engagements donnés en qualité de caution ; qu'en se contentant d'indiquer que la caution ne justifiait pas avoir signé deux actes sous la contrainte physique ou morale, qu'à supposer qu'elle ait été abusée par M. Z... durant la vie de la société, les manoeuvres alléguées de M. Z... ne sauraient vicier ses engagements de caution, étant observé qu'à leur lecture, elle ne pouvait que constater qu'ils étaient autonomes de telle sorte qu'elle ne peut invoquer que l'un se substituait à l'autre, la cour d'appel, qui n'a pas recherché si les manoeuvres dolosives de M. Z..., qui s'était lui-même engagé à hauteur de 300 000 francs, n'avait pas eu pour effet d'affecter d'une erreur sur la substance le consentement donné par Mme Y..., a privé sa décision de base légale au regard des articles 2011 et suivants du Code civil, ensemble l'article 1110 dudit Code ; alors, d'autre part, que Mme Y... faisait valoir qu'en s'engageant en qualité de caution à hauteur de 300 000 francs en juin 1988, elle avait eu la croyance erronée que cet engagement se substituait au précédent donné à hauteur de 150 000 francs, l'engagement à hauteur de 300 000 francs correspondant à celui qu'avait donné M. Z... le même jour ; qu'en affirmant qu'à supposer qu'elle ait été abusée par M. Z... durant la vie de la société, les manoeuvres alléguées de M. Z... ne sauraient vicier ses engagements de caution, étant observé qu'à leur lecture, elle ne pouvait que constater qu'ils étaient autonomes de telle sorte qu'elle ne peut invoquer que l'un se substituait à l'autre, la cour d'appel, qui ne précise pas en quoi cette lecture permettait une telle constatation, l'arrêt comme le jugement étant muet sur l'économie des conventions, a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; et, alors, enfin, que Mme Y... invitait la cour d'appel à constater les manoeuvres dolosives de M. Z..., demandant sa condamnation à la garantir de toutes condamnations qui pourraient être mises à sa charge ; qu'en se contentant de relever qu'à supposer qu'elle ait été abusée par M. Z... durant la vie de la société, les manoeuvres alléguées de M. Z... ne sauraient vicier ses engagements de caution, étant observé qu'à leur lecture, elle ne pouvait que constater qu'ils étaient autonomes, de telle sorte qu'elle ne peut invoquer que l'un se substituait à l'autre, la cour d'appel qui n'a pas recherché, ainsi qu'elle y était invitée, si M. Z... n'avait pas commis de manoeuvres dolosives engageant sa responsabilité délictuelle, a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu que l'arrêt retient que Mme Y..., gérante de droit et porteuse de parts de la société, ne justifie pas avoir signé les deux actes de cautionnement sous la contrainte ; qu'il retient encore, dès lors qu'il est constant que chacun des deux actes litigieux contenait une stipulation portant : "Autonomie du présent engagement" : Le présent engagement n'affecte et ne pourra affecter, en aucune manière, la nature et l'étendue de tout engagement et de toute garantie, réelles ou personnelles, qui ont pu ou pourront être contractées ou fournies, soit par la caution, soit par tout tiers, et auquel il s'ajoute ou s'ajoutera", que le consentement de Mme Y... n'a pas été vicié puisqu'à la simple lecture des actes, elle ne pouvait que constater qu'ils étaient autonomes et que l'un ne se substituait pas à l'autre ; qu'ainsi, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'effectuer la recherche inopérante dont fait état la troisième branche, a légalement justifié sa décision, sans encourir aucun des griefs du moyen ; que celui-ci est sans fondement ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme Y... aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le conseiller doyen faisant fonctions de président en son audience publique du quinze février deux mille.