Sur le moyen unique, pris en ses quatre branches :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 27 février 1997), que la société Etablissements J. Richard X... (société Richard X...), spécialisée dans les constructions métalliques, a soumissionné, le 12 mars 1990, à un marché ouvert par la Chambre de commerce et d'industrie de Marseille, selon une procédure d'appel d'offres, pour l'extension de l'aéroport de Marseille-Marignane ; qu'elle fut avisée, le 15 septembre 1990, que sa proposition n'avait pas été retenue et que le lot avait été attribué à une société de droit italien Constructions métalliques Finsider Sud (société CMF Sud) qui avait fait une offre de 15 431 000 francs HT, alors que son offre était de 20 562 769,90 francs HT ; qu'estimant que le jeu de la libre concurrence avait été faussé parce que la proposition de la société CMF Sud, très inférieure à celles de ses concurrents, n'avait été rendue possible que par suite des aides directes ou indirectes de l'Etat italien dont elle bénéficiait, la société Richard X... a assigné devant le tribunal de commerce la société CMF Sud en dommages-intérêts pour concurrence déloyale ; qu'en même temps, elle est intervenue en 1992 dans une procédure que la Commission des Communautés européennes venait de diligenter contre le gouvernement italien, sur le fondement de l'article 93, paragraphe 3, du Traité, pour le soutien apporté à la société CMF Sud, filiale de la société Italimplanti, cette dernière étant elle-même la " filiale à 100 % " du groupe public italien IRI, par des aides de diverses natures apportées à la société CMF Sud, qui avait accusé " de lourdes pertes après 1989 " ;
Attendu que la société Richard X... fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'une entreprise se rend coupable de concurrence déloyale en pratiquant des prix artificiellement bas, incomparablement inférieurs à ceux de ses concurrents, du fait du non-respect d'une obligation légale ou en raison d'une illicéité ; que, dans ses conclusions d'appel, la société Richard X... ne limitait pas sa critique aux aides directes consenties à CMF par l'Etat italien, mais mettait également en cause la prise de contrôle de CMF par la société d'Etat Italimpianti, par laquelle l'Etat italien devenait garant des engagements pris par CMF ; qu'en se bornant à analyser les seules aides directes (distribuées après 1990), sans examiner les autres procédés de soutien, et notamment les garanties données à CMF par l'Etat italien (antérieurement à 1990), la cour d'appel a privé sa décision de toute base légale au regard des articles 1382 et 1383 du Code civil ; alors, d'autre part, que la cour d'appel, qui constate que des pertes substantielles ont été subies par la société CMF Sud en 1989 et 1990, et que ces pertes ont été couvertes par l'utilisation du capital social en 1991, aurait dû rechercher si, en l'absence des aides de l'Etat italien, même postérieures, la CMF en déconfiture aurait été en mesure d'exécuter le marché soumissionné à un prix artificiellement bas ; qu'en s'abstenant de procéder à une telle recherche, la cour d'appel a privé à nouveau sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; alors, en outre, que la faute sans laquelle le dommage ne se serait pas produit est en relation avec le préjudice subi par la victime qui peut, même en cas de pluralité de cause, en demander réparation ; qu'en exigeant la démonstration que les aides publiques reçues par la société CMF " aient seules permis à cette société de présenter l'offre de prix la moins chère ", la cour d'appel a perdu de vue qu'il suffisait que les aides aient permis à CMF de présenter l'offre la moins-disante pour engager sa responsabilité sur le fondement de la concurrence déloyale ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 1382 du Code civil ; et alors, enfin, que, pour écarter tout lien de causalité entre la faute et le préjudice, la cour d'appel énonce que " la démonstration n'est pas faite de ce que dans ce marché les aides dont a bénéficié CMF Sud... ont seules permis à cette société de présenter l'offre de prix la moins chère " et que " d'autres facteurs ont en effet pu intervenir (coût de productivité moindre pour l'Italie peut être également aspect monétaire)... " ; qu'en se prononçant ainsi, par des motifs manifestement hypothétiques, la cour d'appel, qui ne tient pas pour avérés les faits qu'elle oppose à la société Richard X..., a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;
Mais attendu, en premier lieu, que la cour d'appel, appréciant la portée de la décision de la Commission des Communautés européennes rappelée dans sa communication C 20/4 du 16 mai 1995, en a déduit " qu'antérieurement à 1991 CMF Sud n'avait bénéficié d'aucune aide publique significative qui lui ait permis directement de fausser les conditions de la concurrence intercommunautaire, et plus particulièrement celles du marché d'appel d'offre dont Richard X... prétend avoir été évincé déloyalement.... " ;
Attendu, en second lieu, que la cour d'appel, analysant les éléments de preuve versés aux débats, relève que, contrairement à ce que la société appelante suggère, le lien de causalité entre l'octroi d'aides publiques à la société CMF Sud et son éviction du marché de l'aéroport n'est pas " évident " ; qu'ainsi, abstraction faite d'une motivation surabondante critiquée par les deux dernières branches du moyen, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;
Que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi.