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14/12/1999 | FRANCE | N°99-84148

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 14 décembre 1999, 99-84148


CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- X...,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris, en date du 8 juin 1999, qui, statuant sur renvoi après cassation dans l'information suivie contre lui des chefs notamment d'escroqueries, escroqueries aggravées, faux et usage, a dit n'y avoir lieu à annulation de pièces de la procédure.
LA COUR,
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 2 juillet 1999, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique

de cassation, pris de la violation des articles 7 de la Déclaration des droi...

CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- X...,
contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris, en date du 8 juin 1999, qui, statuant sur renvoi après cassation dans l'information suivie contre lui des chefs notamment d'escroqueries, escroqueries aggravées, faux et usage, a dit n'y avoir lieu à annulation de pièces de la procédure.
LA COUR,
Vu l'ordonnance du président de la chambre criminelle, en date du 2 juillet 1999, prescrivant l'examen immédiat du pourvoi ;
Vu les mémoires produits en demande et en défense ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 7 de la Déclaration des droits de l'homme, 66 de la Constitution, 5 et 6 de la Convention européenne des droits de l'homme, 63, 63-1, 76, 94, 154, 171, 591, 593 et 802 du Code de procédure pénale :
" en ce que la chambre d'accusation de renvoi a résisté à la Cour de Cassation et s'est à nouveau refusée à prononcer l'annulation de la garde à vue du requérant, ensemble la procédure subséquente ;
" aux motifs que "le 18 novembre 1997 à 6 heures, les services de police agissant sur commission rogatoire du juge d'instruction de Paris saisi des agissements d'un vaste réseau de traites de complaisance concernant de multiples sociétés, se présentaient au domicile de X... où ils procédaient, en sa présence, à une perquisition après lui avoir notifié verbalement son placement en garde à vue ; qu'au cours de leurs opérations, poursuivies dans le véhicule de l'intéressé puis au siège de la société Y..., ladite mesure et les droits afférents lui étaient notifiés par procès-verbal à 10 heures 30 ; qu'après avoir, à titre subsidiaire, sollicité dans ses écritures, le renvoi de l'affaire pour mise en état du dossier incomplet, X... invoque la nullité de la mesure de garde à vue et de tous les actes subséquents comprenant l'ordonnance de renvoi devant le tribunal correctionnel, à raison de la notification tardive de ses droits, effectuée 4 heures après son arrestation, selon le procès-verbal, mais plus vraisemblablement 8 heures après, comme l'attesterait la police de caractère dudit procès-verbal semblable à celle du matériel informatique utilisé à compter de 14 heures, heure d'arrivée dans les locaux de police ; que M. le procureur général estimant que le risque de modification des lieux, objet de la deuxième perquisition et de disparition de preuves justifiait qu'il soit sursis à la rédaction du procès-verbal de notification des droits, requiert la Cour, dire n'y avoir lieu à annulation, réquisitions auxquelles s'associent dans leur mémoire les parties civiles ; (...) que l'annulation d'un acte de procédure est subordonnée, aux termes de l'article 802 du Code de procédure pénale, à la recherche in concreto d'un grief aux droits des parties ; que la perquisition commencée à 6 heures au domicile du requérant, lequel aurait été requis d'y assister, en dehors de toute mesure de garde à vue, conformément aux dispositions de l'article 57 du Code de procédure pénale, s'est faite en présence de sa concubine laquelle a été, en conséquence, immédiatement prévenue de la mesure de garde à vue prise à son encontre ; que ce premier droit a par conséquent été exercé dès placement en garde à vue et avant toute notification écrite, comme acté dans le procès-verbal afférent ; qu'X... qui avait renoncé par procès-verbal de notification de garde à vue à la consultation d'un médecin, a renouvelé son refus lors de la notification de la prolongation de la garde à vue le 19 novembre 1997 à 5 heures, après entretien avec son avocat, lequel n'a présenté aucune observation, et présentation au juge d'instruction ; que la notification retardée des droits de l'article 63-4 du Code de procédure pénale, d'exercice légalement différé à la 20e heure de garde à vue, ne peut avoir porté atteinte aux droits de X..., lequel a pu s'entretenir effectivement avec son conseil dans le délai légal ; considérant, dès lors que le gardé à vue a pleinement exercé les droits prévus par les articles 63 et suivants du Code de procédure pénale, qu'aucun grief n'a été fait à ses intérêts, et ce, quelle que soit l'heure effective de ladite notification, actée à 10 heures 30, sauf à arguer de faux le procès-verbal signé de l'intéressé lui-même ;
que, par ailleurs, le risque d'ébruitement et par conséquent de disparition des preuves inhérent à l'ampleur des investigations ayant mobilisé le 18 novembre 1997, sur de très nombreux sites, de multiples services de police et concernant un nombre conséquent de mis en cause, imposait que les opérations soient menées simultanément et dans la plus grande célérité ; que de telles exigences autorisaient les enquêteurs à privilégier les mesures de perquisitions sur les actes de procédure qui pouvaient, comme en l'espèce, être différés sans porter atteinte aux droits de quiconque ; qu'au demeurant, ni le requérant, ni son conseil, lequel avait pris connaissance du dossier et s'était entretenu utilement avec le mis en examen, n'a présenté, en première comparution, de réserves sur la régularité de la garde à vue ; qu'en tout état de cause, l'annulation de la mesure de garde à vue de X... serait restée sans conséquence sur les actes concomitants ou subséquents ; qu'en effet, les perquisitions effectuées tant à son domicile qu'au siège de la société, se seraient faites, en dehors de toute mesure de garde à vue, en sa présence et ce conformément aux dispositions de l'article 57 du Code de procédure pénale ; que la découverte au cours de la perquisition à la société Y... gérée par X..., dénoncé par les banques comme signataire de traites de complaisance, établissaient ses relations avec Z... et la société A..., impliqués dans ce réseau, suffisaient à fonder la mise en examen de X..., lequel s'est spontanément expliqué en première comparution sur les faits reprochés ; qu'enfin, I'arrêt de la chambre d'accusation, initialement saisie, n'ayant été cassé qu'en ce qui concerne X..., les annulations d'actes éventuellement prononcées par la présente Cour de renvoi, n'auraient d'effet qu'à son égard, les actes annulés, réputés réguliers à l'égard de tous ses co-mis en examen, dont Z... et B..., seraient contrairement à ce que ces derniers sollicitent dans leurs mémoires respectifs, maintenus dans la procédure, nonobstant les dispositions de l'article 173 du Code de procédure pénale ; (arrêt attaqué, pages 31 à 34) ;
" 1° alors que, la notification des droits prévue par l'article 63-1 du Code de procédure pénale est immédiate en cas de placement en garde à vue ; que tout retard injustifié dans la mise en oeuvre de cette obligation porte nécessairement atteinte aux intérêts de la partie qu'elle concerne ; qu'il était interdit aux services de différer de plus de 2 heures pareille notification sous couvert d'une perquisition, mesure coercitive, directement effectuée au domicile du requérant à partir de 7 heures 50, lequel était alors privé de sa liberté d'aller et de venir dans le cadre d'une garde à vue où il se trouvait depuis l'entrée des services à son domicile ;
" 2° alors, en outre, qu'hormis les causes exceptionnelles, non réunies en l'espèce, de justification d'un retard dans la notification des droits de la personne placée en garde à vue, le choix du moment de cette notification n'est pas discrétionnaire ; que la méconnaissance par les services des prescriptions d'ordre public du Code de procédure pénale emporte directement annulation de la garde à vue sans qu'il y ait lieu pour la défense de démontrer l'existence d'un grief distinct de l'irrégularité née de la tardiveté de la notification des droits " ;
Vu l'article 63-1 du Code de procédure pénale ;
Attendu qu'il résulte de ce texte que l'officier de police judiciaire ou, sous son contrôle, l'agent de police judiciaire, a le devoir de notifier immédiatement les droits attachés au placement en garde à vue ; que tout retard dans la mise en oeuvre de cette obligation, non justifié par une circonstance insurmontable, porte nécessairement atteinte aux intérêts de la personne concernée ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué qu'une perquisition a eu lieu le 18 novembre 1997 à partir de 6 heures au domicile de X..., puis au siège de sa société ; que l'intéressé a été aussitôt placé en garde à vue, mais n'a reçu la notification de ses droits que par un procès-verbal dressé à 10 heures 30 ;
Attendu que, pour rejeter la demande d'annulation de la procédure de garde à vue formée par X... et prise d'un retard dans la notification des droits prévus par l'article 63-1 précité, les juges énoncent que, selon l'article 802 du Code de procédure pénale, l'annulation d'un acte de procédure est subordonnée à la recherche concrète d'un grief aux droits des parties ;
Qu'ils relèvent que le requérant a été placé en garde à vue dès l'arrivée des services de police à son domicile, le 18 novembre à 6 heures, où, présente, sa concubine a été immédiatement prévenue ; qu'ils précisent que l'intéressé a renoncé à un examen médical, dans un procès-verbal l'avisant de ses droits dressé à 10 heures 30 et que " la notification retardée des droits de l'article 63-4 du Code de procédure pénale d'exercice légalement différé à la vingtième heure de garde à vue, ne peut avoir porté atteinte aux droits de X..., lequel a pu s'entretenir avec son avocat dans le délai légal " ; qu'ils en déduisent que l'intéressé a pleinement exercé les droits prévus par les articles 63-1 et suivants du Code de procédure pénale, et " qu'aucun grief n'a été fait à ses intérêts, quelle que soit l'heure effective de ladite notification " ; qu'ils ajoutent que le risque de disparition des preuves inhérent à l'ampleur des investigations imposait que les opérations soient menées simultanément et dans la plus grande célérité et " autorisait les enquêteurs à privilégier les mesures de perquisition sur les actes de procédure qui pouvaient, comme en l'espèce, être différés sans porter atteinte aux droits de quiconque " ;
Mais attendu qu'en se déterminant ainsi, par des motifs qui ne caractérisent pas l'impossibilité, pour l'officier de police judiciaire, de notifier immédiatement chacun de ses droits à la personne gardée à vue, la chambre d'accusation n'a pas donné de base légale à sa décision ;
D'où il suit que la cassation est encourue ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, en ses seules dispositions ayant statué sur la requête de X..., l'arrêt susvisé de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Paris, en date du 8 juin 1999, et pour qu'il soit jugé à nouveau, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel de Rennes.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 99-84148
Date de la décision : 14/12/1999
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

GARDE A VUE - Droits de la personne gardée à vue - Notification - Retard - Portée.

INSTRUCTION - Commission rogatoire - Exécution - Garde à vue - Droits de la personne gardée à vue - Notification - Retard - Portée

DROITS DE LA DEFENSE - Garde à vue - Droits de la personne gardée à vue - Notification - Retard - Portée

Selon l'article 63-1 du Code de procédure pénale, l'officier de police judiciaire ou, sous son contrôle, l'agent de police judiciaire, a le devoir de notifier immédiatement les droits attachés au placement en garde à vue ; tout retard dans la mise en oeuvre de cette obligation, non justifié par une circonstance insurmontable, porte nécessairement atteinte aux intérêts de la personne concernée. Encourt la cassation l'arrêt qui déclare régulière la notification tardive de ses droits à l'intéressé, sans caractériser l'impossibilité, pour l'officier de police judiciaire de notifier immédiatement chacun de ses droits à la personne gardée à vue. (1).


Références :

Code de procédure pénale 63-1

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (chambre d'accusation), 08 juin 1999

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1998-06-18, Bulletin criminel 1998, n° 200, p. 552 (rejet et cassation), et les arrêts cités ;

Chambre criminelle, 1999-12-14, Bulletin criminel 1999, n° 301, p. 929 (cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 14 déc. 1999, pourvoi n°99-84148, Bull. crim. criminel 1999 N° 302 p. 935
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1999 N° 302 p. 935

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gomez
Avocat général : Avocat général : M. de Gouttes.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Karsenty.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Defrénois et Levis, M. Bouthors.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:99.84148
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