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02/03/1999 | FRANCE | N°96-13496

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 02 mars 1999, 96-13496


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1 / M. Alain-François Z..., demeurant ..., agissant en sa qualité de mandataire-liquidateur de la société MCM Arpajon, dont le siège est ...,

2 / Mme Adrienne X..., demeurant anciennement ..., et actuellement quartier Vaumartin, Route nationale 561, 13650 Meyrargues,

3 / M. Gaëtan Y..., demeurant anciennement ..., et actuellement lieu-dit La Ferrage à Saint-Pons, 84120 Mirabeau,

en cassation d'un a

rrêt rendu le 15 décembre 1995 par la cour d'appel de Paris (25e Chambre, Section A), au pro...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par :

1 / M. Alain-François Z..., demeurant ..., agissant en sa qualité de mandataire-liquidateur de la société MCM Arpajon, dont le siège est ...,

2 / Mme Adrienne X..., demeurant anciennement ..., et actuellement quartier Vaumartin, Route nationale 561, 13650 Meyrargues,

3 / M. Gaëtan Y..., demeurant anciennement ..., et actuellement lieu-dit La Ferrage à Saint-Pons, 84120 Mirabeau,

en cassation d'un arrêt rendu le 15 décembre 1995 par la cour d'appel de Paris (25e Chambre, Section A), au profit de la société Elf Antar France, société anonyme dont le siège est ...,

défenderesse à la cassation ;

Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 19 janvier 1999, où étaient présents : M. Bézard, président, Mme Vigneron, conseiller rapporteur, M. Grimaldi, conseiller, Mme Piniot, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Vigneron, conseiller, les observations de la SCP Boré et Xavier, avocat de M. Z..., ès qualités, de Mme X... et de M. Y..., de la SCP Delaporte et Briard, avocat de la société Elf Antar France, les conclusions de Mme Piniot, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt attaqué (Paris, 15 décembre 1995), que, par contrat du 29 octobre 1985, complété par deux avenants des 31 juillet et 25 septembre 1986, la société Elf Antar France (société Elf) a confié à la société MCM Arpajon (société MCM) l'exploitation de trois stations-service au moyen d'un mandat pour la distribution des carburants et d'une location-gérance pour la distribution des autres produits et la fourniture de prestations ; qu'après résiliation amiable de ce contrat par les parties, M. Z..., agissant en qualité de liquidateur de la liquidation judiciaire de la société MCM, ainsi que Mme X... et M. Y..., gérants de cette société, ont assigné la société Elf en annulation du contrat pour indétermination du prix des lubrifiants devant être fournis exclusivement par cette société et en paiement de diverses sommes d'argent à titre de frais, impenses et pertes d'exploitation ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que le liquidateur, Mme X... et M. Y... font grief à l'arrêt d'avoir rejeté leur demande en annulation du contrat, alors, selon le pourvoi, d'une part, que, dans leurs conclusions d'appel, le liquidateur ainsi que Mme X... et M. Y... à titre accessoire alléguaient l'existence d'un abus et, plus précisément, d'une exploitation abusive par la société Elf de la situation de dépendance économique de la société MCM, aménagée par l'ensemble des dispositions des contrats liant les parties, à la faveur desquelles la société pétrolière pratiquait des prix de vente au détail pour les carburants et un tarif revendeur pour les lubrifiants et autres produits pétroliers, outre une redevance de location-gérance variable, lui permettant de confisquer la plus grande partie de la marge bénéficiaire des produits commercialisés sans égard au coût réel de leur distribution entièrement supporté par la société MCM, ni à l'environnement concurrentiel de celle-ci ; qu'en énonçant que le liquidateur, Mme X... et M. Y... n'auraient allégué l'existence d'aucun abus et qu'ils auraient fait le procès de l'ensemble des contrats liant les pétroliers aux pompistes, la cour d'appel a, dès lors, entaché sa décision d'une méconnaissance des termes du litige en violation de l'article 4 du nouveau Code de procédure civile ; alors, d'autre part, qu'est prohibée, lorsqu'elle a pour objet ou peut avoir pour effet d'empêcher, de restreindre ou de fausser le jeu de la concurrence sur un marché, l'exploitation abusive par une entreprise de l'état de dépendance économique dans lequel se trouve, à son égard, une entreprise cliente qui ne dispose pas de solution équivalente ; qu'en ne s'expliquant pas sur l'avantage excessif et anticoncurrentiel, qui était ainsi allégué par le liquidateur, Mme X... et M. Y..., retiré par la société Elf d'une exploitation abusive de l'état de dépendance économique aménagé par l'ensemble des clauses du contrat litigieux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 8 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; et alors, enfin, que la convention relative à une pratique prohibée est entachée de nullité ; qu'en l'espèce, la convention du 29 octobre 1985 et ses avenants des 31 juillet 1986 et 25 septembre 1986 étaient entachés de nullité du fait que l'ensemble de leurs dispositions aménageait une situation de dépendance économique totale de la société distributrice, exploitée abusivement par la société pétrolière afin

d'en retirer un profit illégitime et anticoncurrentiel au détriment de son cocontractant ; que la cour d'appel, qui ne s'est pas expliquée sur la situation de dépendance économique organisée par le contrat ainsi que sur l'exploitation abusive qui en était faite par la société Elf, ainsi qu'elle y était invitée, a privé sa décision de base légale au regard de l'article 9 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ;

Mais attendu qu'i ne résulte ni des conclusions, ni de l'arrêt qu'il ait été soutenu devant la cour d'appel que le contrat était nul comme se rapportant à une exploitation abusive par la société Elf de l'état de dépendance économique de la société MCM au sens de l'article 8 de l'ordonnance du 1er décembre 1986 ; que le moyen est donc nouveau et que, mélangé de fait et de droit, irrecevable ;

Sur le deuxième moyen :

Attendu que le liquidateur, Mme X... et M. Y... reprochent encore à l'arrêt d'avoir rejeté leur demande d'indemnisation, alors, selon le pourvoi, que l'abus dans la fixation du prix peut donner lieu à indemnisation conformément aux règles de la responsabilité civile ; que, dès lors, en ne recherchant pas, ainsi que l'y invitaient le liquidateur, Mme X... et M. Y... dans leurs conclusions d'appel, si la société pétrolière pratiquait des prix de vente au détail pour les carburants et un tarif revendeur pour les lubrifiants et autres produits pétroliers, outre une redevance de location-gérance variable, lui permettant de confisquer la plus grande partie de la marge bénéficiaire des produits commercialisés sans égard ni au coût réel de leur distribution entièrement supporté par la société MCM, ni à l'environnement concurrentiel de son cocontractant, ce qui caractérisait un abus dans la fixation des prix et, par là-même, un manquement à l'obligation contractuelle d'exécuter le contrat dans l'intérêt commun des deux parties, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions combinées des articles 1134 et 1147 du Code civil, ensemble l'article 1er de la loi du 31 décembre 1989 ;

Mais attendu qu'il ne résulte ni des conclusions, ni de l'arrêt, que le liquidateur, Mme X... et M. Y... aient prétendu que la société Elf avait fixé de manière abusive le prix de ses carburants et lubrifiants ; que la cour d'appel n'avait donc pas à procéder à une recherche qui ne lui était pas demandée ; que le moyen est irrecevable ;

Sur le troisième moyen, pris en ses deux branches :

Attendu que le liquidateur reproche à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande d'indemnisation des pertes subies par la société MCM en sa qualité de mandataire, à l'occasion de sa gestion, alors, selon le pourvoi, d'une part, que les pertes de gestion ne se ramènent pas à un excédent de charges sur les recettes ; que la stipulation contractuelle d'une commission forfaitaire couvrant la rémunération et les frais du mandat ne pouvait donc avoir pour effet de couvrir les pertes d'exploitation subies par le mandataire à l'occasion de la gestion du mandat ; que, dès lors, en énonçant que les dispositions contractuelles relatives à la rémunération du mandataire et aux charges du mandat dérogeaient implicitement aux dispositions de l'article 2000 du Code civil, la cour d'appel a dénaturé la portée de ces dispositions et a, dès lors, violé l'article 1134 du Code civil par refus d'application ; et alors, d'autre part, que, dans ses conclusions d'appel, le liquidateur démontrait que les conditions de prix imposées contractuellement par la société pétrolière pour la distribution des carburants ainsi que le montant imposé des charges de l'exploitation des stations-services étaient à l'origine du carctère structurellement déficitaire de celle-ci et versaient aux débats les bilans afférents à la totalité des exercices comptables de la période contractuelle ; que, dès lors, en énonçant que le liquidateur ne versait aucun élément comptable émanant de la société MCM sans examiner les pièces comptables versées aux débats, établies par un comptable extérieur, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 2000 du Code civil ;

Mais attendu, d'une part, qu'à défaut de production du contrat dont la dénaturation est invoquée, la Cour de Cassation n'est pas en mesure d'exercer son contrôle ;

Attendu, d'autre part, que les motifs relatifs à la renonciation aux dispositions de l'article 2000 du Code civil rendent surabondants les motifs critiqués par la seconde branche ;

D'où il suit que le moyen, irrecevable en sa première branche, ne peut être accueilli pour le surplus ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Z..., ès qualités, Mme X... et M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Elf Antar France ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du deux mars mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 96-13496
Date de la décision : 02/03/1999
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (25e Chambre, Section A), 15 décembre 1995


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 02 mar. 1999, pourvoi n°96-13496


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BEZARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:96.13496
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