CASSATION sur le pourvoi formé par :
- X..., partie civile,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 3 décembre 1998, qui, dans l'information suivie, sur sa plainte, contre personne non dénommée, des chefs de vols, destruction de biens mobiliers, abus d'autorité, abus de confiance, chantage, diffamation, a confirmé l'ordonnance de non-lieu rendue par le juge d'instruction.
LA COUR,
Vu l'article 575, alinéa 2. 6°, du Code de procédure pénale ;
Vu le mémoire produit ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, 191, 575-6, 669, 591 et 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué a prononcé un non-lieu à la suite de la plainte avec constitution de partie civile de X... ;
" aux motifs que le non-respect des formes prévues à l'article 669 du Code de procédure pénale conduisait la Cour à écarter toute demande en récusation ;
" alors que ne peut siéger dans une même affaire un magistrat ayant précédemment participé à un arrêt censuré par la Cour de Cassation ; qu'il résulte des mentions de l'arrêt que M. Y... a siégé en tant que conseiller, ce qui était déjà le cas dans l'arrêt de la chambre d'accusation sanctionné par la Cour de Cassation le 18 février 1997 ; qu'il y avait donc une incompatibilité à ce que M. Y... siégeât en tant que conseiller rapporteur dans la présente instance ;
" alors que la circonstance selon laquelle une partie n'a pas présenté de demande de récusation ne la prive pas du droit d'être jugée par une juridiction impartiale, le juge devant, même d'office, apprécier son impartialité objective et subjective ; que l'arrêt, qui, pour écarter l'articulation essentielle du mémoire de la partie civile relative à l'absence d'impartialité de la juridiction, se borne à énoncer qu'une demande de récusation conforme à l'article 669 du Code de procédure pénale n'a pas été présentée, ne satisfaisait pas en la forme aux conditions essentielles de son existence légale " ;
Vu l'article 6. 1 de la Convention européenne des droits de l'homme, ensemble l'article 191 du Code de procédure pénale ;
Attendu qu'il résulte de ces textes que ne peut faire partie de la chambre d'accusation saisie de l'appel d'une ordonnance de non-lieu un conseiller ayant participé à l'arrêt de la même juridiction, qui avait confirmé, dans la même procédure, une ordonnance de refus d'informer ;
Attendu qu'il ressort des pièces de la procédure que M. Y..., conseiller, a siégé à la chambre d'accusation ayant confirmé, par arrêt du 15 février 1996, cassé par arrêt de la Cour de Cassation du 18 février 1997, l'ordonnance de refus d'informer rendue par le juge d'instruction ; qu'il a fait partie de la même juridiction, qui, par l'arrêt attaqué, a confirmé l'ordonnance de non-lieu prononcée par le magistrat instructeur dans la même affaire ;
Attendu que, pour écarter la demande de la partie civile tendant à renvoyer l'affaire devant une autre chambre d'accusation, l'arrêt attaqué énonce que cette demande en récusation n'a pas été présentée dans les formes prévues par l'article 669 du Code de procédure pénale ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, sans relever l'irrégularité de sa composition, la chambre d'accusation a méconnu le sens et la portée des textes susvisés ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l'arrêt susvisé de la chambre d'accusation de la cour d'appel d'Aix-en-Provence, en date du 3 décembre 1998, et pour qu'il soit jugé à nouveau, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel de Nîmes.