Sur le moyen unique, pris en sa première branche :
Vu l'article 1382 du Code civil ;
Attendu que, par un acte sous seing privé du 24 mars 1990, établi en l'étude de M. X..., notaire, les consorts Raudin ont consenti aux époux Laurence la cession de la totalité des parts d'une société d'exploitation d'un bar ; qu'il était stipulé que le prix de cession serait payé comptant le jour de la signature de l'acte authentique, la réalisation de la cession étant subordonnée à l'obtention d'un prêt par les cessionnaires ; que l'acte authentique a été établi le 15 juin 1990 par ce notaire, bien que les époux Laurence ne fussent pas en mesure d'acquitter immédiatement la totalité du prix, dont le versement a été reporté au 22 juin suivant ; que, les époux Laurence ayant été condamnés au paiement par un jugement du 28 octobre 1990, les consorts Raudin, faisant valoir que ces débiteurs étaient insolvables, et estimant que le notaire avait commis une faute professionnelle à l'origine de leur préjudice, en ont demandé la réparation à celui-ci et à son assureur, les Assurances mutuelles du Mans ;
Attendu que, pour débouter les consorts Raudin de leur demande, l'arrêt, après avoir constaté le manquement du notaire à son devoir de conseil, énonce que le demandeur ne peut obtenir réparation de son préjudice de la part du notaire sans avoir au préalable épuisé toutes les possibilités de contraindre son cocontractant à l'exécution de ses obligations, qu'il n'était justifié d'aucun acte d'exécution à l'encontre des époux Laurence dont il n'était pas allégué qu'ils se fussent vu étendre la procédure collective de la société, dont les parts avaient été cédées et que si les consorts Raudin avaient tenté de recouvrer leur créance à l'égard des cessionnaires de parts dans le cadre de la procédure collective de la société, il était patent que cette tentative était vouée à l'échec, de telle sorte que le préjudice n'était pas actuel et certain ;
Attendu qu'en se déterminant ainsi, sans rechercher, comme il lui était demandé, si l'exercice de voies d'exécution n'aurait pas été de toute façon inutile compte tenu de l'absence totale de ressources des débiteurs, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision au regard du texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il soit besoin de statuer sur la seconde branche du moyen :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a retenu l'existence d'une faute professionnelle du notaire commise à l'occasion de la signature de l'acte authentique, l'arrêt rendu le 6 novembre 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy.