AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société EBEA, société anonyme, dont le siège est ...,
en cassation d'une ordonnance de référé rendue le 4 mars 1998 par le conseil de prud'hommes de Bonneville, au profit de M. Stéphane X..., demeurant Les Valignons II, bâtiment J, ...,
défendeur à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 29 juin 1999, où étaient présents : M. Waquet, conseiller doyen faisant fonctions de président, Mme Trassoudaine-Verger, conseiller référendaire rapporteur, MM. Texier, Lanquetin, conseillers, M. Lyon-Caen, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Trassoudaine-Verger, conseiller référendaire, les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu que M. fisso, au service de la société EBEA, en qualité de décolleteur, a été licencié le 20 décembre 1957 en raison de sa maladie prolongée ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale, statuant en référé, afin d'obtenir paiement, à titre de provision, d'une indemnité compensatrice de préavis et de l'indemnité compensatrice de congés payés y afférent ;
Attendu que la société EBEA fait grief à l'ordonnance de référé attaquée (conseil de prud'hommes de Bonneville, 4 avril 1998) d'avoir fait droit à la demande du salarié, alors, selon le moyen, d'une part, que l'employeur n'est pas redevable de l'indemnité compensatrice de préavis dès lors que le salarié est dans l'impossibilité de l'exécuter ; que le salarié en invalidité peut en appeler au médecin du travail pour apprécier l'aptitude à la reprise sur le fondement de l'article R. 241-51, alinéa 4, du Code du travail, avant même que soit envisagée la reprise ;
que le conseil de prud'hommes a violé la loi, n'a pas donné de base légale à sa décision, et a méconnu les dispositions de l'article 29-1 du chapitre "Avenant mensuel de la convention collective des industries métallurgiques de la Haute-Savoie" qui dispose que l'employeur qui a rompu le contrat de travail par nécessité de remplacement devra verser à l'intéressé une indemnité égale à celle qu'il aurait perçue s'il avait été licencié sans que le délai de préavis ait été observé ; que l'article 30 de la Convention collective des industries métallurgiques de la Haute-Savoie dispose que l'indemnité égale à la rémunération correspondant à la durée du préavis restant à courir est calculée sur la base de l'horaire hebdomadaire pratiqué pendant la durée du préavis ; qu'en l'espèce, il apparaît que l'employeur a expressément mentionné aux termes de la lettre de licenciement que l'absence d'exécution du préavis était la conséquence de l'état de santé du salarié qui était, à ce moment-là, en arrêt de maladie ; que le salarié qui entend reprendre son activité professionnelle, doit se présenter sur les lieux de son travail ; que M. X... n'ayant pas repris son activité professionnelle alors que, selon ses dires, il était à même de le faire doit en supporter les conséquences et ne peut réclamer de salaire pour la période correspondante ; que les dispositions de l'article 29-1 de la convention collective doivent s'interpréter au vu des textes et de la jurisprudence citée ; que l'employeur ne peut être amené à indemniser le salarié qui était à même de reprendre le travail et ne l'a pas fait ; qu'à tout le moins, les dispositions de l'article 29-1 de la convention collective doivent être interprétées en fonction de l'article 30 de cette même convention collective qui fixe le taux de base de calcul du montant horaire ; que M. X... ayant été absent depuis de nombreux mois, son taux de calcul de base horaire était de 0 et aucune indemnité ne pouvait être due ; alors, d'autre part, que l'interprétation d'une convention collective nécessite de porter une appréciation de fond du dossier et rend incompétente la juridiction de référé ;
Mais attendu que le conseil de prud'hommes, qui a constaté que la rupture du contrat de travail avait été prononcée en raison de la maladie prolongée du salarié, a pu décider que l'obligation de l'employeur de payer à l'intéressé, en application de l'article 29-1 de la convention collective applicable, une indemnité compensatrice de préavis, peu important qu'il soit dans l'impossibilité de l'exécuter, n'était pas sérieusement contestable ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société EBEA aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-six octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.