AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par le Directeur général des Impôts, ministère de l'Economie, des Finances et de l'Industrie, dont le siège est ...,
en cassation d'un jugement rendu le 6 novembre 1995 par le tribunal de grande instance de Versailles (4e chambre civile, section A), au profit de M. Xavier X..., demeurant ...,
défendeur à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 1er juin 1999, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Huglo, conseiller référendaire rapporteur, M. Métivet, conseiller, M. Raynaud, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Huglo, conseiller référendaire, les observations de Me Thouin-Palat, avocat du Directeur général des impôts, les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu, selon le jugement déféré, que M. X..., propriétaire d'un véhicule automobile d'une puissance fiscale de plus de 34 chevaux, a, après le rejet de ses réclamations présentées les 8 et 28 octobre 1993 et 14 janvier 1994, assigné le Directeur des services fiscaux devant le tribunal de grande instance en restitution de la taxe différentielle acquitée au titre des années 1992 à 1994 ;
Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 95 du Traité instituant la Communauté européenne ;
Attendu que, pour accueillir cette demande, le Tribunal retient que la progression de la taxe n'est pas linéaire mais géométrique, voire hyperbolique, et n'est pas fonction d'un critère objectif, telle l'unité cheval-vapeur ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que, dans son arrêt du 30 novembre 1995 (Casarin), la Cour de justice des Communautés européennes a dit pour droit que l'article 95 du Traité instituant la Communauté européenne ne s'oppose pas à l'application d'une réglementation nationale relative à la taxe sur les véhicules à moteur qui prévoie une augmentation du coefficient de progressivité au-delà du seuil de 18 chevaux, dès lors que cette augmentation n'a pas pour effet de favoriser la vente de véhicules de fabrication nationale par rapport à celle des véhicules importés d'autres Etats membres ; qu'elle a constaté, dans le même arrêt, qu'il n'apparaît pas que, dans le système de la loi du 30 décembre 1987, l'augmentation du coefficient de progressivité puisse avoir pour effet de favoriser la vente de véhicules de fabrication nationale et rappelé qu'un système de taxation ne peut être considéré comme discriminatoire pour l'unique raison que seuls des produits importés se situent dans la catégorie la plus fortement taxée ; le Tribunal a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 6 novembre 1995, entre les parties, par le tribunal de grande instance de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal de grande instance de Nanterre ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. Métivet, conseiller le plus ancien qui en a délibéré, en remplacement du président en l'audience publique du cinq octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.