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29/06/1999 | FRANCE | N°96-16860

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 29 juin 1999, 96-16860


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel (CRCAM) des Côtes-d'Armor, dont le siège est La Croix Tual, ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 11 avril 1996 par la cour d'appel de Rennes (1re chambre B), au profit de la société SOFI, société à responsabilité limitée, dont le siège est ...,

défenderesse à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation

annexés au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 18 mai 1999, où étaient présent...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel (CRCAM) des Côtes-d'Armor, dont le siège est La Croix Tual, ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 11 avril 1996 par la cour d'appel de Rennes (1re chambre B), au profit de la société SOFI, société à responsabilité limitée, dont le siège est ...,

défenderesse à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 18 mai 1999, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Leclercq, conseiller rapporteur, MM. Nicot, Léonnet, Poullain, Métivet, Mme Garnier, conseillers, M. Huglo, Mme Mouillard, M. Boinot, Mmes Champalaune, Gueguen, conseillers référendaires, M. Jobard, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Leclercq, conseiller, les observations de Me Blondel, avocat de la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel (CRCAM) des Côtes-d'Armor, de la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez, avocat de la société SOFI, les conclusions de M. Jobard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué, que la Caisse régionale de Crédit agricole des Côtes-d'Armor (la banque) a reçu la somme de 500 000 francs de la société SOFI en vue d'une augmentation de capital ;

que cette somme a, d'abord, été versée à un compte d'affectation spéciale, puis quelques jours plus tard a été virée sur le compte courant de la société Boivalor ; que celle-ci ayant déposé son bilan, quelques semaines plus tard, et l'augmentation projetée de son capital n'ayant pas été réalisée, la société SOFI a fait assigner la banque en remboursement de la somme versée et à des dommages-intérêts ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que la banque fait grief à l'arrêt de sa condamnation à restitution, alors, selon le pourvoi, d'une part, que nulle disposition légale n'impose à une banque de s'assurer que le projet d'augmentation de capital a lieu et que, selon l'article 61, alinéa 2, de la loi du 24 juillet 1966, dans sa rédaction applicable au litige, le retrait des fonds provenant des souscriptions peut être effectué par le mandataire de la société trois jours francs après leur dépôt sans que le banquier ait l'obligation d'informer le souscripteur de ce retrait ou d'obtenir son accord ; qu'en statuant dès lors comme elle le fait, en faisant peser sur le banquier des obligations n'ayant aucune source légale ou contractuelle et sans constater l'existence d'un usage en ce sens, la cour d'appel viole l'article précité, ensemble l'article 1382 du Code civil ; alors, d'autre part, que la cour d'appel ne pouvait affirmer que la banque avait agi dans son intérêt et à son seul profit pour combler partiellement le découvert de la société Boivalor, cependant que dans ses conclusions du 26 septembre 1994, la banque faisait valoir que par arrêt du 11 avril 1991 la chambre d'accusation de la cour d'appel de Rennes avait estimé que le Crédit agricole n'avait tiré aucun profit de l'opération ; qu'en effet, la chambre d'accusation avait retenu "que le bénéficiaire des fonds a bien été la société qui a pu ainsi assurer ses échéances de septembre et non pas la banque puisque durant cette même période, représentant des créanciers de la société Boivalor, on ne note pas de réduction sensible du découvert bancaire consenti à la société" ; d'où il suit qu'en statuant comme elle le fait, la cour d'appel méconnaît l'autorité s'attachant à ces constatations et appréciations et partant viole l'article 4 du Code de procédure pénale ; et alors, enfin, que le juge doit se prononcer à partir de certitudes sans pouvoir extrapoler ; que la cour d'appel constate que le virement litigieux a été effectué le 8 septembre, à la suite d'un entretien téléphonique entre le représentant de la société Boivalor et la banque ;

qu'elle constate encore que le 10 septembre la banque a eu connaissance de l'existence des pertes de la société Boivalor ; qu'en affirmant dès lors que la banque avait connaissance de la situation de la société Boivalor antérieurement au 10 septembre au motif péremptoire qu'au cours de l'entretien téléphonique antérieur à cette date " la situation de la société n'a pu qu'être évoquée", sans que cette affirmation au contenu imprécis soit étayée par le moindre élément de preuve, la cour d'appel ne justifie pas légalement son arrêt au regard de l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que, selon l'arrêt, la banque, bien qu'informée de la destination des fonds, les a débloqués peu après leur dépôt en compte d'affectation spéciale sans s'assurer de la réalisation de l'augmentation de capital pour laquelle elle les avait reçus ;

qu'ainsi il a caractérisé la faute de la banque, indépendamment du motif visé par la troisième branche du moyen ;

Attendu, en second lieu, que la décision de non-lieu évoquée à la deuxième branche du moyen n'ayant pas autorité de chose jugée, le grief est inopérant ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Mais sur le second moyen, pris en sa troisième branche :

Vu l'article 1382 du Code civil ;

Attendu que l'arrêt condamne la banque pour résistance abusive, à payer des dommages-intérêts pour un montant de 30 000 francs ;

Attendu qu'en statuant ainsi, sans caractériser la faute de la banque dans l'exercice de son droit d'ester en justice, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;

PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il a condamné la Caisse régionale de Crédit agricole mutuel des Côtes-d'Armor à payer à la société SOFI la somme de 30 000 francs, l'arrêt rendu le 11 avril 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Rennes ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Angers ;

Condamne la société SOFI aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Sofi ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf juin mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 96-16860
Date de la décision : 29/06/1999
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

BANQUE - Responsabilité - Compte - Compte d'affectation spéciale - Déblocage de fonds sans vérification.

ACTION EN JUSTICE - Exercice abusif - Faute - Recherche nécessaire.


Références :

Code civil 1382

Décision attaquée : Cour d'appel de Rennes (1re chambre B), 11 avril 1996


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 29 jui. 1999, pourvoi n°96-16860


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BEZARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:96.16860
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