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02/03/1999 | FRANCE | N°96-42444

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 02 mars 1999, 96-42444


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. Eric X..., demeurant 1, square des Aigles, 60500 Chantilly,

en cassation d'un arrêt rendu le 7 mars 1996 par la cour d'appel d'Amiens (5e chambre sociale), au profit :

1 / de la société d'Y... conseil, prise en la personne de son président du conseil d'administration, M. Jean-Jacques d'Y..., dont le siège est ...,

2 / de M. Jean-Jacques d'Y..., demeurant ...,

défendeurs à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique d

u 12 janvier 1999, où étaient présents : M. Waquet, conseiller doyen faisant fonctions de présiden...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. Eric X..., demeurant 1, square des Aigles, 60500 Chantilly,

en cassation d'un arrêt rendu le 7 mars 1996 par la cour d'appel d'Amiens (5e chambre sociale), au profit :

1 / de la société d'Y... conseil, prise en la personne de son président du conseil d'administration, M. Jean-Jacques d'Y..., dont le siège est ...,

2 / de M. Jean-Jacques d'Y..., demeurant ...,

défendeurs à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 12 janvier 1999, où étaient présents : M. Waquet, conseiller doyen faisant fonctions de président, M. Chagny, conseiller rapporteur, MM. Carmet, Boubli, Ransac, Bouret, conseillers, M. Frouin, Mmes Girard, Barberot, Lebée, M. Richard de la Tour, Mme Andrich, M. Rouquayrol de Boisse, conseillers référendaires, M. Kehrig, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Chagny, conseiller, les observations de la SCP Delaporte et Briard, avocat de M. X..., les conclusions de M. Kehrig, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu que M. X... a été engagé le 1er septembre 1991, en qualité de directeur-adjoint, par M. d'Y..., qui exerçait, sous la dénomination Cabinet d'Y..., une activité personnelle de conseil et formateur en gestion de la qualité en entreprises et de conseil en recrutement ; que les parties ont décidé d'un commun accord de mettre fin aux relations de travail à compter du 31 août 1992 et que l'acte sous seing privé du 28 août 1992, par lequel elles ont réglé les conséquences de cette rupture, a aménagé la clause de non-concurrence insérée au contrat de travail de M. X... ; que M. d'Y... a fait apport de l'ensemble des biens et droits composant son cabinet personnel à la société d'Y... conseil, constituée à la fin du mois de juillet 1992 ; que ladite société a demandé la condamnation de M. X... au paiement de dommages-intérêts pour non-respect de la clause de non-concurrence ;

Sur le premier moyen :

Attendu que M. X... fait grief à l'arrêt attaqué (Amiens, 7 mars 1996) d'avoir décidé que la clause de non-concurrence figurant au contrat de travail qu'il avait conclu avec M. d'Y... et l'avenant à cette clause figurant à l'acte sous seing privé du 28 août 1992 pouvaient lui être opposés par la société d'Y... conseil, alors, selon le moyen, d'une part, qu'il est de principe que le fonds de commerce n'est pas un patrimoine autonome et ne comprend ni les créances et dettes du commerçant, ni les contrats conclus avec les tiers ; que le transfert de la propriété d'un fonds de commerce, qui résulte d'un apport en société ou d'une cession, n'emporte pas de plein droit transfert des créances ; que les parties doivent donc convenir que certaines créances, expressément désignées à l'acte de cession ou d'apport, seront transmises avec le fonds de commerce ; qu'en l'espèce, ainsi que le faisait valoir M. X... dans ses conclusions d'appel, le traité d'apport énumérait les éléments du fonds de commerce objets de l'apport, à savoir les éléments incorporels et le matériel, et ne faisait aucunement mention d'une créance de non-concurrence dont M. X... aurait été débiteur à l'égard du Cabinet d'Y... ; qu'ainsi, la cour d'appel ne pouvait affirmer que la créance de non-concurrence avait été transférée à la société d'Y... conseil sans rechercher si les parties à l'acte d'apport avaient spécialement convenu que cette créance serait transmise à la société bénéficiaire de l'apport ;

qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1134 du Code civil ; alors, d'autre part, que si les parties au contrat de cession ou d'apport du fonds de commerce conviennent de la cession ou de l'apport des créances du fonds, les formalités requises par l'article 1690 du Code civil doivent être accomplies, chacun des éléments compris dans la vente du fonds de commerce demeurant régi par les règles qui lui sont propres ; qu'en l'espèce, à supposer que la créance de non-concurrence ait été transmise à la société d'Y... conseil, bénéficiaire de l'apport, les formalités requises par l'article 1690 du Code civil devaient être respectées ; que la cour d'appel devait donc rechercher si le transport de la créance avait été signifié à M. X... ou si celui-ci avait accepté ce transport dans un acte authentique, l'accomplissement de ces formalités déterminant l'opposabilité de ce transport à M. X... ; qu'en s'abstenant de procéder à cette recherche, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1690 du Code civil ; et alors, enfin, qu'aux termes de l'avenant signé le 28 août 1992 aménageant la clause de non-concurrence figurant dans le contrat de travail de M. X..., il était stipulé que "M. Eric X... désirant conclure avec le Cabinet d'Y... un contrat de sous-traitance, il est accepté par M. Jean-Jacques d'Y... un aménagement de la clause de non-concurrence ci-dessus rappelée, à savoir qu'elle s'appliquera, pour l'activité de conseil et de formation en gestion qualité, dans un rayon de 150 km à vol d'oiseau du Cabinet d'Y... situé à Grandvillier (...) Il est expressément convenu que cet aménagement ... est établi pour la période pendant laquelle M. Eric X... sera sous-traitant du Cabinet d'Y..., à l'issue de la cessation de ses fonctions salariées au sein du Cabinet d'Y.... Si

les relations de sous-traitance étaient rompues pour quelque cause que ce soit et par quelque partie que ce soit, l'aménagement de la clause de non-concurrence présenté ci-dessus serait annulé de plein droit et la clause de non-concurrence initiale prévue dans le contrat de travail de M. Eric X... s'appliquerait à nouveau pour cette même période de trois années à compter de la cessation des fonctions salariées de M. Eric X... au sein du Cabinet d'Y..." ; que cet avenant, signé entre M. X... et M. d'Y..., ne fait nullement mention de la reprise du Cabinet d'Y... par la société d'Y... conseil et des relations de sous-traitance envisagées entre M. X... et la société d'Y... conseil ; qu'il ne comporte aucun engagement exprès de M. X... à l'égard de la société d'Y... conseil ; qu'ainsi, en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de l'avenant signé le 28 août 1992 et violé l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu qu'en cas de modification dans la situation juridique de l'employeur, l'obligation de non-concurrence souscrite par un salarié est transférée par application de l'article L. 122-12, alinéa 2, du Code du travail au nouvel employeur ; qu'il s'ensuit que la cour d'appel, ayant constaté qu'en vertu du traité qu'il avait signé en qualité de cofondateur de la société d'Y... conseil, M. d'Y... avait apporté les éléments corporels et incorporels de son activité indépendante à ladite société, laquelle avait effectivement poursuivi son activité, d'où résultait le transfert d'une entité économique ayant conservé son identité et dont l'activité avait été poursuivie, a pu décider que l'obligation de non-concurrence insérée au contrat de travail de M. X... avait été transmise à la société d'Y... conseil et que cette dernière pouvait demander réparation du dommage causé par la violation de la clause par le salarié ; que le moyen n'est pas fondé ;

Sur le second moyen :

Attendu que M. X... reproche également à l'arrêt de l'avoir condamné à payer à la société d'Y... conseil la somme de 250 000 francs à titre de dommages-intérêts, alors, selon le moyen, d'une part, que la contradiction de motifs équivaut à un défaut de motifs ; que, pour condamner M. X... à payer à la société d'Y... conseil la somme de 250 000 francs à titre de dommages-intérêts, la cour d'appel se fonde expressément sur les pièces n° 7 et 8 produites par la société d'Y... conseil et correspondant, respectivement, à une proposition de la société Vision 9000 à la société Polyservices en date du 6 septembre 1993 et à un courrier de la société Vision 9000 à la société Fermod en date du 21 septembre 1993 ; que la cour d'appel affirme néanmoins que les pièces n° 6 à 11 produites en première instance par la société d'Y... conseil ne sont pas versées aux débats devant elle et qu'il n'y a donc pas lieu à les écarter des débats ; qu'en statuant ainsi, par des motifs contradictoires, la cour d'appel a violé les articles 455 et 458 du nouveau Code de procédure civile ; alors, d'autre part, qu'en application des articles 550 et 562 du nouveau Code de procédure civile, les juges du fond ne peuvent aggraver le sort de l'appelant sur son unique appel et en l'absence d'appel incident de l'intimé ; qu'en l'espèce, le conseil de prud'hommes de Beauvais avait condamné M. X... à payer à la société d'Y... conseil les dommages-intérêts

contractuellement fixés à la somme de 225 000 francs ; que seul M. X... avait relevé appel de cette décision, la société d'Y... conseil et M. d'Y... en demandant la confirmation pure et simple ; qu'en l'absence d'appel incident, la cour d'appel ne pouvait aggraver le sort de l'appelant sur son unique appel ; qu'ainsi, en portant le montant de la condamnation prononcée en première instance à la somme de 250 000 francs, la cour d'appel a violé les articles 552 et 560 du nouveau Code de procédure civile ; et alors, enfin, qu'aux termes de l'avenant signé le 28 août 1992, il était stipulé que le non-respect de l'obligation de non-concurrence obligerait M. X... au paiement de la somme de 225 000 francs à titre de dommages-intérêts forfaitaires au Cabinet d'Y... ; qu'ainsi, en déclarant arrêter à la somme de 250 000 francs, "conformément à la clause pénale contractuelle", le montant des dommages-intérêts dus par M. X... à la société d'Y... conseil, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de l'avenant et a violé l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu que, par un second arrêt rendu le 27 mars 1997 à la requête de M. X..., la cour d'appel a réparé, d'une part, l'erreur matérielle qui affectait sa première décision quant au visa des pièces sur lesquelles elle s'est fondée et, d'autre part, l'octroi d'une somme supérieure à celle qui avait été allouée en première instance ;

D'où il suit que le moyen manque en fait ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. X... aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du deux mars mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 96-42444
Date de la décision : 02/03/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, RUPTURE - Clause de non-concurrence - Inobservation - Transfert de l'entité économique de l'employeur - Opposabilité de la clause.


Références :

Code civil 1134
Code du travail L122-12 al. 2

Décision attaquée : Cour d'appel d'Amiens (5e chambre sociale), 07 mars 1996


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 02 mar. 1999, pourvoi n°96-42444


Composition du Tribunal
Président : Président : M. WAQUET conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:96.42444
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