AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la Caisse primaire d'assurance maladie (CPAM) de Tarn et Garonne, dont le siège est ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 7 novembre 1997 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre sociale), au profit de Mme Eliette X..., demeurant ...,
défenderesse à la cassation ;
EN PRESENCE DE M. le directeur régional des affaires sanitaires et sociales de la région Midi-Pyrénées, domicilié ... ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 21 octobre 1999, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, M. Dupuis, conseiller rapporteur, MM. Gougé, Ollier, Thavaud, Mmes Ramoff, Duvernier, conseillers, MM. Petit, Liffran, Mme Guilguet-Pauthe, M. Leblanc, conseillers référendaires, M. Lyon-Caen, avocat général, M. Richard, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Dupuis, conseiller, les observations de Me Foussard, avocat de la Caisse primaire d'assurance maladie de Tarn et Garonne, de Me Delvolvé, avocat de Mme X..., les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses trois branches :
Attendu, selon les énonciations des juges du fond, que le 14 juin 1994 à 17 heures 45, Mme X..., qui avait quitté son travail à 17 heures, a été victime d'un accident de la circulation alors qu'elle se rendait en cyclomoteur au domicile de son ami où elle avait l'habitude de prendre ses repas ; que la Caisse primaire d'assurance maladie a refusé de prendre en charge cet accident comme accident du trajet ; que la cour d'appel (Toulouse, 7 novembre 1997) accueilli son recours ;
Attendu que la Caisse primaire d'assurance maladie fait grief à l'arrêt attaqué d'avoir ainsi statué alors, selon le moyen, d'une part, que si l'accident survenu à un travailleur pendant son déplacement, aller et retour, entre le lieu de son travail et le restaurant, la cantine, ou, d'une manière plus générale, le lieu où le travailleur prend habituellement ses repas, constitue un accident de trajet, cette disposition ne reçoit application qu'à l'égard des repas pris à l'occasion d'une suspension de la journée de travail ; qu'en décidant que Mme X... devait être indemnisée au titre des accidents de trajet, pour un accident survenu après la fin de sa journée de travail, alors qu'elle se rendait chez un ami pour dîner, les juges du fond ont violé l'article L. 411-2 du Code de la sécurité sociale ; alors, d'autre part, que l'accident survenu à un travailleur pendant son déplacement entre son lieu de travail et le lieu où il prend habituellement ses repas est indemnisable au titre de la législation des accidents de trajet à conditiion que ce déplacement n'ait pas été dicté par un intérêt personnel étranger aux nécessités essentielles de la vie courante ou indépendant de son emploi ; qu'en décidant, néanmoins, que l'accident subi par Mme X..., alors qu'elle se rendait à l'appartement de M. Y..., constituait un accident de trajet, les juges du fond ont violé l'article L. 411-2 du Code de la sécurité sociale ; et alors, enfin, et en toute hypothèse, qu'est un accident de trajet l'accident survenu à un travailleur pendant son déplacement, aller et retour, entre son lieu de travail et sa résidence habituelle ou le centre de ses intérêts familiaux ; que le seul fait, pour la victime d'un accident, de se rendre régulièrement dans l'appartement d'un ami pour y prendre ses repas ne fait pas de ce lieu sa résidence habituelle ou le centre de ses intérêts familiaux ; qu'ainsi, faute d'avoir constaté que l'appartement de M. Y... constituait pour Mme X... une résidence habituelle ou le centre de ses intérêts familiaux, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article L. 411-2 du Code de la sécurité sociale ;
Mais attendu qu'après avoir rappelé les dispositions de l'article L. 411-2 du Code de la sécurité sociale, la cour d'appel a souverainement estimé, en fonction des circonstances de la cause analysées par elle, que l'accident litigieux constituait un accident du trajet ; que le moyen ne peut être accueilli en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la Caisse primaire d'assurance maladie de Tarn et Garonne aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la Caisse primaire d'assurance maladie de Tarn et Garonne à payer à Mme X... la somme de 15 000 francs ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux décembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.