Attendu, selon l'arrêt déféré, que la société Etablissements Brechoire, mise en redressement judiciaire, a fait l'objet d'un plan de cession au profit de la société Savima ; que la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel des Deux-Sèvres (la Caisse) s'est portée caution des engagements de la société Savima envers le commissaire à l'exécution du plan de la société Brechoire à concurrence d'un million de francs, avec le sous-cautionnement solidaire de M. X..., donné par acte du 29 août 1988 ; que la société Savima ayant elle-même été mise en redressement judiciaire, la Caisse a exécuté ses engagements de caution puis s'est retournée contre M. X... en lui demandant la somme de 625 000 francs qu'elle avait payée aux lieu et place de la débitrice principale ;
Sur le moyen unique, pris en sa seconde branche :
Vu l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que les juges du fond ne peuvent accueillir ou rejeter les demandes dont ils sont saisis sans examiner tous les éléments de preuve qui leur sont soumis par les parties au soutien de leurs prétentions ;
Attendu que, pour débouter la Caisse, en sa qualité de caution de la société Savima, de l'action qu'elle avait formée contre M. X..., sous-caution, l'arrêt retient que la Caisse n'a pas produit dans le cadre du redressement judiciaire et s'en remet sur ce point à la production de M. Y..., administrateur judiciaire de la société Etablissements Brechoire, ladite production étant faite par simple lettre datée du 23 avril 1990, aucun avis de réception n'étant joint à cette déclaration ; que cette seule pièce, faute de date certaine, ne peut établir qu'il a été satisfait aux obligations de l'article 66, alinéa 1er, du décret du 27 décembre 1985 ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans examiner l'attestation, non contestée, par laquelle le représentant des créanciers certifiait avoir reçu cette déclaration, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences du texte susvisé ;
Et sur la troisième branche du moyen :
Vu l'article 2011 du Code civil ;
Attendu que, pour débouter la Caisse de son action dirigée contre la sous-caution, l'arrêt retient encore que " rien n'établit que M. Y..., ès qualités, ait été admis au passif du redressement judiciaire " et " qu'il appartenait à la Caisse de produire aux débats un état des créances vérifiées et admises, ce en quoi elle est totalement défaillante " ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que, s'il est vrai que la décision du juge de la procédure collective rendue dans les rapports entre le créancier et le débiteur principal s'impose à la caution, il n'en demeure pas moins que le créancier peut poursuivre et obtenir la condamnation de la caution devant le juge du cautionnement avant toute déclaration de créance ou, si la déclaration a été faite, avant toute admission, en établissant l'existence et le montant de sa créance selon les règles du droit commun ; que la cour d'appel a donc violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur la première branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 23 avril 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Poitiers ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers.