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11/05/1999 | FRANCE | N°96-11947

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 11 mai 1999, 96-11947


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. Pascal H..., demeurant ...;

en cassation d'un arrêt rendu le 20 décembre 1995 par la cour d'appel de Bourges (1re Chambre), au profit :

1 / de la Compagnie rhodanienne d'impression et de cartonnage (CRIC), société anonyme dont le siège social est ...,

2 / de la société Rochette Cempa Ondule (RCO), société anonyme dont le siège social est ...,

3 / de la société Chartier Chapus, dite "Rojansala

isons", société anonyme dont le siège social est ...,

4 / de la société Bugey salaisons (BS), so...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. Pascal H..., demeurant ...;

en cassation d'un arrêt rendu le 20 décembre 1995 par la cour d'appel de Bourges (1re Chambre), au profit :

1 / de la Compagnie rhodanienne d'impression et de cartonnage (CRIC), société anonyme dont le siège social est ...,

2 / de la société Rochette Cempa Ondule (RCO), société anonyme dont le siège social est ...,

3 / de la société Chartier Chapus, dite "Rojansalaisons", société anonyme dont le siège social est ...,

4 / de la société Bugey salaisons (BS), société anonyme dont le siège social est ...,

5 / de la société France viandes, société anonyme dont le siège social est ... Herriot, 69007 Lyon,

6 / de la société Centre viandes, société anonyme dont le siège social est ...,

7 / de la Société civile coopérative, dite "Sicarev", dont le siège social est à Chalin-le-Comptal, 42600 Montbrisson,

8 / de la société Etablissements Robert X..., dont le siège social est ...,

9 / de la société Etablissements Marcel G..., société anonyme dont le siège social est ...,

10 / de M. Z..., pris en sa qualité de liquidateur de la liquidation judiciaire de la société anonyme Etablissements Marcel G..., demeurant ...,

11 / de M. Louis C..., demeurant ...,

12 / de la société Transports Bouhours, société anonyme dont le siège social est à Franqueville, 27800 Brionne,

13 / de la Société coopérative agricole, dite "GPBM" (Groupement de producteurs bovins de la Meuse), dont le siège social est ..., 55100 Verdun,

14 / de la société Etablissements Daniel A..., société à responsabilité limitée dont le siège social est ...,

15 / de la société La I... Ani Vi 52, société à responsabilité limitée dont le siège social est ... Bourgmont,

16 / de la société Meyer, société à responsabilité limitée dont le siège social est ...,

17 / de la société Meyer, société anonyme dont le siège social est 55190 Mauvages,

18 / de la société Etablissements Jean E..., dont le siège social est ...,

19 / de la société Etablissements Alain D..., société à responsabilité limitée dont le siège social est ...,

67170 Brumath,

20 / de la société Kugel frères, société à responsabilité limitée dont le siège social est ..., venant aux droits et actions de la société Zinser international, dont le siège social est ...,

21 / de la société Tra de Via, société anonyme dont le siège social est ...,

22 / de la société Mag, société à responsabilité limitée dont le siège social est ... 145, 94500 Rungis,

23 / de la société Kugel frères, société à responsabilité limitée dont le siège social est ..., venant aux droits et actions de la société Wirtz GMB, dont le siège social est Hauptstrasse 32, 5531 Betteldorf,

24 / de la société Gallais, société anonyme dont le siège social est ...,

25 / de la société Socobeval, société à responsabilité limitée dont le siège social est ...,

26 / de la société Meledo, société anonyme dont le siège social est ...,

27 / de la société Delanchy "Frigo transports 86", société à responsabilité limitée dont le siège social est ...,

28 / de la société Merle, société anonyme dont le siège social est à Ruilly-les-Fleurs, 42110 Feurs,

29 / de la société MG Siac, société anonyme dont le siège social est ...,

30 / de l'entreprise unipersonnelle à responsabilité limitée Vauche, dont le siège social est ...,

31 / de Mme le procureur de la République, dont les bureaux sont au Palais de Justice, 03300 Cusset,

32 / de M. Philippe Y..., demeurant ...,

33 / du tribunal de commerce de Cusset, pris en la personne de son président en exercice, dont les bureaux sont rue du Bief, 03300 Cusset,

34 / de l'Etat français, pris en la personne de l'agent judiciaire du Trésor en exercice, dont les bureaux sont au ministère du Budget, ...,

défendeurs à la cassation ;

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 16 mars 1999, où étaient présents : M. Bézard, président, Mme Aubert, conseiller rapporteur, MM. Grimaldi, Tricot, Badi, Armand-Prevost, Mmes Vigneron, Tric, Besançon, conseillers, Mme Geerssen, M. Rémery, Mmes Graff, Champalaune, M. de Monteynard, Mme Gueguen, conseillers référendaires, Mme Piniot, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Aubert, conseiller, les observations de Me Vuitton, avocat de M. H..., de Me Choucroy, avocat des sociétés Compagnie Rhodanienne d'impression et de cartonnage, Rochette Cempa Ondule, Chartier Chapus, Bugey salaisons, France viandes, Centre viandes, Société civile coopérative, Etablissements Robert X..., Etablissements Marcel G..., sociétés Meledo, Delanchy "Frigo transports 86", Merle, MG Siac, EURL Vauche et M. Z..., ès qualités, de la SCP Gatineau, avocat des sociétés Société coopérative agricole, Etablissements Daniel A..., La I... Ani Vi 52, Meyer SA et Meyer SARL, Etablissements Jean E..., Etablissements Alain D..., Kugel frères, Tra de Via, Mag, Gallais et Socobeval, de la SCP Boré et Xavier, avocat de M. Y..., de la SCP Ancel et Couturier-Heller, avocat de l'Etat français, Me Blanc, avocat de l'EURL Vauche, les conclusions de Mme Piniot, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Met hors de cause l'agent judiciaire du Trésor et M. Y... ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué ( Bourges, 20 décembre 1995), qu'à la suite de la mise en redressement judiciaire de la société Bourbonnaise des viandes et dérivés, le 2 mai 1989, quatre offres de reprise ont été soumises à M. H..., nommé administrateur, qui a opté pour celle faite par une personne se présentant comme étant M. B..., industriel belge, qui, en contrepartie de la cession du capital, avait proposé l'apurement total du passif en dix ans, la reprise de tous les salariés et un apport de 12 000 000 francs ; qu'ensuite, le repreneur pressenti a modifié la garantie offerte qu'il a ramenée à un apport de 3 000 000 francs, le reste étant étalé sur neuf mois avec une caution bancaire, cette dernière garantie étant elle-même remplacée ultérieurement par la remise en garantie de titres sur des sociétés américaines ; que le Tribunal a arrêté le plan de redressement, le 17 octobre 1989, en exécution duquel les actions ont été cédées et le repreneur désigné aux fonctions de président du conseil d'administration ;

que, dès le lendemain de l'adoption du plan, une lettre signée par le dirigeant de la société, par le repreneur et par l'administrateur nommé commissaire à l'exécution du plan invitait les fournisseurs à continuer à traiter avec l'entreprise ; que la troisième échéance correspondant à l'augmentation du capital prévue dans le plan de redressement n'ayant pas été payée, le commissaire à l'exécution du plan a avisé le Tribunal, qui a prononcé la résolution du plan et ouvert une nouvelle procédure de redressement judiciaire, le 7 février 1990, puis a prononcé la liquidation judiciaire, le 21 février 1990 ; qu'une information a été ouverte qui a révélé que la personne qui prétendait être M. B... n'était autre qu'un escroc, M. F..., qui a été condamné, ainsi que ses complices, par arrêt d'une cour d'appel du 3 février 1994 ; que les fournisseurs qui avaient continué à livrer des fournitures après l'adoption du plan de redressement de la société ont mis en cause la responsabilité de M. H..., pris en sa qualité d'administrateur ; que le tribunal de grande instance a condamné l'administrateur à réparer le préjudice causé à ving-neuf fournisseurs en leur versant diverses sommes représentant au total un montant de 18 559 544 francs plus les intérêts au taux légal à compter du 29 mars 1991 ;

Sur le moyen unique, pris en trois premières branches :

Attendu que l'administrateur fait grief à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'il résultait de ses conclusions que le Tribunal avait été tenu informé du fait que la poursuite de l'activité de la société générait des pertes, qu'il avait désigné un expert-comptable chargé de suivre ce dossier et que de nombreux rapports avaient été adressés au Tribunal ; que la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions, en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, d'autre part, qu'il résultait des motifs mêmes de l'arrêt que, suite à la modification des propositions du repreneur, l'administrateur avait informé le Tribunal de la situation, lequel a proposé le séquestre des titres américains offerts en garantie ; que la cour d'appel a entaché sa décision d'une contradiction de motifs, en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; et alors, enfin, que l'administrateur faisait valoir, dans son assignation en intervention du 10 avril 1995, qu'il ressortait du procès-verbal d'audition du président du tribunal de commerce devant le juge d'instruction que le président s'était adressé au procureur de la République pour qu'il fasse faire une enquête par les Renseignements généraux concernant le repreneur et que les renseignements obtenus par cet organisme étaient bons et conformes à ceux qu'il avait obtenus lui-même ; que, dès lors, les moyens d'investigation les plus poussés avaient été mis en oeuvre pour vérifier la solvabilité du repreneur ; qu'en ne prenant pas en compte cette information de laquelle il résultait qu'une enquête plus approfondie aurait conduit à la même conclusion, la cour d'appel a entaché sa décision d'un défaut de réponse à conclusions, en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, d'une part, que l'arrêt retient que l'administrateur s'est abstenu d'informer le tribunal de commerce de la situation très compromise de la société, bien qu'il ait eu connaissance, par l'expert-comptable de la société, de l'aggravation rapide de la perte d'exploitation ; qu'ainsi, la cour d'appel a répondu aux conclusions invoquées ;

Attendu, d'autre part, que la cour d'appel ne s'est pas contredite en énonçant, d'un côté, qu'aucune pièce n'a été versée aux débats établissant qu'entre le 31 août 1989, date de l'assemblée générale au cours de laquelle le repreneur a modifié son offre initiale, et le 17 octobre 1989, l'administrateur a procédé à des diligences pour s'assurer du sérieux de l'offre ou a rédigé un nouveau rapport à l'intention du Tribunal, qui est resté saisi de son avis favorable contenu au rappport du 22 août 1989 et, de l'autre, que l'administrateur, constatant la disparition de la seule sûreté offerte par le repreneur qu'il avait lui-même exigée dans son rapport du 22 août 1989, s'est borné à inviter le Tribunal à prendre d'autres garanties qui se sont limitées au séquestre de titres de sociétés américaines ;

Attendu, enfin, que la cour d'appel n'était pas tenue de se prononcer sur l'enquête effectuée par les Renseignements généraux à la demande du procureur de la République dont l'administrateur a fait état, dans son assignation en intervention forcée, pour mettre en cause la responsabilité du procureur de la République et des services de police puisque l'appel en intervention forcée a été déclaré irrecevable ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Et sur le moyen unique, pris en ses deux dernières branches :

Attendu que l'administrateur fait encore le même reproche à l'arrêt, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en retenant la responsabilité de l'administrateur sans caractériser le lien de causalité entre l'adoption du plan du repreneur sous l'identité de M. B... et l'escroquerie subséquente de ce dernier qui n'en découlait pas nécessairement, la cour d'appel a violé les articles 1382 et 1383 du Code civil ; et alors, d'autre part, qu'en retenant la responsabilité de l'administrateur alors que l'adoption du plan de redressement confiant les responsabilités de direction de la société à M.
B...
relevait de la seule compétence du tribunal de commerce, la cour d'appel a violé l'article 61 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu que la compétence exercée par le Tribunal qui arrête le plan de redressement ne dégage pas l'administrateur de la responsabilité qu'il encourt sur le fondement de l'article 1382 du Code civil ; que l'arrêt retient que l'administrateur n'a pas correctement informé le Tribunal, qu'il a proposé un plan de redressement sans s'être suffisamment renseigné sur la personnalité du repreneur et avoir vérifié la valeur des garanties offertes, qu'il a invité les fournisseurs à continuer à traiter avec la société, que ces fautes sont à l'origine de l'adoption du plan de redressement par le Tribunal et du préjudice subi par les fournisseurs amenés à traiter en confiance avec une personne qui n'aurait pas dû être placée à la tête de la société, tandis que, loin de commercer loyalement avec les fournisseurs, elle avait pour seule idée de les gruger ; qu'en l'état de ces constatations et appréciations, qui ont permis de caractériser les négligences et imprudences commises par l'administrateur et leur lien de causalité avec le préjudice à réparer, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. H... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne M. H... à payer à titre personnel à l'agent judiciaire du Trésor la somme de 5 000 francs, à M. Y... la somme de 5 000 francs, à l'EURL Vauche la somme de 5 000 francs, aux sociétés Compagnie Rhodanienne d'impression et de cartonnage, Rochette Cempa Ondule, Chartier Chapus, Bugey salaisons, France viandes, Centre viandes, Société civile coopérative, Etablissements Robert X..., Etablissements Marcel G..., sociétés Meledo, Delanchy "Frigo transports 86", Merle et MG Siac la somme de 10 000 francs, aux sociétés Société coopérative agricole, Etablissements Daniel A..., La I... Ani Vi 52, Meyer SA et Meyer SARL, Etablissements Jean E..., Etablissements Alain D..., Kugel frères, Tra de Via, Mag, Gallais et Socobeval la somme de 10 000 francs ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du onze mai mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 96-11947
Date de la décision : 11/05/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Analyses

ENTREPRISE EN DIFFICULTE (loi du 25 janvier 1985) - Redressement judiciaire - Administrateur judiciaire - Responsabilité - Propositions imprudente d'un plan de redressement.


Références :

Code civil 1382
Loi 85-98 du 25 janvier 1985 art. 61

Décision attaquée : Cour d'appel de Bourges (1re Chambre), 20 décembre 1995


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 11 mai. 1999, pourvoi n°96-11947


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BEZARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:96.11947
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