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06/07/1999 | FRANCE | N°97-14721

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 06 juillet 1999, 97-14721


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1 / Mme Lina X..., épouse Y...,

2 / M. René Y...,

demeurant tous deux Les Moulins, 05200 Crots,

en cassation d'un arrêt rendu le 12 mars 1997 par la cour d'appel de Grenoble (Chambre commerciale), au profit de M. Jean-Pierre Z..., mandataire-liquidateur, domicilié professionnellement ..., pris ès qualités de liquidateur de la société à responsabilité limitée René Y..., exploitation forestière

, commerce de bois, exportation, dont le siège est ...,

défendeur à la cassation ;

Les demandeur...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1 / Mme Lina X..., épouse Y...,

2 / M. René Y...,

demeurant tous deux Les Moulins, 05200 Crots,

en cassation d'un arrêt rendu le 12 mars 1997 par la cour d'appel de Grenoble (Chambre commerciale), au profit de M. Jean-Pierre Z..., mandataire-liquidateur, domicilié professionnellement ..., pris ès qualités de liquidateur de la société à responsabilité limitée René Y..., exploitation forestière, commerce de bois, exportation, dont le siège est ...,

défendeur à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 26 mai 1999, où étaient présents : M. Bézard, président, Mme Geerssen, conseiller référendaire rapporteur, M. Grimaldi, conseiller, Mme Piniot, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Geerssen, conseiller référendaire, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat des consorts Y..., de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. Z..., ès qualités, les conclusions de Mme Piniot, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique, pris en ses sept branches :

Attendu que Mme Y..., gérante de la SARL René Y... (la société), ayant une activité de bûcheronnage, débardage et vente de bois, et son fils, M. René Y..., directeur technique salarié de ladite société, créée depuis le décès de Louis Y..., époux de A...
Y... et père de René Y..., font grief à l'arrêt confirmatif attaqué (Grenoble, 12 mars 1997) de les avoir condamnés solidairement, sur le fondement de l'article 180 de la loi du 25 janvier 1985, à supporter l'insuffisance d'actif de la société à concurrence de 3 millions de francs et de leur avoir interdit, sur le fondement de l'article 192 de la même loi, pendant dix ans, de gérer toute entreprise commerciale ou artisanale, suite à la mise en redressement judiciaire, le 18 décembre 1990, de la société, la date de cessation des paiements étant fixée au 31 décembre 1989, suivie, le 22 novembre 1991, de l'homologation d'un plan de redressement sur dix ans, résolu par jugement du 22 janvier 1993, prononçant la liquidation judiciaire de la société avec cessation des paiements au 24 septembre 1992, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'est dirigeant de fait d'une personne morale celui qui a exercé en toute indépendance une activité de direction de cette personne; qu'en retenant, pour décider qu'une partie des dettes de la société devait être supportée par M. Y... et prononcer une interdiction de gérer à son encontre, que celui-ci avait signé le contrat de location-gérance du fonds de commerce de la société, divers chèques et correspondances commerciales et qu'une lettre d'un salarié

licencié adressée à M. Y... indiquerait que la décision de licenciement avait été prise par ce dernier, sans caractériser les actes autonomes et indépendants de direction de la société que M. Y... aurait dû effectuer en qualité de gérant de fait, la cour d'appel n'a pas justifié sa décision au regard des articles 180 et 192 de la loi du 25 janvier 1985 ;

alors, d'autre part, que, par une lettre du 2 février 1993, M. Arnoux précisait qu'après son retour de congé payé, M. Y... lui a indiqué qu'il était licencié, qu'il n'avait plus à venir travailler et qu'il pouvait retourner à la maison et qu'en réponse à un appel téléphonique effectué l'après-midi même à l'entreprise, Mme Y... lui a répété qu'il n'avait effectivement plus à revenir travailler, qu'il pouvait s'adresser à M. Z... pour tout renseignement ; qu'en en déduisant que M. Y... avait pris la décision de licencier M. Arnoux et que sa mère s'exprimait en son nom, la cour d'appel a dénaturé la lettre de M. Arnoux en violation de l'article 1134 du Code civil ; alors, encore, que le Tribunal, qui prononce la résolution du plan de continuation, ouvre une nouvelle procédure de redressement judiciaire pouvant fixer une nouvelle date de cessation des paiements ; qu'une cour d'appel qui entend condamner le dirigeant à combler une partie du passif de la société en liquidation judiciaire ou prononcer une interdiction de gérer à son encontre ne peut retenir que des faits postérieurs à la décision arrêtant le plan de continuation et antérieurs à celle ouvrant, après sa résolution, une nouvelle procédure de redressement judiciaire ; qu'en retenant, pour dire justifiée l'action engagée par le liquidateur à l'encontre des consorts Y..., la dilapidation des fonds et la poursuite d'une activité déficitaire intervenues antérieurement à l'arrêté du plan de continuation, la cour d'appel a violé les articles 80, 180 et 192 de la loi du 25 janvier 1985 dans sa rédaction antérieure à la loi du 10 juin 1994 ; alors, en outre, qu'en prononçant une condamnation des consorts Y... à combler l'insuffisance d'actif de la société et une interdiction de gérer à leur encontre, sans préciser dans laquelle des deux procédures collectives distinctes ouvertes successivement à l'encontre de la société il y avait lieu de constater la réunion des conditions d'application des articles 180 et 192 de la loi du 25 janvier 1985, la cour d'appel n'a pas mis la Cour de Cassation en mesure d'exercer son contrôle en violation des articles 80,180 et 192 de la loi du 25 janvier 1985 ; alors, de plus, que le Tribunal arrêtant le plan de continnation de la société avait dit, par un jugement du 22 novembre 1991, que les consorts Y... devront faire l'apport à la société, dans un délai de trois mois et pour un franc symbolique, du fonds de commerce de la Société d'exploitation forestière et scierie des Alpes du Sud, dont le siège est à Embrun ; qu'en considérant comme constitutives d'une faute des consorts Y... la création et l'activité de cette société, la cour d'appel a violé les articles 1351 du Code civil et 64 de la loi du 25 janvier 1985 ; alors, de surcroît, que les consorts Y... faisaient valoir que Mme Y... s'était conformée aux dispositions du jugement d'arrêté du plan de redressement, que la Société d'exploitation forestière des Alpes du Sud avait été dissoute et liquidée au 31 décembre 1991 ; qu'en estimant que la création et

l'exploitation de cette société constituaient une faute des consorts Y..., sans s'expliquer sur ces éléments, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 180 de la loi du 25 janvier 1985 ; et alors, enfin, que les interdictions visées à l'article 192 de la loi du 25 janvier 1985 ne peuvent s'appliquer que dans les cas prévus par les articles 189 et 190, visant les dirigeants de personne morale ayant exercé une activité commerciale, artisanale ou agricole ou une fonction de direction ou d'administration d'une personne morale contrairement à une interdiction légale, ou effectué des achats en vue d'une revente au-dessous du cours dans l'intention de retarder l'ouverture d'une procédure de redressement judiciaire, ou souscrit pour le compte d'autrui sans contrepartie des engagements trop importants au moment de leur conclusion, eu égard à la situation de la personne morale, ou payé un créancier après la cessation des paiements et en connaissance de cause au préjudice des autres créanciers, ou omis de procéder à la déclaration de cessation des paiements dans le délai légal et ou d'acquitter des dettes de la société mises à sa charge ; qu'en prononçant une interdiction de gérer à l'encontre des consorts Y... en raison de leur "malhonnêteté", la cour d'appel a violé les articles 189,190 et 192 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt retient que M. Y..., fils de la gérante de droit , a conclu, le 1er décembre 1981, le contrat de location-gérance du fonds de commerce familial exploité par la société, signé différentes correspondances commerciales, des chèques, licencié le personnel dont il établissait les fiches de paye, tandis qu'il soutenait contre toute vraisemblance que sa mère dirigeait l'exploitation des coupes de bois ou le débardage et assurait la direction financière ; que, par motif adopté, il retient que les salariés de l'entreprise ont toujours considéré que leur employeur était M. Y..., Mme Y... se contentant de rapporter les paroles de son fils lorsqu'elle était interrogée ; que, de ces seules constatations et appréciations, la cour d'appel, sans encourir le grief de la deuxième branche, a légalement justifié sa décision de retenir la qualité de gérant de fait de M. René Y... ;

Attendu, en second lieu, que la poursuite de l'activité par un plan de redressement est sans influence sur l'appréciation de la faute de gestion retenue à l'encontre des consorts Y... pour la période antérieure au prononcé du redressement judiciaire ;

Attendu, en troisième lieu, que I'arrêt relève que M. Y... a créé, avec sa mère en qualité d'associée, en septembre 1989, une Société d'exploitation forestière et scierie des Alpes du Sud, dont l'existence a fait chuter de près de moitié le chiffre d'affaires de la société ; qu'il retient encore que Mme Y... avait dilapidé des fonds versés par erreur par une banque sur le compte de la société en quelques jours en émettant des chèques à son ordre et à celui de son fils et qu'en dépit de cette dette importante (1 818 597 francs), elle n'avait pas déclaré la cessation des paiements, la procédure ayant été ouverte sur assignation de la banque et la date de cessation des paiements fixée par jugement irrévocable au 31 décembre 1989, soit près d'un an avant l'ouverture de la procédure collective ; que la cour d'appel a ainsi caractérisé les fautes de gestion de M. Y... et de Mme Y... et légalement justifié sa décision ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses sept branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne les consorts Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. Z..., ès qualités ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le conseiller le plus ancien faisant fonctions de président en son audience publique du six juillet mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 97-14721
Date de la décision : 06/07/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement et liquidation judiciaires - Personne morale - Dirigeants sociaux - Paiement des dettes sociales - Faute de gestion - Définition - Constatations suffisantes.


Références :

Loi 85-98 du 25 janvier 1985 art. 180

Décision attaquée : Cour d'appel de Grenoble (Chambre commerciale), 12 mars 1997


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 06 jui. 1999, pourvoi n°97-14721


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BEZARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:97.14721
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