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21/09/1999 | FRANCE | N°99-83229;99-83692

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 21 septembre 1999, 99-83229 et suivant


CASSATION sur les pourvois formés par :
- X...,
contre les arrêts de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Chambéry,
1° le premier, en date du 4 février 1998, qui a rejeté sa requête en nullité de la procédure ;
2° le second, en date du 21 avril 1999, qui, pour assassinat, l'a renvoyé devant la cour d'assises de la Haute-Savoie.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit ;
I. Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 4 février 1998 :
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 18, 7

3, 206, 214, 591 et 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que, dans son arrêt du 4 fév...

CASSATION sur les pourvois formés par :
- X...,
contre les arrêts de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Chambéry,
1° le premier, en date du 4 février 1998, qui a rejeté sa requête en nullité de la procédure ;
2° le second, en date du 21 avril 1999, qui, pour assassinat, l'a renvoyé devant la cour d'assises de la Haute-Savoie.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire produit ;
I. Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 4 février 1998 :
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 18, 73, 206, 214, 591 et 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que, dans son arrêt du 4 février 1998, la chambre d'accusation a refusé d'annuler la procédure ;
" aux motifs que l'interpellation du demandeur par la police française a bien eu lieu en Suisse ; que, toutefois, l'exercice de l'action publique et l'application de la loi pénale à l'égard de l'auteur d'une infraction ne sont pas subordonnés à son retour volontaire en France ou à la mise en oeuvre d'une procédure d'extradition et qu'il n'est pas recevable à se prévaloir d'une atteinte portée à la souveraineté d'un Etat étranger qui ne lui cause directement aucun grief ; qu'il ne pourrait en être autrement que si les circonstances révélaient que les règles de procédure applicables ont été volontairement méconnues et qu'il a fait l'objet, en réalité, d'une extradition déguisée ; que les éléments du dossier démontrent au contraire qu'il n'y a eu aucune extradition de fait et qu'en outre, c'est par une pure inadvertance que l'intéressé a été arrêté en Suisse ; qu'en effet, d'une part, il s'agit d'un crime flagrant dont les policiers enquêteurs, en fonction des indications données par les témoins, ont poursuivi l'auteur et ce, en territoire français, jusqu'à ce qu'ils l'aperçoivent sur un parking en bordure de la nationale 206 ; que, d'autre part, les gendarmes enquêteurs qui ont, par la suite, recherché la présence des bornes frontières dans le cadre de la commission rogatoire du juge d'instruction ont relevé que ces bornes n'étaient visibles ni de la nationale ni du parking, celle se trouvant sur le parking étant enfouie et recouverte d'humus ; que, par ailleurs, si les auteurs de l'arrestation avaient eu connaissance de ce que le véhicule de la personne recherchée se trouvait en territoire suisse, il leur était loisible d'attendre discrètement que celui-ci quitte le parking, ce qui l'obligeait à repasser en territoire français ; qu'enfin, si les policiers français étaient, dans l'ordre international, incompétents territorialement pour accomplir les actes relevant de leurs fonctions au moment de l'arrestation, il y a lieu de rappeler qu'en vertu de l'article 73 du Code de procédure pénale français, toute personne a qualité pour appréhender l'auteur d'un crime flagrant tant les nécessités de la sécurité publique s'imposent dans un tel cas ; que seuls les actes qui concernent l'administration des preuves (perquisitions, saisies, audition de la personne gardée à vue) doivent être accomplis par un officier ou agent de police judiciaire compétent ; qu'un simple particulier aurait donc pu franchir la frontière pour conduire le criminel au commissariat d'Annemasse sans que personne y trouve à redire et sans qu'aucune nullité ne soit encourue ; qu'en l'espèce, les officiers de police judiciaire ont agi en toute bonne foi et respecté les règles de procédure qui leur étaient applicables ; qu'après son arrestation, X... a été immédiatement conduit à l'hôpital d'Annemasse en raison des problèmes médicaux dont il a informé les enquêteurs, et qu'il a été gardé à vue et entendu dans des conditions régulières ; qu'il a alors sans difficulté reconnu les faits ; qu'il apparaît ainsi que les conditions de l'arrestation de X... n'ont en rien altéré la recherche de la vérité et n'ont porté aucune atteinte à ses droits ; qu'il n'y a donc pas lieu de prononcer la nullité d'actes de procédure (arrêt p. 3 et 4) ;
" alors que sont d'ordre public les règles gouvernant la compétence territoriale de la police judiciaire ; que la flagrance n'opère aucune extension de cette compétence surtout sur le territoire d'un Etat étranger, d'où il suit que l'interpellation et l'arrestation en Suisse du demandeur par la police française, fût-ce par erreur, sont nulles et de nul effet, ensemble la procédure subséquente " ;
Vu l'article 18 du Code de procédure pénale ;
Attendu que, selon ce texte, la compétence des officiers de police judiciaire ne peut s'exercer sur le territoire d'un Etat étranger en l'absence de traité international liant la France et l'Etat concerné ;
Attendu qu'il résulte de l'arrêt attaqué et des pièces de la procédure que, soupçonné d'avoir tué Y... quelques heures auparavant sur le territoire français, X... a été interpellé, le 11 septembre 1997 par la police d'Annemasse, sur le parking de l'auberge Franco-Suisse, en limite de la route nationale 206 ; qu'après enquête, le juge d'instruction a établi que l'interpellation et l'arrestation de l'intéressé étaient intervenues sur le territoire helvétique ;
Attendu que, saisie par le juge d'instruction aux fins d'annulation de la procédure, la chambre d'accusation, tout en reconnaissant que X... avait été interpellé et arrêté sur le territoire helvétique et que les officiers de police français étaient incompétents pour procéder à ces mesures, a cru pouvoir valider la procédure aux motifs que l'intéressé avait été arrêté en Suisse " par pure inadvertance " ; que les bornes frontalières recouvertes d'humus n'étaient pas visibles ; que la bonne foi des policiers était entière et qu'un simple particulier aurait pu aller chercher X... sur le territoire helvétique, en vertu de l'article 73 du Code de procédure pénale, sans que personne " y trouve à redire " ;
Mais attendu qu'en prononçant ainsi, la chambre d'accusation a méconnu le texte ci-dessus rappelé ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
II. Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 21 avril 1999 :
Attendu que la censure de l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Chambéry du 4 février 1998 entraîne par voie de conséquence la cassation de l'arrêt de cette même juridiction du 21 avril 1999 ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE, en toutes leurs dispositions, les arrêts de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Chambéry, en date des 4 février 1998 et 21 avril 1999, et pour qu'il soit à nouveau jugé, conformément à la loi ;
RENVOIE la cause et les parties devant la chambre d'accusation de la cour d'appel de Grenoble.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 99-83229;99-83692
Date de la décision : 21/09/1999
Sens de l'arrêt : Cassation
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

OFFICIER DE POLICE JUDICIAIRE - Compétence - Compétence territoriale - Arrestation sur le territoire d'un Etat étranger.

CRIMES ET DELITS FLAGRANTS - Officiers de police judiciaire - Compétence - Compétence territoriale - Arrestation sur le territoire d'un Etat étranger

Selon l'article 18 du Code de procédure pénale, la compétence des officiers de police judiciaire ne peut s'exercer sur le territoire d'un Etat étranger en l'absence d'un traité international liant la France à cet Etat. Encourt la cassation l'arrêt qui, tout en reconnaissant que la personne concernée avait été interpellée et arrêtée en territoire helvétique a cru pouvoir valider la procédure en raison notamment de la bonne foi des policiers. .


Références :

Code de procédure pénale 18

Décision attaquée : Cour d'appel de Chambéry (chambre d'acusation), 14 février et, 21 avril 1999


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 21 sep. 1999, pourvoi n°99-83229;99-83692, Bull. crim. criminel 1999 N° 189 p. 602
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1999 N° 189 p. 602

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gomez
Avocat général : Avocat général : M. de Gouttes.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Chanet.
Avocat(s) : Avocat : M. Bouthors.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:99.83229
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