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30/03/1999 | FRANCE | N°96-15070;96-15506

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 30 mars 1999, 96-15070 et suivant


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

I. Sur le pourvoi n° P 96-15.070 formé par l'Association développement recherche appliquée aux industries alimentaires (ADRIA), dont le siège est ...Université, ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 6 février 1996 par la cour d'appel d'Angers (1re chambre, section A), au profit :

1 / des Mutuelles générales d'assurances (MGA), dont le siège est ...,

2 / de la société Celes, société anonyme, dont le siège est ...,

3 /

de la société Rebours, société anonyme, dont le siège est 2, rue au Prévot, ...,

4 / de la compagn...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

I. Sur le pourvoi n° P 96-15.070 formé par l'Association développement recherche appliquée aux industries alimentaires (ADRIA), dont le siège est ...Université, ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 6 février 1996 par la cour d'appel d'Angers (1re chambre, section A), au profit :

1 / des Mutuelles générales d'assurances (MGA), dont le siège est ...,

2 / de la société Celes, société anonyme, dont le siège est ...,

3 / de la société Rebours, société anonyme, dont le siège est 2, rue au Prévot, ...,

4 / de la compagnie Uni Europe, dont le siège est ...,

5 / de M. Y..., ès qualités de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société à responsabilité limitée Sipa, domicilié ...,

6 / de la société Pari, société anonyme, dont le siège est 18, avenue du Bois Préau, 92500 Rueil-Malmaison,

7 / de la société Cables Pirelli, société anonyme, dont le siège est ...,

8 / du service national Electricité de France (EDF), dont le siège est ...,

9 / de la société Le Continent, société anonyme, dont le siège est ..., prise en la personne de son agent, le Cabinet Verlingue, domicilié 3, Venelle de Kergos, 29000 Quimper,

10 / de la société Hema, société anonyme, dont le siège est ...,

11 / de la société Soca, dont le siège est ...,

défendeurs à la cassation ;

II. Sur le pourvoi n° N 96-15.506 formé par la société Celes,

en cassation du même arrêt rendu au profit :

1 / de la société Rebours,

2 / de l'ADRIA,

3 / des Mutuelles générales d'assurances,

4 / de la compagnie Uni Europe,

5 / de M. Y..., ès qualités,

6 / de la société Pari,

7 / de la société Cables Pirelli,

8 / d'Electricité de France,

9 / de la compagnie Le Continent,

10 / de la société Hema,

11 / de la société Soca,

défendeurs à la cassation ;

III. Sur le pourvoi n° M 97-16.567 formé par l'Association développement recherche appliquée aux industries alimentaires,

en cassation d'un arrêt rendu le 11 février 1997 par la cour d'appel d'Angers (1re chambre, section A), au profit :

1 / de la société Rebours,

2 / de la compagnie Uni Europe,

3 / des Mutuelles générales assurances,

4 / de la société Celes,

5 / de la société Pari,

6 / de la société Les Cables Pirelli,

7 / d'Electricité de France,

8 / de la compagnie d'assurance Le Continent,

9 / de la société Hema,

10 / de la société Soca,

11 / de M. Y..., ès qualités,

défendeurs à la cassation ;

Pourvoi n° P 96-15.070 :

La société Pari, défenderesse au pourvoi principal n° P 96-15.070, a formé un pourvoi provoqué contre le même arrêt ;

La société Hema, défenderesse au pourvoi principal n° P 96-15.070 a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;

La demanderesse au pourvoi principal n° P 96-15.070 invoque, à l'appui de son recours, les quatre moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

La demanderesse au pourvoi provoqué invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Pourvoi n° N 96-15.506 :

La demanderesse au pourvoi n° N 96-15.506 invoque, à l'appui de son recours, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

Pourvoi n° M 97-16.567 :

La société Hema, défenderesse au pourvoi principal n° M 97-16.567, a formé un pourvoi incident contre le même arrêt ;

La demanderesse au pourvoi principal n° M 97-16.567 invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation et d'annulation annexés au présent arrêt ;

La demanderesse au pourvoi incident invoque, à l'appui de son recours, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 16 février 1999, où étaient présents : M. Bézard, président, Mme Vigneron, conseiller rapporteur, MM. Grimaldi, Tricot, Mme Aubert, M. Armand-Prevost, Mmes Tric, Besançon, conseillers, Mme Geerssen, M. Rémery, conseillers référendaires, M. Jobard, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Vigneron, conseiller, les observations de Me Balat, avocat de l'ADRIA, de Me Le Prado, avocat de la société Celes, de la SCP Boré et Xavier, avocat des Mutuelles générales d'assurances, de Me Blondel, avocat de la société Rebours, de la SCP Vier et Barthélémy, avocat de la compagnie Uni Europe, de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de M. Y..., ès qualités, de la SCP Coutard et Mayer, avocat de la société Pari, de la SCP Defrenois et Levis, avocat du service national Electricité de France, de Me Hémery, avocat de la société Le Continent, de la SCP Gatineau, avocat de la société Hema, de Me Bertrand, avocat de la société Soca et de MM. X... et Belat, ès qualités, les conclusions de M. Jobard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu leur connexité, joint les pourvois n° U 96-15.506, P 96-15.070 et M 97-16567 ;

Donne acte à l'Association développement recherche appliquée aux industries alimentaires de ce qu'elle s'est désistée de ses pourvois en tant que dirigé contre la société Cables Pirelli, le Service national Electricité de France et la société Soca ;

Attendu, selon les arrêts attaqués (Angers, 6 février 1996 et 11 février 1997) que la société Rebours a confié à l'Association développement recherche appliquée aux industries alimentaires (ADRIA) une étude de faisabilité relative à la fabrication industrielle d'omelettes précuites puis a chargé la société Sipa de la réalisation d'une chaîne de fabrication de ce produit ; que la société Sipa a sous-traité la plate-forme de mélange à la société Pari, la doseuse à la société Hema et le chauffage par induction à la société Celes ; que la société Rebours, se plaignant du fonctionnement défectueux du matériel, a obtenu, en référé, la désignation d'un expert puis a assigné en réparation de son préjudice M. Y... pris en qualité de liquidateur de la société Sipa, les compagnies Le Continent et Mutuelle générale d'assurances, assureurs de cette société, l'ADRIA, ainsi que les sociétés Pari, Hema et Celes ; que la société Uni Europe, assureur de l'ADRIA, est intervenue à l'instance ;

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par l'ADRIA que sur le pourvoi provoqué de la société Pari et sur le pourvoi incident de la société Hema, contre l'arrêt du 6 février 1996 :

Sur les quatre moyens du pourvoi de l'ADRIA, pris en ses diverses branches, réunis :

Attendu que l'ADRIA reproche à l'arrêt de l'avoir déclarée responsable des désordres affectant la doseuse, la plate-forme de mélange et les tunnels de refroidissement et, en conséquence, de l'avoir condamnée à indemniser la société Rebours du coût de reprise de ces désordres, alors, selon le pourvoi, de première part, que l'ADRIA a expressément fait valoir dans ses conclusions d'appel que le choix des matériels et des intervenants dans la fabrication de la chaîne avait été opéré par la société Rebours avant le devis du 25 mai 1988, en sorte qu'elle ne pouvait avoir eu aucun rôle à ce titre ; que la cour d'appel ne pouvait donc retenir la responsabilité de l'ADRIA au titre de sa collaboration technique résidant notamment dans le choix des matériels et résultant du devis du 25 mai 1988, sans répondre à ces conclusions, en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, de deuxième part, qu'après avoir relevé que l'assistance technique de l'ADRIA devait s'entendre au sens de la seule technique alimentaire, la cour d'appel ne pouvait, sans dénaturer les termes et la portée du devis du 25 mai 1988, retenir la responsabilité de l'ADRIA, faute pour cette dernière d'avoir fourni les informations sur les incidences des caractéristiques du produit sur le fonctionnement des machines, difficultés qui ne relevaient pas du domaine strictement alimentaire auquel la mission de l'ADRIA était cantonnée ; que la cour d'appel a ainsi violé l'article 1134 du Code civil ; alors, de troisième part, que le prestataire du service n'est débiteur d'une obligation de conseil qu'à l'égard de son cocontractant, le maître de l'ouvrage ; que la cour d'appel ne pouvait donc retenir la responsabilité de

l'ADRIA au titre des désordres affectant la doseuse en retenant qu'elle avait manqué à son obligation de conseil à l'égard de la société Sipa, maître d'oeuvre, celle-ci ne pouvant en être créancière comme tiers à la convention conclue entre l'ADRIA et la société Rebours, maître de l'ouvrage ; que la cour d'appel a ainsi violé les articles 1134 et 1165 du Code civil ; alors, de quatrième part, qu'en tout état de cause, le maître de l'ouvrage, bénéficiaire de la prestation, est tenu, à l'égard de ses débiteurs, d'une obligation de collaboration ; qu'après avoir expressément relevé que la société Rebours, maître de l'ouvrage, n'avait pas suffisamment attiré l'attention de ses partenaires, en ce compris l'ADRIA, sur la nature exacte du produit et les éléments de la chaîne, ce dont il résultait qu'elle était en mesure de dispenser les indications sur la viscosité de la "coule", le lavage et l'inadaptation du doseur volumétrique au dosage des poids, la cour d'appel en estimant néanmoins que ces omissions devaient être imputées à faute à l'ADRIA sans retenir aucune part de responsabilité au maître de l'ouvrage, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé les articles 1134, alinéa 2, et 1147 du Code civil ;

alors, de cinquième part, qu'en tout état de cause encore, le maître de l'ouvrage qui accepte délibérément un risque en réalisant un ouvrage reposant sur une conception technique ni éprouvée ni avérée, est partiellement responsable des désordres survenus dans l'ouvrage ;

qu'après avoir admis que la chaîne destinée à fabriquer des omelettes précuites constituait un procédé entièrement nouveau, et constaté que le maître de l'ouvrage avait sciemment éludé l'indispensable phase intermédiaire d'expérimentation entre le prototype pilote de la chaîne et la production à l'échelle industrielle, la cour d'appel ne pouvait condamner la société ADRIA notamment à supporter le coût de la réfection de la chaîne défectueuse, sans rechercher si la société Rebours, maître de l'ouvrage, n'était pas partiellement responsable des désordres en raison de son inconscience ; qu'elle a ainsi privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ; alors, de sixième part, qu'après avoir expressément reconnu d'abord que l'assistance technique de l'ADRIA s'entendait uniquement de la technique alimentaire à l'exclusion de la technique de fabrication, puis relevé ensuite que les désordres affectant la plate-forme de mélange étaient des défaillances d'ordre purement technique, dès lors que les défaillances résultaient du mauvais fonctionnement des éléments fournis par la société Pari, ce dont il résultait que l'ADRIA ne pouvait avoir aucune responsabilité dans les dysfonctionnements présentés par cet élément de la chaîne, la cour d'appel, en déclarant l'ADRIA pour partie responsable des désordres affectant la plate-forme de mélange, n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a ainsi violé l'article 1147 du Code civil ;

alors, de septième part, qu'au nombre des désordres successivement constatés par l'expert et la cour d'appel, aucun problème de sanitation n'a été relevé concernant la plate-forme de mélange ; qu'en estimant néanmoins que l'ADRIA était en partie responsable des défauts présentés par la plate-forme de mélange en retenant qu'elle n'avait pas suffisamment tenu compte des contraintes de sanitation concernant cet élément de la chaîne, la cour d'appel a dénaturé les termes du rapport d'expertise et a ainsi violé l'article 1134 du Code civil ; alors, de huitième part, qu'en statuant ainsi par un motif totalement inopérant, la cour d'appel n'a pas légalement justifié sa décision et a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ; et alors, enfin, que l'objet du litige est déterminé par les prétentions respectives des parties ;

que la société Rebours n'avait demandé réparation, au titre des désordres affectant la mise en barquettes automatique, qu'à la société Sipa ; qu'en liant le sort des défaillances de la mise en barquettes automatique à celles affectant les tunnels de refroidissement, cependant qu'aucune demande n'était formée à l'encontre de l'ADRIA concernant la mise en barquettes automatique, la cour d'appel a méconnu les termes du litige en violation de l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, que l'arrêt relève, hors toute dénaturation, que le 17 juillet 1987, l'ADRIA a réalisé une étude relative à la conception de la chaîne de fabrication, en collaboration avec la société Sipa, que le 21 avril 1988, la société Rebours a accepté le devis de cette société portant sur la réalisation de la chaîne et que, dans son devis du 25 mai 1988, l'ADRIA s'est engagée, envers la société Rebours, à apporter sa collaboration technique dans le choix des matériaux à la société Sipa ; qu'en l'état de ces constatations, d'où il résulte que l'ADRIA avait déjà conseillé la société Sipa dans le choix des matériaux lorsque le 25 mai 1988 elle a établi son devis relatif à cette prestation, la cour d'appel a répondu, en les écartant, aux conclusions invoquées ;

Attendu, en second lieu, que, se fondant sur le devis de l'ADRIA ainsi que sur le rapport d'expertise, l'arrêt retient, hors toute dénaturation, que la plate-forme de mélange, la doseuse et les tunnels de refroidissement de la chaîne de fabrication présentent des désordres en raison de vices de conception ; qu'il retient encore que ces défauts sont imputables, en partie, à l'ADRIA qui, dans son étude, n'a pas pris en compte les contraintes sanitaires et de nuisance des appareils ainsi que le caractère très particulier du produit à travailler et qui a manqué à son devoir de conseil envers la société Sipa, maître d'oeuvre ;

Attendu, en troisième lieu, que la cour d'appel, qui a procédé aux recherches prétendument omises, a retenu que la société Rebours avait commis l'erreur de rechercher le maximum d'économie en faisant procéder à des essais non coordonnés des éléments de la chaîne au lieu de faire réaliser une chaîne pilote de l'ensemble de l'installation et en a déduit que cette société ne pouvait reprocher à l'ADRIA le défaut de rentabilité immédiate de cette chaîne et lui réclamer son manque à gagner ainsi que son surcoût en matière première et en personnel résultant du retard d'exploitation, faisant ainsi ressortir que dans ses rapports avec l'ADRIA, la société Rebours était responsable de son préjudice financier ;

Attendu, enfin, que l'arrêt ne prononce contre l'ADRIA aucune condamnation pour les désordres affectant la mise en barquettes automatiques ;

D'où il suit que la cour d'appel a légalement justifié sa décision et que le moyen, qui manque en fait en ses quatrième et neuvième branches, est mal fondé pour le surplus ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches, du pourvoi provoqué de la société Pari :

Attendu que, de son côté, la société Pari reproche à l'arrêt de l'avoir déclarée responsable, in solidum, avec l'ADRIA et la compagnie Uni Europe, des désordres affectant la plate-forme de mélange, alors, selon le pourvoi, d'une part, que la responsabilité d'un sous-traitant ne peut être engagée sur le fondement délictuel par un maître d'ouvrage non lié contractuellement avec lui que pour faute caractérisée ; que l'expert avait observé qu'il pouvait supposer que la société Pari avait connaissance ou devait s'informer des contraintes spécifiques liées à l'application originale de sa plate-forme de mélange ; qu'en se fondant dès lors exclusivement sur cette supposition pour prononcer une condamnation à l'encontre de la société Pari au profit de la société maître d'ouvrage, la cour d'appel, par ce motif dubitatif, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; alors, d'autre part, que dans ses conclusions d'appel, la société Pari avait souligné s'agissant du niveau sonore de l'injecteur que la société Rebours avait choisi personnellement un matériau sonore ; qu'en s'abstenant dès lors de répondre à ce moyen pertinent tiré de l'immixtion de la société maître d'ouvrage dans le choix du matériau dont le caractère sonore lui était reproché et de nature à limiter ou exclure sa responsabilité, la cour d'appel n'a pas satisfait aux exigences de motivation posées par l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; et alors, enfin, que dans ses écritures d'appel, la société Pari avait mis en exergue l'absence de préjudice de production subi

par la société maître d'ouvrage du fait des manquements reprochés ; qu'en s'abstenant de répondre à ce moyen péremptoire tiré de l'inexistence de tout préjudice de nature à mettre obstacle à la mise en jeu de sa responsabilité délictuelle, la cour d'appel, a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, d'une part, que l'arrêt retient, par des motifs dépourvus de tout caractère dubitatif, que les dysfonctionnements du régulateur de niveau et de l'IMR de la plate-forme de mélange sont dus à un défaut de conception et que celui-ci est, en partie, imputable à la société Pari qui a manqué à son obligation de conseil ;

Attendu d'autre part, qu'en relevant que la société Rebours avait chargé la société Sipa de la réalisation de chaîne de fabrication et que celle-ci avait commandé la plate-forme de mélange à la société Pari, la cour d'appel a fait ressortir que la société Rebours ne s'était pas immiscée dans le choix du matériel et a ainsi répondu, en les écartant, aux conclusions invoquées ;

Attendu, enfin, que loin de soutenir que la société Rebours n'avait pas subi de préjudice en raison des malfaçons de la plate-forme de mélange, la société Pari s'est bornée à prétendre, dans ses conclusions, que la société Rebours n'avait pas subi de préjudice de production ;

D'où il suit que le moyen qui manque en fait en sa troisième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

Sur le second moyen du même pourvoi :

Attendu que la société Pari reproche encore à l'arrêt d'avoir fixé à 25 % sa part de responsabilité dans la survenance des désordres affectant la plate-forme de mélange, alors selon le pourvoi, que le jugement avait relevé pour limiter la responsabilité de la société Pari dans une proportion de 3 % que l'expert avait suggéré cette limitation en raison de la configuration satisfaisante de la plate-forme de mélange ; qu'en portant dès lors, sans aucune justification spécifique dûment circonstancié, à 25 % la part de responsabilité de la société Pari, la cour d'appel, qui était pourtant tenue de réfuter le jugement par une motivation spéciale, n'a pas satisfait à l'exigence de motivation de sa décision en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que la cour d'appel a apprécié souverainement le partage de responsabilité entre les co-auteurs des désordres ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le moyen unique, pris en ses trois branches, du pourvoi incident de la société Hema :

Attendu que la société Hema reproche à l'arrêt de l'avoir déclarée responsable, in solidum avec les sociétés Sipa et l'ADRIA, des désordres affectant la doseuse, de l'avoir condamnée à indemniser la société Rebours du coût de reprise de ces désordres à hauteur de 20 % et de l'avoir condamnée à verser une provision de 500 000 francs, alors, selon le pourvoi, d'une part, que, dans ses conclusions d'appel, la société Hema faisait valoir que le mauvais fonctionnement du dispositif coupe-gouttes provenait essentiellement des variations de viscosité constatées dans la qualité du produit ; qu'elle en déduisait que sa responsabilité ne pouvait être engagée du fait du coupe-gouttes alors que le premier juge a considéré qu'elle ne pouvait être responsable de la viscosité irrégulière de la "coule" ; qu'en ne répondant pas à ce moyen de nature à établir l'absence de responsabilité de la société Hema y compris pour la défaillance du système coupe-goutte, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; alors, d'autre part, que l'auteur d'une faute ne peut être condamné à réparer que le seul dommage qu'il a occasionné ; qu'en l'espèce, la cour d'appel a constaté que la société Hema était seulement responsable de l'inefficacité du coupe-gouttes laquelle n'avait pour conséquence que de simples éclaboussures intempestives sans effet sur le fonctionnement de la chaîne ; qu'en condamnant la société Hema à réparer le coût des désordres affectant la doseuse à concurrence de 20 %, sans expliquer le lien de causalité entre la faute et le dommage, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; et alors, enfin, qu'en déchargeant la société Rebours de toute responsabilité de son propre dommage, nonobstant les nombreux griefs retenus à l'encontre de cette entreprise dont l'arrêt attaqué a relevé la qualification, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations et a violé l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que, se fondant sur le rapport d'expertise et répondant aux conclusions invoquées, l'arrêt retient que le dysfonctionnement de la doseuse est dû à des difficultés d'indexation, à une viscosité du produit qui est mal maîtrisé et à une inadaptation du coupe-gouttes ; qu'il retient, encore, que seule l'inadaptation du coupe-gouttes est imputable à la société Hema ; qu'en l'état de ces appréciations, qui établissent le lien de causalité entre la faute de la société Hema et le dommage, la cour d'appel, qui a mis à la charge de la société Hema la réparation d'une partie de ce dommage, a légalement justifié sa décision ;

Attendu, en second lieu, que la cour d'appel ayant retenu que la société Rebours ne pouvait réclamer à la société Hema l'indemnisation de son manque à gagner et de son coût en matière première et en personnel du fait des retards d'exploitation de la chaîne, a ainsi fait ressortir que dans ses rapports avec la société Hema, la société Rebours devait supporter son préjudice financier ;

D'où il suit que le moyen, qui manque en fait en sa troisième branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

Sur le premier moyen, pris en ses deux branches, du pourvoi principal de la société Celes :

Attendu que la société Celes reproche à l'arrêt de l'avoir déclarée responsable in solidum avec la société Sipa des désordres affectant le tunnel de cuisson, de l'avoir condamnée à indemniser la société Rebours du coût de reprise de ces désordres et à lui payer à titre provisionnel la somme de 2 000 000 francs et d'avoir fixé à 60 % sa part de responsabilité, et pour 40 % à la société Sipa, alors, selon le pourvoi, d'une part, que le sous-traitant, tenu seulement de la fourniture d'un élément d'équipement qu'il a livré conforme à la commande passée, ne peut se voir attribuer la responsabilité du dysfonctionnement de l'ensemble dans lequel cet élément d'équipement a été intégré et dont il ignorait les caractéristiques techniques ; qu'en l'état des conclusions précises de la société Celes, dont il résultait qu'elle avait seulement fourni à la société Sipa les éléments d'un matériel de chauffage conforme à la commande de celle-ci, la cour d'appel, qui a constaté par ailleurs l'absence de cahier des charges précis quant à la réalisation d'un tunnel de cuisson, ne pouvait affirmer, sans analyser davantage les documents de la cause, que la société Celes avait fourni une "installation de chauffage" et "participé à la conception du tunnel de cuisson" défectueux ; qu'en l'état de cette insuffisance de motivation, la cour d'appel n'a pas caractérisé la faute quasi délictuelle qu'aurait commise la société Sipa à l'égard du maître de l'ouvrage et a privé sa décision de toute base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; et alors, d'autre part, qu'elle a ainsi dénaturé les termes stricts de la "commande de matériel" passée et violé l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, que, se fondant sur le rapport d'expertise, l'arrêt retient que le chauffage par induction du tunnel de cuisson présente un cablage défectueux, une inadaptation de la conception des équipements du four à l'humidité, au lavage à haute pression et aux interventions de nettoyage, avec risques graves de chocs électriques, ainsi qu'une sélectivité insuffisante et une régulation défectueuse de l'eau de refroidissement des inducteurs, des coffrets d'adaptation et des générateurs ; qu'en l'état de ces appréciations qui établissent les malfaçons imputables à la société Celes, la cour d'appel a légalement justifié sa décision ;

Attendu, d'autre part, que la société Celes n'ayant pas produit son télex du 25 mars 1988 auquel la société Sipa s'était référée, exclusivement, pour lui commander le matériel litigieux, la Cour de Cassation n'est pas en mesure d'exercer son contrôle ;

D'où il suit que le moyen qui est irrecevable en sa seconde branche, n'est pas fondé pour le surplus ;

Sur le second moyen, pris en ses deux branches du même pourvoi :

Attendu que la société Celes reproche encore à l'arrêt d'avoir dit que la société Rebours, maître de l'ouvrage, doit être indemnisée de l'ensemble des désordres, en déchargeant cette dernière de toute responsabilité propre, d'avoir ordonné un complément d'expertise aux fins de fournir tous les éléments permettant de chiffrer les surcoûts en matières premières et en personnel engendrés par les dysfonctionnements de la chaîne ainsi que le manque à gagner par rapport aux objectifs et délais de rendement acceptés par la société Sipa et d'avoir condamné la société Celes à payer à la société Rebours la somme de 2 000 000 de francs à valoir sur ce préjudice, alors, selon le pourvoi, d'une part, que la cour d'appel ne pouvait, sans contradiction, relever dans ses motifs que la société Rebours ne pouvait prétendre être indemnisée des surcoûts en matières premières et en personnel ni du manque à gagner par rapport aux objectifs fixés et ordonner dans son dispositif un complément d'expertise pour chiffrer lesdits chefs de préjudice et condamner la société Celes au paiement d'une provision de 2 000 000 de francs ; qu'à cet égard, l'arrêt est entaché d'une violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ; et alors, d'autre part, qu'en déchargeant la société Rebours de toute responsabilité de son propre dommage, nonobstant les nombreux griefs retenus à l'encontre de cette entreprise dont l'arrêt a relevé la qualification, la cour d'appel, qui n'a pas tiré les conséquences légales de ses constatations, a violé l'article 1382 du Code civil ;

Mais attendu que c'est sans contradiction que la cour d'appel, après avoir retenu, dans ses motifs, que la société Rebours ne pouvait réclamer aux sous-traitants son manque à gagner ainsi que le surcoût en matières premières et en personnel résultant des retards dans la mise en exploitation industrielle de la chaîne de fabrication, a condamné, dans son dispositif, la société Celes à indemniser la société Rebours du seul coût de reprise des désordres affectant le tunnel de cuisson et à lui payer une provision de 2 000 000 de francs, faisant ainsi ressortir que, dans ses rapports avec la société Celes, sous-traitant, la société Rebours devait supporter son préjudice financier ; que le moyen, qui manque en fait en sa seconde branche, est mal fondé pour le surplus ;

Statuant tant sur le pourvoi principal formé par l'ADRIA que sur le pourvoi incident de la société Hema, contre l'arrêt du 11 février 1992 :

Sur le moyen unique, pris en ses deux branches, du pourvoi de l'ADRIA et sur le moyen unique, pris en ses trois branches, du pourvoi de la société Hema, qui ont le même objet :

Attendu que l'ADRIA et la société Hema reprochent à l'arrêt d'avoir rejeté la requête complétive et en interprétation du précédent arrêt du 6 février 1996 présentée par l'ADRIA et à laquelle s'était jointe la société Hema, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'en décidant de déclarer la société Sipa responsable des conséquences de l'ensemble des dysfonctionnements atteignant la chaîne, comprenant les coûts de reprise et le préjudice subi du fait des manques à gagner par rapport aux prévisions contractuelles et, d'autre part, de réserver les autres demandes des parties, la cour d'appel, qui n'a pas exclu que d'autres parties que la société Sipa puissent être déclarées responsables du manque à gagner subi par la société Rebours du fait des retards dans la mise en exploitation industrielle de la chaîne et du surcoût en matières premières et en personnel résultant de ce retard, n'avait pas complètement statué sur les responsabilités ; qu'en jugeant autrement pour rejeter les requêtes de l'ADRIA et de la société Hema, la cour d'appel a violé l'article 463 du nouveau Code de procédure civile ; et alors, d'autre part, que constitue une omission de statuer toute omission du juge de mentionner dans le dispositif du jugement la décision prise dans les motifs ; qu'en l'espèce, dans les motifs de son arrêt du 6 février 1996, la cour d'appel a expressément affirmé que l'ADRIA, comme les sous-traitants dont la société Hema, ne pouvaient pas se voir imputer la moindre responsabilité dans le défaut de rentabilité immédiate de la chaîne industrielle dans le manque à gagner qu'elle a subi du fait des retards dans la mise en exploitation industrielle ni dans le surcoût en matières premières et en personnel qui en est découlé ; que cette exclusion de tout droit à réparation de la société Rebours n'a pas été expressément mentionnée dans le dispositif de l'arrêt ce qui constituait incontestablement une omission de statuer ; qu'en affirmant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 463 du nouveau Code de procédure civile ;

et alors, enfin, qu'après avoir estimé qu'elle avait, par sa première décision, statué de manière expresse sur la responsabilité, la cour d'appel ne pouvait en tout état de cause écarter les requêtes litigieuses tendant à ce qu'elle interprète cette dernière décision en retenant que ces requêtes tendaient à ce qu'elle ajoute au dispositif de l'arrêt du 6 février 1996 en précisant les parties devant être tenues d'indemniser la société Rebours des manques à gagner et des surcoûts ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé l'article 461 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu que, saisie par la société Rebours d'une demande en réparation de différents chefs de préjudice résultant du fonctionnement défectueux de la chaîne de fabrication, la cour d'appel a, dans le dispositif de son précédent arrêt du 6 février 1996, déterminé le préjudice de cette société imputable tant à l'ADRIA qu'à la société Hema ;

que c'est donc à bon droit que la cour d'appel a retenu qu'elle avait statué de manière expresse sur les responsabilités et qu'il n'y avait pas lieu à compléter son précédent arrêt ou à l'interpréter ; que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois principaux et incidents ;

Condamne l'Association développement recherche appliquée aux industries alimentaires (ADRIA) et les sociétés Celes, Pari et Hema aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes de la compagnie les Mutuelles générales d'assurances, la société Pari, la société Rebours, Electricité de France, la société Uni Europe et la société Cables Pirelli ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du trente mars mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf..


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 96-15070;96-15506
Date de la décision : 30/03/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel d'Angers (1re chambre, section A) 1996-02-06 1997-02-11


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 30 mar. 1999, pourvoi n°96-15070;96-15506


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BEZARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:96.15070
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