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15/09/1999 | FRANCE | N°98-86569;99-84251

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 15 septembre 1999, 98-86569 et suivant


DECHEANCE, NON-LIEU à statuer et REJET des pourvois formés par :
- X..., Y...,
1° contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Versailles, en date du 22 septembre 1998, qui, dans l'information suivie contre eux pour infractions à la législation sur les stupéfiants, a rejeté leur demande d'annulation d'actes de la procédure ;
2° contre l'arrêt de ladite chambre d'accusation, en date du 9 avril 1999, qui, dans la même procédure, les a renvoyés devant la cour d'assises des Hauts-de-Seine sous l'accusation d'importations de produits stupéfiants en bande

organisée ; et sur le pourvoi formé par Z..., contre le même arrêt, qu...

DECHEANCE, NON-LIEU à statuer et REJET des pourvois formés par :
- X..., Y...,
1° contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Versailles, en date du 22 septembre 1998, qui, dans l'information suivie contre eux pour infractions à la législation sur les stupéfiants, a rejeté leur demande d'annulation d'actes de la procédure ;
2° contre l'arrêt de ladite chambre d'accusation, en date du 9 avril 1999, qui, dans la même procédure, les a renvoyés devant la cour d'assises des Hauts-de-Seine sous l'accusation d'importations de produits stupéfiants en bande organisée ; et sur le pourvoi formé par Z..., contre le même arrêt, qui l'a renvoyé devant ladite cour d'assises sous l'accusation de complicité d'importations de produits stupéfiants en bande organisée.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
I. Sur les pourvois formés par Y... et Z... contre l'arrêt du 9 avril 1999 :
Vu le mémoire produit pour Pierre Y... ;
Attendu que Y... et Z... se sont régulièrement pourvus en cassation contre un arrêt de la chambre d'accusation les renvoyant devant la cour d'assises des chefs d'importations de produits stupéfiants en bande organisée, pour le premier, et de complicité de ce crime, pour le second ; que le dossier de la procédure est parvenu à la Cour de Cassation le 21 juin 1999 ;
Attendu que Z... n'a pas déposé de mémoire exposant ses moyens de cassation ; que le mémoire présenté pour Y... a été déposé au greffe de la Cour de Cassation le 30 juillet 1999, soit plus d'un mois après la réception du dossier à ladite Cour ; qu'il y a lieu en conséquence de déclarer Z... et Y... déchus de leur pourvoi par application de l'article 574-1 du Code de procédure pénale ;
II. Sur le pourvoi formé par Y... contre l'arrêt du 22 septembre 1998 :
Attendu que, selon les articles 570 et 571 du Code de procédure pénale, le pourvoi contre un arrêt ne mettant pas fin à la procédure ne peut être examiné qu'en même temps que le pourvoi contre un arrêt sur le fond ; que le demandeur étant déclaré déchu du pourvoi formé contre l'arrêt du 9 avril 1999, le pourvoi formé contre l'arrêt du 22 septembre 1998 est sans objet ;
III. Sur le pourvoi formé par X... contre l'arrêt du 22 septembre 1998 :
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 40, 43, 51, 52, 80, 592 et 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué du 22 septembre 1998 a refusé d'annuler le réquisitoire introductif du 23 septembre 1996 ainsi que toute la procédure subséquente ;
" aux motifs que des faits susceptibles de revêtir indiscutablement une incrimination pénale ayant été portés à sa connaissance par l'ordonnance de soit-communiqué du 20 septembre 1996 et les documents qui y étaient joints, le procureur de la République de Nanterre pouvait donc à bon droit requérir l'ouverture d'une information le 23 septembre 1996 ; que la décision d'ouvrir une information relève de la seule analyse du procureur de la République ;
" alors que, dans un mémoire régulièrement déposé, X... faisait valoir que le rapport du 19 septembre 1996 et les documents sur lesquels se fondait le réquisitoire du 23 septembre 1996 ne permettaient aucune individualisation dans le temps et dans l'espace d'une infraction commise ou en cours d'exécution en sorte qu'il ne pouvait donner lieu à l'ouverture d'une information faute de fixer, d'une part, la compétence territoriale du procureur de la République, d'autre part, l'objet même de la saisine du juge d'instruction ; que l'arrêt attaqué qui se borne à affirmer que le procureur de la République pouvait requérir l'ouverture d'une information sur les faits portés à sa connaissance par l'ordonnance de soit-communiqué du 20 septembre 1996, sans préciser quels étaient ces faits, ne répond pas au mémoire du demandeur et ne met pas la Cour de Cassation en mesure de s'assurer que le réquisitoire saisissait valablement le juge d'instruction d'une infraction déterminée " ;
Attendu que, pour rejeter la demande d'annulation du réquisitoire introductif et des actes subséquents, la chambre d'accusation relève que des faits susceptibles de revêtir indiscutablement une incrimination pénale ayant été portés à la connaissance du procureur de la République par l'ordonnance de soit-communiqué du 20 septembre 1996 et les documents qui y étaient joints, celui-ci pouvait requérir l'ouverture d'une information ; que les juges ajoutent, en ce qui concerne la compétence territoriale, que l'élément initial figurant dans le procès-verbal de police faisait apparaître qu'une personne soupçonnée d'acheminer de la résine de cannabis jusqu'en région parisienne opérait à partir d'un téléphone relayé par un commutateur desservant le département des Hauts-de-Seine ; qu'ainsi, le procureur de la République de Nanterre pouvait demander qu'une information soit ouverte et confiée à un magistrat de ce tribunal, dont le ressort s'étend à l'ensemble des Hauts-de-Seine ;
Attendu qu'en statuant ainsi, la chambre d'accusation a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués, dès lors que le procureur de la République du lieu où une infraction semble avoir été commise tient des articles 40, 41, 43 et 80 du Code de procédure pénale le droit de requérir l'ouverture d'une information, au vu de simples renseignements qui ont pu lui être transmis, lorsqu'une instruction lui paraît nécessaire à la recherche et à la poursuite de ladite infraction ;
Qu'ainsi le moyen doit être rejeté ;
Sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 80, 151, alinéa 3, 592 et 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt attaqué du 22 septembre 1998 a refusé d'annuler la commission rogatoire du 24 septembre 1996 ainsi que toute la procédure subséquente ;
" aux motifs que la commission rogatoire du 24 septembre 1996 s'inscrit indéniablement dans le cadre des faits objet de la saisine découlant du réquisitoire du 23 septembre 1996 ; que seule l'analyse a posteriori d'écoutes téléphoniques permet d'en déterminer le contenu et estimer alors qu'il s'agit éventuellement de faits nouveaux, analyse devant être confortée par les auditions des mis en cause placés en garde à vue ; que le magistrat instructeur a donc en temps utile et à juste titre communiqué la procédure le 8 novembre 1996 au procureur de la République, compte tenu des faits nouveaux ainsi révélés ;
" alors qu'en accomplissant des actes coercitifs dans le cadre d'une commission rogatoire pour la poursuite de faits dont le juge mandant n'était pas saisi, les officiers de police judiciaire excèdent leurs pouvoirs et entachent la procédure d'une nullité absolue ; que, dès lors, il ne peut être procédé à aucune mesure de garde à vue, mesure coercitive, pour des faits nouveaux ; qu'ainsi, l'arrêt attaqué ne pouvait, sans violer les textes susvisés, affirmer que les faits nouveaux révélés par les écoutes téléphoniques pouvaient être confortés par la mise en garde des mis en cause avant communication au Parquet et réquisitoire supplétif " ;
Attendu que, pour rejeter la demande d'annulation de la commission rogatoire du 24 septembre 1996 et de la procédure subséquente, la chambre d'accusation relève que cette commission rogatoire entrait indéniablement dans le cadre des faits dont le juge d'instruction était alors saisi et que les investigations, notamment les écoutes téléphoniques, opérées en application de cet acte, ont permis l'interpellation, le 5 novembre 1996, de plus de 30 personnes susceptibles d'être impliquées dans le trafic, ainsi que la découverte de 250 kg de résine de cannabis ; que l'analyse a posteriori des écoutes téléphoniques et les auditions des personnes gardées à vue ayant fait apparaître que le trafic s'était poursuivi après le 22 septembre 1996, date du réquisitoire introductif, le juge d'instruction a communiqué la procédure au procureur de la République le 8 novembre 1996, afin qu'il prenne des réquisitions supplétives, lesquelles ont été prises le jour même ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il résulte, d'une part, que la garde à vue subie par le demandeur se justifiait par les nécessités de l'enquête portant sur les faits dont le juge d'instruction était alors saisi et, d'autre part, que les faits nouveaux qui sont apparus au cours de cette enquête ont été communiqués au procureur de la République immédiatement après que le juge d'instruction en eut acquis la connaissance, conformément aux dispositions de l'article 80, troisième alinéa, du Code de procédure pénale, la chambre d'accusation a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
Qu'ainsi le moyen doit être rejeté ;
IV. Sur le pourvoi formé par X... contre l'arrêt du 9 avril 1999 ;
Sur le moyen unique de cassation, pris de la violation des articles 52, 214, 592 et 593 du Code de procédure pénale, 113-2 et suivants, 222-36 du Code pénal, de l'article 1er-m de la Convention unique sur les stupéfiants de 1961 :
" en ce que l'arrêt attaqué du 9 avril 1999 a rejeté l'exception d'incompétence des juridictions françaises et prononcé le renvoi de X... devant la cour d'assises des Hauts-de-Seine pour avoir importé sur le territoire national et notamment à Sevran plusieurs centaines de kilos de résine de cannabis en provenance du Maroc via l'Espagne, avec cette circonstance que les faits ont été commis en bande organisée ;
" aux motifs que la notion d'importation ne saurait être limitée au seul franchissement physique de la frontière mais s'inscrit dans un ensemble d'actes positifs tendant au transfert de la "marchandise" entre un ou plusieurs pays tiers et la France, destination finale ; que l'information a permis d'établir qu'il y avait identité entre partie des 1,5 tonne de haschich chargée depuis les côtes marocaines et les centaines de kilos entreposés dans la région parisienne ; que les éléments recueillis au cours de l'information ont mis en lumière que les faits reprochés, à les supposer établis, s'inscrivent dans le cadre d'une bande organisée au sens de l'article 222-36 du Code pénal (arrêt p. 37 et 38) ; que l'élément initial figurant sur le procès-verbal de police du 19 septembre 1996 selon lequel un prénommé Pascal employé par l'organisation pour acheminer du cannabis contacterait les responsables à partir d'un téléphone relayé par un commutateur des Hauts-de-Seine pouvait être retenu comme un critère de compétence et permettre au procureur de la République de Nanterre de saisir le président du tribunal de grande instance de Nanterre afin qu'une information soit ouverte ; que les faits susceptibles d'être imputés à A... présentent un lien étroit de connexité au sens de l'article 203 avec ceux reprochés aux co-mis en examen (arrêt p. 43 et p. 50) ;
" alors, d'une part, que l'importation illicite de stupéfiants est une infraction instantanée qui se commet chaque fois qu'une importation est effectuée, c'est-à-dire à chaque transport de stupéfiants d'un Etat dans un autre Etat ; que, dès lors, l'importation des stupéfiants du Maroc en Espagne puis de l'Espagne en France constituaient 2 infractions distinctes en sorte que X... ne pouvait faire l'objet d'un renvoi pour "une importation en provenance du Maroc via l'Espagne" ;
" alors, d'autre part, qu'il résulte des propres constatations de l'arrêt attaqué qu'une partie seulement des 1,5 tonne de cannabis acheminée au Maroc en Espagne a ensuite été importée en France ; que l'importation d'une partie de la marchandise du Maroc en Espagne où elle y est restée constitue un fait d'importation distinct de l'importation du reste de la marchandise jusqu'en France ; que, dès lors, l'arrêt attaqué ne pouvait se prononcer au regard de la compétence des juridictions françaises sans distinguer ces 2 infractions ni rechercher à quels auteurs chacune d'elles pouvait être imputable ;
" alors, au surplus, qu'en ne recherchant pas, comme elle y était invitée, si les charges retenues contre X... concernaient la seule opération d'importation Maroc-Espagne ou celle du Maroc jusqu'en France, la chambre d'accusation a privé son arrêt de toute base légale ;
" et alors, encore, qu'aucun texte ne prévoit l'application de la loi pénale française ni la compétence des juridictions françaises pour une infraction commise à l'étranger par un étranger, au seul motif qu'elle serait connexe à une infraction commise en France par d'autres auteurs ; que l'arrêt attaqué a ainsi violé les articles 113-2 et suivants du Code pénal ;
" et alors, enfin, qu'en ne précisant pas quel élément constitutif de l'importation du Maroc en Espagne aurait été commis sur le territoire français, l'arrêt attaqué est dépourvu de base légale " ;
Attendu que, pour rejeter l'exception d'incompétence des juridictions françaises et renvoyer X... devant la cour d'assises pour avoir importé en France plusieurs centaines de kilos de cannabis, la chambre d'accusation relève que certains des éléments constitutifs de l'infraction poursuivie ont été commis en France et que des indices laissent penser que X... a participé à ces faits puisqu'il était présent lors des remises de fonds à Paris ; que les juges ajoutent qu'il y a identité entre une partie des 1 500 kilos de haschich chargés depuis les côtes marocaines et les centaines de kilos entreposés dans la région parisienne ; que les faits commis en Espagne et au Maroc sont indivisibles de ceux commis en France, l'opération d'importation sur le territoire national de stupéfiants provenant du Maroc formant un tout ; que, notamment, il existe une continuité entre les mises au point préalables des opérations de transport et, en particulier, les indispensables contacts à Saint-Tropez avec les marins, les conversations téléphoniques, la navigation en Méditerranée, puis la poursuite, par voie terrestre, jusqu'en Ile-de-France, l'argent ayant un flux inverse ;
Attendu qu'en l'état de ces énonciations, d'où il résulte que l'un au moins des faits constitutifs de l'infraction pour laquelle X... est renvoyé devant la cour d'assises aurait été commis sur le territoire national, la chambre d'accusation a justifié sa décision au regard de l'article 113-2 du Code pénal ;
Que, dès lors, le moyen ne peut qu'être écarté ;
Et attendu que la chambre d'accusation était compétente, qu'il en est de même de la cour d'assises devant laquelle l'accusé a été renvoyé, que la procédure est régulière et que les faits, objet de l'accusation, sont qualifiés crime par la loi ;
Par ces motifs :
I. Sur les pourvois formés par Y... et Z... contre l'arrêt du 9 avril 1999 :
DÉCLARE les demandeurs déchus de leur pourvoi ;
II. Sur le pourvoi formé par Pierre Y... contre l'arrêt du 22 septembre 1998 :
DIT n'y avoir lieu à statuer ;
III. Sur les pourvois formés par X... :
Les REJETTE.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 98-86569;99-84251
Date de la décision : 15/09/1999
Sens de l'arrêt : Déchéance, non-lieu à statuer et rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

CASSATION - Pourvoi - Déchéance - Pourvoi antérieur contre un arrêt avant dire droit - Non-lieu à statuer.

Selon les articles 570 et 571 du Code de procédure pénale, le pourvoi contre un arrêt ne mettant pas fin à la procédure ne peut être examiné qu'en même temps que le pourvoi formé contre l'arrêt sur le fond. Dès lors, il n'y a pas lieu à statuer sur le pourvoi antérieur formé par une personne mise en examen contre l'arrêt ayant rejeté sa demande d'annulation d'actes de procédure, lorsque cette personne est déchue de son pourvoi formé contre l'arrêt la renvoyant devant la cour d'assises. (1).


Références :

Code de procédure pénale 570, 571

Décision attaquée : Cour d'appel de Versailles (chambre d'accusation), 1998-09-22 et 1999-04-09

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1997-11-27, Bulletin criminel 1997, n° 406, p. 1347 (irrecevabilité et non-lieu à statuer)

arrêt cité.


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 15 sep. 1999, pourvoi n°98-86569;99-84251, Bull. crim. criminel 1999 N° 185 p. 585
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1999 N° 185 p. 585

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gomez
Avocat général : Avocat général : M. Di Guardia.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Soulard.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Waquet, Farge et Hazan.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:98.86569
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