Attendu que M. X... a été licencié le 12 septembre 1991 pour motif économique par la société Le Green, qui l'employait depuis 1989 ; que la société a été mise en redressement judiciaire le 18 novembre 1991, puis en liquidation judiciaire le 24 janvier 1992 ; qu'une première décision prud'homale, d'une part, a constaté que le salarié avait perçu ses salaires des mois d'août et de septembre 1991, ainsi que l'indemnité légale de licenciement et, d'autre part, a fixé sa créance de dommages-intérêts au passif de la procédure collective de l'employeur ;
Sur le moyen unique pris en sa première branche :
Vu l'article L. 143-11-7 du Code du travail ;
Attendu que, selon ce texte, si les créances résultant du contrat de travail ne peuvent être payées sur les fonds disponibles, le représentant des créanciers en demande l'avance aux institutions mentionnées à l'article L. 143-11-4, qui lui versent les sommes figurant sur les relevés et restées impayées ; que le représentant des créanciers reverse immédiatement au salarié les sommes qu'il a perçues ;
Attendu que le jugement attaqué a mis le liquidateur de la société Le Green hors de cause et a condamné l'AGS à verser au salarié une certaine somme à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice causé par le retard de paiement de salaires ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'il ne pouvait condamner l'AGS à payer directement au salarié la somme litigieuse mais qu'il devait en ordonner le versement au liquidateur de l'entreprise, le conseil de prud'hommes a violé le texte susvisé ;
Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Vu les articles L. 143-11-1, alinéa 1, du Code du travail et 1153, alinéa 4, du Code civil ;
Attendu que, selon le premier de ces textes, l'assurance des salariés contre le risque de non-paiement, en cas de procédure de redressement ou de liquidation judiciaire, garantit le paiement des sommes qui leur sont dues par l'employeur en exécution du contrat de travail ; qu'aux termes du second texte, le créancier auquel son débiteur en retard a causé, par sa mauvaise foi, un péjudice indépendant de ce retard, peut obtenir des dommages et intérêts distincts des intérêts moratoires de la créance ;
Attendu que, pour condamner l'AGS à verser au salarié une certaine somme, le jugement attaqué retient que la créance a été fixée à titre de dommages-intérêts en raison des carences de l'employeur, lequel a payé avec retard les salaires des mois d'août et de septembre 1991, le préjudice matériel subi par l'intéressé étant prouvé par lui ;
Qu'en statuant ainsi, sans constater l'existence, pour le salarié, d'un préjudice indépendant du retard apporté au paiement des salaires par l'employeur et causé par sa mauvaise foi, le conseil de prud'hommes a violé les textes susvisés ;
Et attendu qu'en vertu de l'article 627, alinéa 2, du nouveau Code de procédure civile, la Cour est en mesure, en cassant sans renvoi, de mettre fin au litige par application de la règle de droit appropriée ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 12 février 1996, entre les parties, par le conseil de prud'hommes de Strasbourg ;
DIT n'y avoir lieu à renvoi ;
Déboute M. X... de sa demande.