Attendu, selon l'arrêt attaqué (Amiens, 6 septembre 1996), que la société civile immobilière des Arpents (la SCI) est propriétaire d'un immeuble, construit en deux tranches, réalisées en 1978 et en 1981 sous la maitrise d'oeuvre de M. X..., architecte, et donné à bail à usage commercial à la société SAGA 60 ; que des désordres affectant les combles des bâtiments de la première tranche étant apparus, la société SAGA 60, après expertise, a assigné en référé la SCI qui a été condamnée, par ordonnance du 7 décembre 1983, à effectuer les travaux de reprise sous astreinte de 1 000 francs par jour de retard ; que les désordres ayant persisté en dépit des travaux réalisés par l'entreprise Rondelez et s'étant étendus à la deuxième tranche, la cour d'appel, statuant en référé, a, par arrêt du 20 octobre 1989, liquidé provisoirement l'astreinte, autorisé la société SAGA 60 à faire effectuer les travaux préconisés par l'expert et condamné la SCI à verser une provision sous la garantie de M. X..., architecte, et de son assureur, la société SIS Assurances ; que dans l'action engagée au principal par la société SAGA 60, la cour d'appel a, par arrêt du 26 novembre 1992, jugé que les travaux de réfection remédiant aux désordres étaient à la charge de la SCI ; que, par ailleurs, la SCI a assigné la société SAGA 60, eu égard aux stipulations du bail, en remboursement des sommes exposées pour procéder aux travaux de réfection et en payement de travaux incombant à la locataire ;
Sur le premier moyen du pourvoi principal : (sans intérêt) ;
Sur le second moyen du pourvoi principal :
Attendu que la société SAGA 60 fait grief à l'arrêt de liquider définitivement à la somme de 100 000 francs l'astreinte prononcée par ordonnance de référé et de lui ordonner de restituer à la SCI le trop-perçu sur la liquidation de cette astreinte en exécution de l'arrêt du 20 octobre 1989, alors, selon le moyen, 1° que seul le juge de l'exécution est compétent pour liquider une astreinte ; que la cour d'appel, qui, au demeurant, n'était pas saisie de cette question, ne pouvait y procéder elle-même sans violer l'article 35 de la loi du 9 juillet 1991, ensemble les articles 4 et 5 du nouveau Code de procédure civile ; 2° qu'en s'abstenant d'expliquer en quoi " les difficultés rencontrées par la SCI dans ses rapports avec les constructeurs " pouvaient constituer un obstacle à la réalisation des travaux de réparation auxquels la SCI avait été condamnée le 7 décembre 1983 et justifier ainsi sa résistance à exécuter lesdits travaux, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 36 de la loi du 9 juillet 1991 ;
Mais attendu, d'une part, que la cour d'appel était compétente, dès lors qu'elle était saisie de l'appel d'un jugement rendu le 10 décembre 1990 en matière de liquidation d'astreinte, soit avant le 1er janvier 1993, date d'entrée en vigueur de la loi du 9 juillet 1991, par un juge qui était compétent à cet effet selon les règles alors en vigueur ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant relevé que les conséquences des erreurs de conception et d'exécution commises par l'architecte et l'entreprise chargés des travaux de réfection auraient pu être évitées si la SCI avait adopté la solution préconisée par l'expert, que, cependant, les difficultés rencontrées par la SCI dans ses rapports avec les constructeurs devaient être prises en considération, la cour d'appel a souverainement liquidé l'astreinte au montant retenu ;
D'où il suit que le moyen n'est pas fondé ;
Sur le premier moyen du pourvoi incident : (sans intérêt) ;
Mais sur le second moyen du pourvoi incident :
Vu l'article 36 de la loi du 9 juillet 1991 ;
Attendu que le montant de l'astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l'injonction a été adressée et des difficultés qu'il a rencontrées pour l'exécuter ; que l'astreinte provisoire ou définitive est supprimée en tout ou en partie s'il est établi que l'inexécution ou le retard dans l'exécution de l'injonction du juge provient, en tout ou en partie, d'une cause étrangère ;
Attendu qu'après avoir liquidé l'astreinte, due par la SCI, à un certain montant, l'arrêt condamne la société Rondelez à garantir la SCI de la condamnation prononcée contre elle à ce titre ;
Qu'en statuant ainsi, alors que l'astreinte est une mesure de contrainte à caractère personnel, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il condamne la société Rondelez à garantir la SCI Les Arpents de la condamnation prononcée au titre de l'astreinte, l'arrêt rendu le 6 septembre 1996, entre les parties, par la cour d'appel d'Amiens ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Douai.