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19/10/1999 | FRANCE | N°97-30323

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 19 octobre 1999, 97-30323


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. D... Lawrence, demeurant ...,

en cassation d'une ordonnance rendue le 2 juillet 1996 par le président du tribunal de grande instance de Grasse, au profit de M. Z... Général des Impôts, domicilié ...,

défendeur à la cassation ;

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code

de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 29 juin 1999, où étaient présents : M. Bé...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. D... Lawrence, demeurant ...,

en cassation d'une ordonnance rendue le 2 juillet 1996 par le président du tribunal de grande instance de Grasse, au profit de M. Z... Général des Impôts, domicilié ...,

défendeur à la cassation ;

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 29 juin 1999, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Boinot, conseiller référendaire rapporteur, M. Leclercq, conseiller, M. Lafortune, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Boinot, conseiller référendaire, les observations de la SCP Vier et Barthélémy, avocat de M. Y..., de Me Foussard, avocat de M. Z... Général des Impôts, les conclusions de M. Lafortune, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que, par ordonnance du 2 juillet 1996, le président du tribunal de grande instance de Grasse a, en vertu de l'article L. 16-B du Livre des procédures fiscales, autorisé des agents de l'administration des Impôts, à effectuer une visite et une saisie de documents dans les locaux occupés par M. Lawrence D..., ..., en vue de rechercher la preuve de la fraude fiscale de l'association Médicercle-Praticien, de M. et Mme Eric C... et de M. Lawrence D... au titre de l'Impôt sur les sociétés et de la taxe à la valeur ajoutée pour l'association Médicercle-Praticien, et de l'Impôt sur le revenu dans la catégorie bénéfices industriels et commerciaux, ou bénéfices non commerciaux et la taxe à la valeur ajoutée pour M. et Mme C... et M. Y... ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que M. Y... fait grief à l'ordonnance d'avoir autorisé les visite et saisie litigieuses alors, selon le pourvoi, d'une part, que chaque visite doit être autorisée par une ordonnance du président du tribunal de grande instance ou par un juge délégué par lui ; qu'en se bornant à indiquer que le magistrat qui a rendu l'ordonnance attaquée a été désigné par ordonnance du président du Tribunal, en date du 4 juin sans préciser autrement que par une mention manuscrite totalement illisible l'année au cours de laquelle aurait été donnée cette délégation, ladite ordonnance ne met pas la Cour de Cassation, en mesure de vérifier si le magistrat qui l'a rendue a été régulièrement délégué et ne satisfait donc pas aux exigences de l'article L. 16-B du Livre des procédures fiscales ; et, alors, d'autre part, que aux termes de l'article R. 812-3 du Code de l'organisation judiciaire, auquel ne déroge pas l'article L. 16-B du Livre des procédures fiscales, le greffier en chef est chargé de tenir les documents prévus par les textes en vigueur ; qu'il résulte des dispositions de l'article R. 812-11 du même Code, auquel l'article L. 16-B du Livre des procédures fiscales ne fait pas davantage exception, que les magistrats doivent toujours, dans l'exercice de leurs fonctions juridictionnelles, être assistés par un greffier ; qu'en conséquence, l'article 456 du nouveau Code de procédure civile exige que tout jugement soit signé par le "secrétaire" qui a assisté le magistrat ; qu'il ne ressort pas des mentions de l'ordonnance attaquée, qui ne comporte qu'une seule signature, illisible, que le magistrat qui l'a rendue a été assisté par un greffier ou un secrétaire ; qu'elle méconnaît en conséquence les exigences des textes susvisés ;

Mais attendu, d'abord, que l'ordonnance énonce qu'elle a été rendue par "Nous, F. Filleron, vice-président au tribunal de grande instance de Grasse, désigné par ordonnance du président du Tribunal en date du 4 juin 1996" ;

Et attendu, ensuite, que l'ordonnance prévue à l'article L. 16-B du Livre des procédures fiscales n'a pas à être rendue en audience publique et que ni le défaut d'assistance du juge par un secrétaire ni l'absence de signature d'un greffier n'entachent la décision d'irrégularité ;

D'où il suit que le moyen manque en fait en sa première branche et n'est pas fondé pour le surplus ;

Sur le deuxième moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que M. Y... fait grief à l'ordonnance d'avoir autorisé les visite et saisie litigieuses alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'il ne ressort pas des pièces du dossier que M. X... avait été habilité à cet effet par le directeur général des Impôts ; que les exigences de l'article L. 16-B du Livre des procédures fiscales ont été méconnues ;

alors, d'autre part, qu'il ressort de l'ordonnance attaquée que MM. X..., E... et B... étaient en résidence à Bordeaux et n'avaient donc pas conpétence pour intervenir dans le ressort du tribunal de grande instance de Grasse ; que les exigences de l'article L. 16-B susvisé ont été derechef méconnues ; qu'en outre, aux termes de ce texte, l'autorisation de procéder à des visites et saisies ne peut être donnée qu'à des agents de l'administration des Impôts ayant au moins le grade d'inspecteurs ; qu'en autorisant MM. B... et Larrieu, contrôleurs des Impôts, à effectuer des visites et saisies dans les locaux occupés par M. Y..., le vice-président délégué a violé les dispositions de l'article L. 16-B du Livre des procédures fiscales ; et alors, enfin qu'il ressort de l'habilitation délivrée à M. A..., inspecteur des Impôts, que celui-ci a été habilité le 20 septembre 1985 à effectuer les visites et à procéder aux saisies prévues à l'article 94 de la loi n° 84-1208 du 29 décembre 1984 ; qu'en l'état de cette seule habilitation, l'ordonnance attaquée n'a pu légalement autoriser M. A... à effectuer les visites et saisies prévues à l'article L. 16-B du Livre des procédures fiscales, dont les dispositions résultent de l'article 108 de la loi n° 89-935 du 29 décembre 1989, opérations pour lesquelles M. A... n'avait pas été habilité par le directeur général des Impôts, comme l'exige l'article L. 16-B du Livre des procédures fiscales, dont les dispositions ont été à nouveau méconnues ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'il ne résulte pas des griefs que, pour statuer par l'ordonnance attaquée du 2 juillet 1996, le juge n'ait pas disposé de tous les documents visés dans les énonciations de ladite ordonnance ;

Attendu, en deuxième lieu, que l'indication que les agents en cause sont en résidence à la brigade interrégionale de Bordeaux, n'affecte pas leur appartenance à la Direction nationale des enquêtes fiscales d'où ils tirent la compétence pour opérer sur l'ensemble du territoire ;

Attendu, en outre, que l'article L. 16-B du Livre des procédures fiscales dans sa rédaction issue de l'article 108 de la loi de finances n 89-935 du 29 décembre 1989, applicable en la cause, a autorisé les agents de l'administration des Impôts ayant au moins le grade d'inspecteur et habilités à cet effet par le directeur général des Impôts, à se faire assister d'autres agents des Impôts, habilités dans les mêmes conditions que les inspecteurs ;

Et attendu, enfin, que l'habilitation à effectuer des visites et saisies domiciliaires est valable tant qu'elle n'a pas été rapportée ; que le juge a constaté que M. A..., inspecteur des Impôts à la brigade d'intervention interrégionale de Bordeaux, était spécialement habilité par le directeur général des Impôts, en application de l'article L. 16-B du Livre des procédures fiscales ; qu'il a ainsi satisfait aux exigences légales ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le troisième moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que M. Y... fait grief à l'ordonnance d'avoir autorisé les visite et saisie litigieuses alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'il appartient au juge qui se fonde sur des documents ou renseignements obtenus par l'administration des Impôts, dans l'exercice de son droit de communication, de s'assurer que ce droit a été régulièrement exercé et n'a porté, s'agissant de renseignements obtenus d'un commerçant, que sur les livres et pièces annexes visés à l'article 85 du Livre des procédures fiscales ; que l'ordonnance attaquée, qui ne précise pas que les éléments sur lesquels elle s'appuie ont été régulièrement communiqués à l'administration des Impôts n'est pas légalement justifiée au regard des exigences des articles L. 16-B et L. 85 du Livre des procédures fiscales ; alors, d'autre part, que le magistrat délégué s'est fondé pour autoriser des visites et saisies dans la résidence privée de M. Y... sur la lise des numéros de téléphone, appelés depuis cette résidence durant les années 1993, 1994 et 1995, obtenue de France Télécom, entreprise publique, par l'exercice du droit de communication ; qu'en prenant en considération de tels documents sans relever que leur communication avait été demandée et obtenue dans les conditions fixées à l'article L. 83 du Livre des procédures fiscales, il n'a pas légalement justifié sa décision au regard des exigences de ce texte et de l'article L. 16-B du même Livre ; et alors, enfin, que l'administration des Impôts ne peut prétendre, lorsqu'aucune circonstance ne le justifie, avoir communication de tous les numéros appelés à partir d'une résidence privée ; que l'ordonnance attaquée ne pouvait dès lors se fonder sur la communication de la liste de tous les numéros, ainsi appelés sans violer derechef les dispositions des articles L. 16-B du Livre des

procédures fiscales et 8 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que l'ordonnance précise que les pièces ont été obtenues sous couvert du droit de communication de l'administration fiscale ; qu'ainsi, le président du Tribunal a procédé au contrôle qui lui incombait, tout autre contestation au fond sur la licéité de ces documents relevant des juridictions compétentes pour apprécier la régularité de la procédure ;

Et attendu, en second lieu, que le juge, en relevant conformément à l'article L. 16-B du Livre des procédures fiscales, des faits qui fondaient son appréciation suivant laquelle il existait des présomptions d'agissements visés par la loi justifiant la mesure ordonnée, n'a pas violé les principes résultant des textes susindiquées ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur le quatrième moyen :

Attendu que M. Y... fait grief à l'ordonnance d'avoir autorisé les visite et saisie litigieuses alors, selon le pourvoi, que des visites et saisies ne peuvent être autorisées que sur le fondement de présomptions suffisamment importantes et après vérification par le président du tribunal de grande instance, des justifications avancées par l'administration des Impôts ; qu'en l'espèce, en autorisant des visites et saisies dans une résidence privée de M. Y... à Cannes, au seul motif que celui-ci peut être présumé exercer "une activité individuelle" en Jordanie et en Vendée et qu'il dispose à son domicile cannois d'une ligne téléphonique qui ferait l'objet d'une importante utilisation, le magistrat délégué n'a pas légalement justifié sa décision au regard des exigences de l'article L. 16-B du Livre des procédures fiscales ;

Mais attendu, que le moyen tend à contester la valeur des éléments retenus par le juge comme moyen de preuve du bien-fondé des agissements ; qu'un tel moyen est inopérant pour critiquer l'ordonnance dans laquelle le juge a recherché, par l'appréciation des éléments fournis par l'administration, s'il existait des présomptions d'agissements visés par la loi justifiant la recherche de la preuve de ces agissements, au moyen d'une visite en tous lieux, même privés, et d'une saisie de documents s'y rapportant ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. Leclercq, conseiller le plus ancien qui en a délibéré, en remplacement du président, à l'audience publique du dix-neuf octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 97-30323
Date de la décision : 19/10/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

IMPOTS ET TAXES - Visites domiciliaires - Ordonnance autorisant la visite - Signatures - Prononcé - Eléments d'information - Pièces obtenues sous couvert du droit de communication de l'administration fiscale.

IMPOTS ET TAXES - Visites domiciliaires - Exécution des opérations - Agents habilités - Assistance autorisée.


Références :

Livre des procédures fiscales L16B et L85

Décision attaquée : Président du tribunal de grande instance de Grasse, 02 juillet 1996


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 19 oct. 1999, pourvoi n°97-30323


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BEZARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:97.30323
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