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26/05/1999 | FRANCE | N°98-84997;99-81457

France | France, Cour de cassation, Chambre criminelle, 26 mai 1999, 98-84997 et suivant


REJET des pourvois formés par :
- X...,
1° contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Bastia, en date du 19 août 1998, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de tentative de viol avec usage ou menace d'une arme et tentative de meurtre, a prononcé sur sa requête aux fins d'annulation d'actes de procédure ;
2° contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Bastia, en date du 3 février 1999, qui, dans la même procédure, a ordonné sa mise en accusation et son renvoi devant la cour d'assises de la Haute-Corse.
LA COUR,>Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
I. Sur le pourvoi formé ...

REJET des pourvois formés par :
- X...,
1° contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Bastia, en date du 19 août 1998, qui, dans l'information suivie contre lui des chefs de tentative de viol avec usage ou menace d'une arme et tentative de meurtre, a prononcé sur sa requête aux fins d'annulation d'actes de procédure ;
2° contre l'arrêt de la chambre d'accusation de la cour d'appel de Bastia, en date du 3 février 1999, qui, dans la même procédure, a ordonné sa mise en accusation et son renvoi devant la cour d'assises de la Haute-Corse.
LA COUR,
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
I. Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 19 août 1998 :
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation visant l'arrêt du 19 août 1998 et pris de la violation des articles 194, 197, 591 et 593 du Code de procédure pénale et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales, des droits de la défense :
" en ce que l'arrêt de la chambre d'accusation ne mentionne ni la date de notification de l'audience aux parties, ni la date à laquelle le dossier a été déposé au greffe de la chambre d'accusation, ni celle à laquelle a été établi le réquisitoire de M. le procureur général ;
" alors que, d'une part, le délai minimum entre la date d'envoi de convocation à l'audience et celle de l'audience est prescrit à peine de nullité ; qu'en omettant de l'indiquer, l'arrêt vide les droits de la défense ;
" alors que, d'autre part, l'arrêt ne satisfait pas aux conditions de son existence légale en ne mentionnant pas la date à laquelle a été établi puis notifié le réquisitoire de M. le procureur général et en mettant à la place un point d'interrogation " ;
Attendu qu'il résulte des mentions de l'arrêt attaqué que Me Secondi, avocat de la personne mise en examen, était présent à l'audience de la chambre d'accusation et qu'il a été entendu en ses observations sommaires sans alléguer une notification tardive de la date d'audience dont serait résulté l'empêchement de déposer un mémoire ou de répliquer aux réquisitions du ministère public ;
Qu'ainsi, aucune atteinte n'ayant été portée aux intérêts du demandeur et aux droits de la défense, le moyen doit être écarté ;
Sur le deuxième moyen de cassation visant l'arrêt du 19 août 1998 et pris de la violation des articles 63, 63-1, 171, 173, 591, 593 du Code de procédure pénale, et 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales des droits de la défense :
" en ce que la chambre d'accusation a déclaré mal fondée la requête d'X... rappelant que les droits relatifs à la garde à vue ne lui ont été notifiés que tardivement, et n'y avoir lieu à prononcer la nullité de la procédure subséquente ;
" aux motifs qu'il résulte de la procédure qu'X... a été interpellé le 2 avril 1997 à 19 heures dans un bunker au lieudit "l'Arinella" à Bastia ; qu'après perquisition des lieux, les policiers ont quitté le local à 19 h 30 pour regagner le commissariat à 19 h 45, X... était fouillé à corps et soumis à un contrôle de son alcoolémie ; qu'il a été alors décidé de son placement en garde à vue et les fonctionnaires de police ont recherché un interprète en langue allemande ; que 2 interprètes étant, l'un absent, l'autre souffrant, Mme le substitut de M. le procureur de la République donnait directive aux policiers de rechercher parmi leurs collègues, l'un d'entre eux parlant allemand ; que c'est ainsi que Pascal X..., gardien de la paix à la CRS 36, s'est déplacé au commissariat de Bastia où il parvenait à 21 heures, ce 2 avril 1997 ; que, compte tenu de la difficulté, il a été vérifié que l'intéressé avait les aptitudes nécessaires pour interpréter convenablement en langue allemande ; qu'il a été dressé procès-verbal de ces vérifications et, à 22 heures, assisté de cet interprète ad hoc ayant prêté serment, X... recevait notification de sa mise en garde à vue et de ses droits, conformément aux dispositions de l'article 63-1 du Code de procédure pénale ;
" alors que, d'une part, toute personne placée en garde à vue doit être immédiatement informée des droits attachés à ce placement ; qu'en constatant qu'X... avait été placé en garde à vue le 2 avril 1997 à 19 h 45, et que ses droits ne lui avaient été notifiés qu'à 22 heures alors qu'un interprète était arrivé au commissariat dès 21 heures, tout en considérant la procédure régulière, la chambre d'accusation a violé les textes susvisés ;
" alors que, d'autre part, c'est au prix d'une contradiction que la chambre d'accusation a constaté, pour justifier la régularité de la procédure, que "les circonstances ont rendu impossible la notification en une langue que l'intéressé pouvait comprendre avant 22 heures", tout en constatant que l'interprète était arrivé à 21 heures et, au prix d'une violation de la loi, que la cour d'appel a estimé qu'il avait fallu une heure pour vérifier que l'interprète avait les aptitudes nécessaires pour interpréter convenablement la langue allemande " ;
Attendu que, pour rejeter la requête tendant à ce que soit prononcée la nullité de la procédure de garde à vue, l'arrêt se prononce par les motifs reproduits au moyen ;
Qu'en cet état, la chambre d'accusation, qui a souverainement apprécié la légitimité du retard pour informer de ses droits la personne placée en garde à vue, a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
Que, dès lors, le moyen ne saurait être admis ;
Sur le troisième moyen de cassation visant l'arrêt du 19 août 1998 et pris de la violation des articles 121, 63 et suivants, 591 et 593 du Code de procédure pénale et des droits de la défense :
" en ce que la chambre d'accusation a refusé d'annuler la procédure suivant le placement d'X... en garde à vue ;
" aux motifs que, c'est ainsi que Pascal X..., gardien de la paix à la CRS 36 s'est déplacé au commissariat de Bastia où il parvenait à 21 heures, ce 2 avril 1997 ; que, compte tenu de la difficulté, il a été vérifié que l'intéressé avait les aptitudes nécessaires pour interpréter convenablement en langue allemande ; qu'il a été dressé procès-verbal de ces vérifications et, à 22 heures, assisté de cet interprète ad hoc ayant prêté serment, X... recevait notification de sa mise en garde à vue et de ses droits, conformément aux dispositions de l'article 63-1 du Code de procédure pénale ; que l'interprète ad hoc dûment assermenté, a assisté l'intéressé tout au long de la garde à vue, et qu'il ne peut être tiré grief de ne pas avoir recherché un interprète inscrit sur une liste d'experts le lendemain, aucune disposition légale ne prévoyant une telle obligation ;
" alors que, d'une part, la chambre d'accusation a omis de répondre au moyen tiré de ce que la prestation de serment n'était pas régulière, ayant été annexée le lendemain du placement en garde à vue et ne mentionnant pas l'heure à laquelle elle avait été effectuée, interdisant ainsi de vérifier si elle avait bien été effectuée préalablement au procès-verbal de garde à vue ;
" alors que, d'autre part, la chambre d'accusation a omis de répondre au moyen tiré de ce que, à supposer légales les conditions dans lesquelles l'interprète ad hoc avait prêté serment, cette prestation de serment en date du 2 avril 1997 n'était valable que pour le 2 avril 1997, dès lors qu'il n'était pas démontré que les 2 interprètes français-allemand de Bastia, dont l'un était souffrant et l'autre ne répondait pas à 19 h 45 le 2 avril 1997, n'étaient pas devenus disponibles le lendemain pour la suite de la procédure de garde à vue " ;
Attendu que les dispositions de l'article 102 du Code de procédure pénale ne sont pas applicables à l'enquête de flagrance et qu'aucun texte n'exige que celui qui apporte son assistance à un officier de police judiciaire, pour que la personne placée en garde à vue soit informée de ses droits dans une langue qu'elle comprend, ait prêté serment ;
Que, dès lors, le demandeur ne saurait se faire un grief du recours à un interprète non assermenté ou de l'irrégularité du serment qu'il a cependant prêté ;
D'où il suit que le moyen doit être écarté ;
II. Sur le pourvoi formé contre l'arrêt du 3 février 1999 :
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation visant l'arrêt du 3 février 1999 et pris de la violation des articles 591, 593, 594 et 595 du Code de procédure pénale :
" en ce que l'arrêt de renvoi devant la cour d'assises attaqué est la suite nécessaire d'un arrêt antérieur du 19 août 1998 statuant sur la régularité de procédure d'instruction et devra être cassé, par voie de conséquence de la cassation dudit arrêt " ;
Attendu que ce moyen, qui se borne à demander la cassation de l'arrêt du 3 février 1999 par voie de conséquence de celle de l'arrêt du 19 août 1998, est devenu sans objet ;
Sur le second moyen de cassation visant l'arrêt du 3 février 1999 et pris de la violation des articles 157, 162, 164, 167, 591, 593 du Code de procédure pénale :
" en ce que la chambre d'accusation a ordonné le renvoi d'X... devant la cour d'assises pour tentative de viol et tentative de meurtre ;
" aux motifs que, l'expert Y... a conclu qu'X... présente une personnalité d'allure psychopathique ; cette personnalité explique son comportement actuel et passé sans qu'il soit besoin de recourir à une nouvelle expertise ; le rapport du docteur Y... est particulièrement clair et précis pour informer suffisamment la cour d'assises sur la personnalité d'X... ; que, depuis le 16 avril 1997, le Parquet de Hanovre est saisi par le magistrat instructeur bastiais d'une demande de curriculum vitae concernant X... ; cette demande, malgré plusieurs rappels, n'a jamais été suivie de réponse ; qu'X..., qui n'a pas voulu donner de renseignements sur sa vie passée en Allemagne, ne saurait solliciter un supplément d'information dans l'attente d'un hypothétique rapport de curriculum vitae émanant des autorités allemandes, et ce, afin de retarder son jugement ; que les demandes de complément d'information seront, en conséquence, rejetées ;
" alors que, d'une part, la chambre d'accusation ne pouvait pas considérer que le rapport d'expertise était suffisant sans avoir répondu au moyen selon lequel il était nécessaire d'ordonner une expertise complémentaire du fait que l'expert psychiatre avait dû être assisté d'un interprète, ce qui avait conduit le mis en examen à refuser de répondre à certaines questions intimes en raison de la présence de l'interprète ;
" alors que, d'autre part, la chambre d'accusation ne pouvait pas considérer que le rapport d'expertise expliquait le comportement actuel et passé d'X... sans qu'il soit besoin de recourir à une nouvelle expertise, sans avoir répondu au moyen selon lequel une nouvelle expertise s'imposait, dans la mesure où l'expert avait rédigé son rapport en ignorant qu'X... avait déjà fait l'objet de 5 condamnations pour agression sexuelle " ;
Attendu que, pour rejeter la demande de supplément d'information, l'arrêt se prononce par les motifs reproduits au moyen ;
Qu'en cet état, la chambre d'accusation, qui a répondu sans insuffisance ni contradiction aux articulations essentielles du mémoire dont elle était saisie et qui a estimé souverainement que l'information était complète, a justifié sa décision sans encourir les griefs allégués ;
Que, dès lors, le moyen ne saurait être admis ;
Et attendu que la chambre d'accusation était compétente, qu'il en est de même de la cour d'assises devant laquelle l'accusé a été renvoyé, que la procédure est régulière et que les faits, objet de l'accusation, sont qualifiés crime par la loi ;
REJETTE les pourvois.


Synthèse
Formation : Chambre criminelle
Numéro d'arrêt : 98-84997;99-81457
Date de la décision : 26/05/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Criminelle

Analyses

GARDE A VUE - Droits de la personne gardée à vue - Notification - Retard - Appréciation souveraine.

CRIMES ET DELITS FLAGRANTS - Garde à vue - Droits de la personne gardée à vue - Notification - Retard - Appréciation souveraine

DROITS DE LA DEFENSE - Garde à vue - Droits de la personne gardée à vue - Notification - Retard - Appréciation souveraine

GARDE A VUE - Droits de la personne gardée à vue - Notification - Langue comprise par la personne gardée à vue - Interprète assermenté - Nécessité (non)

CRIMES ET DELITS FLAGRANTS - Garde à vue - Droits de la personne gardée à vue - Notification - Langue comprise par la personne gardée à vue - Interprète assermenté - Nécessité (non)

DROITS DE LA DEFENSE - Garde à vue - Droits de la personne gardée à vue - Notification - Langue comprise par la personne gardée à vue - Interprète assermenté - Nécessité (non)

La chambre d'accusation apprécie souverainement si le retard pour informer de ses droits la personne placée en garde à vue est légitime. L'article 63-1 du Code de procédure pénale exige seulement que les informations ci-dessus soient données dans une langue que la personne gardée à vue comprend et non que l'officier de police judiciaire ait recours à un interprète assermenté. (1).


Références :

Code de procédure pénale 63-1

Décision attaquée : Cour d'appel de Bastia (chambre d'accusation), 1998-08-19 et 1999-02-03

CONFER : (1°). (1) Cf. Chambre criminelle, 1990-02-13, Bulletin criminel 1990, n° 73, p. 191 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1995-04-03, Bulletin criminel 1995, n° 140, p. 394 (rejet) ;

Chambre criminelle, 1998-06-18, Bulletin criminel 1998, n° 200, p. 552 (rejet et cassation).


Publications
Proposition de citation : Cass. Crim., 26 mai. 1999, pourvoi n°98-84997;99-81457, Bull. crim. criminel 1999 N° 105 p. 280
Publié au bulletin des arrêts de la chambre criminelle criminel 1999 N° 105 p. 280

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Gomez
Avocat général : Avocat général : M. Di Guardia.
Rapporteur ?: Rapporteur : M. Palisse.
Avocat(s) : Avocat : la SCP Lyon-Caen, Fabiani et Thiriez.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:98.84997
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