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03/03/1999 | FRANCE | N°97-13960

France | France, Cour de cassation, Chambre civile 3, 03 mars 1999, 97-13960


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

I - Sur le pourvoi n° C 97-13.960 formé par la compagnie Aig Europe, société anonyme, dont le siège est ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 5 février 1997 par la cour d'appel de Reims (chambre civile, 1re section) au profit :

1 / de la société Synthèse, société anonyme, dont le siège est 18, rue ...,

2 / de M. Jean-François Y..., demeurant ..., pris en sa qualité de représentant des créanciers au redressement judiciaire de la SA Synthèse,r>
3 / de M. D... Contant, demeurant ..., pris en sa qualité d'administrateur au redressement judic...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, TROISIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :

I - Sur le pourvoi n° C 97-13.960 formé par la compagnie Aig Europe, société anonyme, dont le siège est ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 5 février 1997 par la cour d'appel de Reims (chambre civile, 1re section) au profit :

1 / de la société Synthèse, société anonyme, dont le siège est 18, rue ...,

2 / de M. Jean-François Y..., demeurant ..., pris en sa qualité de représentant des créanciers au redressement judiciaire de la SA Synthèse,

3 / de M. D... Contant, demeurant ..., pris en sa qualité d'administrateur au redressement judiciaire de la SA Synthèse,

4 / de la Mutuelle des architectes français (MAF), dont le siège est ...,

5 / de la Coopérative vinicole de Rilly la Montagne, dont le siège est rue Porte des Champs, 51500 Rilly la Montagne,

6 / de la société Poly Industries, dont le siège est ... la Montagne,

7 / de M. E..., administrateur judiciaire, demeurant ..., pris en sa qualité de commissaire à l'exécution du plan de cession de la SA Poly Industries,

8 / de M. Z..., demeurant ..., pris en sa qualité de représentant des créanciers au redressement judiciaire de la SA Poly Industries,

9 / de la société Poly Champagne, dont le siège est 24 bis, voie Chantereine, 51520 Récy,

10 / de M. B... Paniez, demeurant ...,

11 / de M. Bernard X..., demeurant ...,

12 / de M. Michel A..., demeurant ...,

défendeurs à la cassation ;

II - Sur le pourvoi n° Q 97-15.236 formé par la Coopérative vinicole de Rilly la Montagne,

en cassation du même arrêt au profit :

1 / de la société Synthèse, société anonyme,

2 / de la Mutuelle des architectes français (MAF),

3 / de M. Jean-François Y..., ès qualités,

4 / de M. D... Contant, ès qualités,

5 / de la société Poly Industries,

6 / de M. E..., ès qualités,

7 / de M. Z..., ès qualités,

8 / de la société Aig Europe,

9 / de la société Poly Champagne,

10 / de M. B... Paniez,

11 / de M. Bernard X...,

12 / de M. Michel A...,

défendeurs à la cassation ;

La demanderesse au pourvoi n° C 97-13.960 invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

La demanderesse au pourvoi n° Q 97-15.236 invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 26 janvier 1999, où étaient présents : M. Beauvois, président, M. Martin, conseiller rapporteur, Mlle Fossereau, MM. Chemin, Villien, Cachelot, conseillers, M. Nivôse, Mme Boulanger, conseillers référendaires, M. Weber, avocat général, Mlle Jacomy, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Martin, conseiller, les observations de la SCP Nicolay et de Lanouvelle, avocat de la compagnie Aig Europe, de la SCP Urtin-Petit et Rousseau-Van Troeyen, avocat de la Coopérative Vinicole de Rilly la Montagne, de Me Garaud, avocat de M. E..., ès qualités, de la SCP Le Bret et Laugier, avocat de MM. X... et A..., de la SCP Philippe et François-Régis Boulloche, avocat de la MAF, les conclusions de M. Weber, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Joint les pourvois n° C 97-13.960 et Q 97-15.236 ;

Met hors de cause MM. X..., A... et la société Mutuelle des architectes français ;

Sur le premier et le deuxième moyens du pourvoi n° Q 97-15.236, réunis ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Reims, 5 février 1997), que la société Coopérative vinicole de Rilly la Montagne (la coopérative), maître de l'ouvrage, a chargé M. C... et la société Poly Industries, depuis lors en redressement judiciaire, assurée, par l'intermédiaire de MM. X... et A..., auprès de la compagnie Unat, devenue Aig Europe, de travaux immobiliers destinés à l'implantation de pressoirs et de leur installation, sous la maîtrise d'oeuvre de la société Garett Ingénierie (la société Garett), assurée par la société Mutuelle des architectes français (la MAF) ; qu'alléguant un fonctionnement défectueux, la coopérative a assigné en réparation la société Garett ;

Attendu que la coopérative fait grief à l'arrêt de rejeter sa demande, alors, selon le moyen, "1 / que, dans le cadre de sa mission, le maître d'oeuvre est tenu d'un devoir de conseil envers le maître d'ouvrage ; que le contrat de maîtrise d'oeuvre ayant pour objet les prestations concourant à l'implantation de quatre pressoirs de 8 000 kilogrammes, prévoyait expressément que l'entreprise Garett assistait le maître d'ouvrage lors du dépouillement des offres des entreprises, qu'il procédait à l'analyse de ces offres et qu'il l'assistait également lors de la réception des travaux ; qu'il est constant et non contesté que la réalisation des pressoirs a été confiée à une société novice qui construisait pour la première fois des pressoirs à membrane de 8 000 kilogrammes ; que le choix d'une entreprise novice et de pressoirs prototypes caractérisait la faute professionnelle du maître d'oeuvre et son manquement à son obligation de conseil, tel que stipulé au contrat ; qu'en refusant de retenir la responsabilité du maître d'oeuvre, la cour d'appel a violé l'article 1147 du Code civil ; 2 / que seule l'immixtion fautive du maître d'ouvrage notoirement compétent est susceptible d'exonérer le maître d'oeuvre de sa responsabilité ; que le choix du matériel par le maître d'ouvrage en l'absence de compétence notoire de ce dernier en matière de pressoirs ne suffit pas à caractériser son immixtion fautive ;

que pour exonérer le maître d'oeuvre de sa responsabilité contractuelle, la cour d'appel s'est bornée à relever que le maître d'ouvrage avait été séduit par un matériel qu'il avait lui-même choisi, entachant ainsi sa décision d'un manque de base légale au regard de l'article 1147 du Code civil ; 3 / que la censure qui s'attache à un arrêt de cassation est limitée à la portée du moyen qui constitue la base de la cassation sauf le cas d'indivisibilité ou de dépendance nécessaire ; qu'il a été démontré dans le premier moyen que la société Garett, maître d'oeuvre, n'avait pas rempli son obligation de conseil envers le maître de l'ouvrage et avait ainsi commis une faute contractuelle ; que sa responsabilité sera retenue et que la cassation qui ne manquera pas d'intervenir sur ce chef entraînera, par voie de conséquence, la cassation du chef susvisé en application de l'article 624 du nouveau Code de procédure civile" ;

Mais attend, d'une part, qu'ayant constaté que le contrat de maîtrise d'oeuvre n'avait pour objet que les prestations concourant à l'implantation des pressoirs, non à leur fourniture, et que la société Garett, dont la coopérative ne prétendait pas même qu'elle eût cherché à la consulter en temps utile sur la compétence de la société Poly Industries et la fiabilité des pressoirs qu'elle avait choisis après s'être informée, n'avait signé le marché de travaux privés passé entre ces deux sociétés que dans la mesure où il comprenait, outre la vente des pressoirs avec leurs accessoires, leur fixation à demeure, la cour d'appel en a exactement déduit que la cause du fonctionnement défectueux étant intrinsèque au matériel considéré et donc sans relation avec son implantation immobilière, que la société Garett devait surveiller, n'était pas de nature à engager sa responsabilité contractuelle ;

Et attendu, d'autre part, que les autres griefs étant rejetés, le moyen tiré d'une cassation par voie de conséquence est devenu sans portée ;

D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le troisième moyen du pourvoi n° Q 97-15.236 ;

Attendu que la coopérative fait grief à l'arrêt de déclarer éteinte sa créance à l'égard de la société Poly Industries, alors, selon le moyen, "d'une part, que le juge doit, en toute circonstance, observer et faire observer le principe de la contradiction et qu'il ne peut fonder sa décision sur les moyens de droit qu'il a relevés d'office, sans avoir, au préalable, invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en relevant d'office le moyen fondé sur la non-déclaration de la créance au passif du redressement judiciaire, en invitant tardivement les parties à s'expliquer au moment du délibéré, la cour d'appel a violé l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ; d'autre part, que la déclaration doit porter le montant de la créance due au jour du jugement d'ouverture avec indication des sommes à échoir, et de la date de leurs échéances ; que le principe de la créance en dommages-intérêts pour inexécution d'une obligation contractuelle est fixé par le juge du contrat qui statue sur les responsabilités et détermine le montant des réparations ; que le principe et le montant d'une telle créance ne sont donc établis qu'au jour où le jugement est passé en force de chose jugée ; qu'en exigeant la production d'une créance éventuelle dont le principe était certain et le montant indéterminé, la cour d'appel a violé les articles 50 et 51 de la loi du 25 janvier 1985" ;

Mais attendu, d'une part, que la coopérative n'ayant pas soutenu dans ses écritures déposées devant la cour d'appel qu'il ne lui était pas possible de déclarer sa créance eu égard à l'indétermination de son principe et de son montant, le moyen est, de ce chef, nouveau, mélangé de fait et de droit ;

Attendu, d'autre part, qu'ayant retenu qu'il résultait des constatations des premiers juges, non contredites par la coopérative interrogée sur ce point en cours de délibéré, que celle-ci n'avait pas déclaré sa créance au passif du redressement judiciaire de la société Poly Industries de sorte que cette créance était éteinte à son égard, la cour d'appel n'a pas violé le principe de la contradiction ;

D'où il suit que, pour partie irrecevable, le moyen n'est pas fondé pour le surplus ;

Mais sur le second moyen du pourvoi n° C 97-13.960 :

Vu l'article 1645 du Code civil ;

Attendu que, pour accueillir la demande dirigée contre la compagnie Aig Europe au titre de la garantie due par l'assureur après livraison effectuée par la société assurée, l'arrêt retient qu'en raison des défauts de conception, le matériel acquis par la Coopérative auprès de la société Poly Industries s'est révélé impropre à sa destination, peu important, eu égard aux relations contractuelles des parties, que la société Poly Industries ne soit pas le concepteur des pressoirs et qu'elle n'ait pas commis de faute dans leur montage ;

Qu'en statuant ainsi, sans rechercher si la société Poly Industries avait qualité de vendeur professionnel, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision de ce chef ;

PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le second moyen du pourvoi n° C 97-13.960 ;

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il dit partiellement fondée l'action directe exercée par la Coopérative vinicole de Rilly la Montagne à l'encontre de la compagnie Aig Europe et condamne celle-ci à payer à la coopérative la somme de 302 693 francs, l'arrêt rendu le 5 février 1997, entre les parties, par la cour d'appel de Reims ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nancy ;

Condamne la Coopérative vinicole de Rilly la Montagne aux dépens des pourvois ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la Coopérative vinicole de Rilly la Montagne à payer à la Mutuelle des architectes français la somme de 9 000 francs, à M. E..., ès qualités, la somme de 9 000 francs, à la société Aig Europe la somme de 9 000 francs, à MM. X... et A..., ensemble, la somme de 9 000 francs ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes de la Coopérative vinicole de Rilly la Montagne, de la MAF et de MM. X... et Ferré en ce qu'elles sont dirigées contre la société Aig Europe ;

Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trois mars mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.


Synthèse
Formation : Chambre civile 3
Numéro d'arrêt : 97-13960
Date de la décision : 03/03/1999
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Civile

Analyses

(sur les 1er et 2e moyens) ARCHITECTE ENTREPRENEUR - Responsabilité - Responsabilité à l'égard du maître de l'ouvrage - Responsabilité du maître d'oeuvre - Mission de surveiller l'implantation de pressoirs - Fonctionnement défectueux - Désordre sans relation avec l'implantation.


Références :

Code civil 1147

Décision attaquée : Cour d'appel de Reims (chambre civile, 1re section), 05 février 1997


Publications
Proposition de citation : Cass. Civ. 3e, 03 mar. 1999, pourvoi n°97-13960


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BEAUVOIS

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:97.13960
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