AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur les pourvois n° Z 96-42.634, A 96-42.635 formés par la société Bricard, société anonyme, dont le siège est ...,
en cassation de deux arrêts rendus le 29 mars 1996 par la cour d'appel de Douai (chambre sociale) , au profit :
1 / de Mme Maryvonne Y..., demeurant ...,
2 / de Mme Danièle X..., demeurant 23, cité des Marronniers, 62270 Frevent,
défenderesses à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 15 décembre 1998, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, Mme Andrich, conseiller référendaire rapporteur, MM. Waquet, Carmet, Le Roux-Cocheril, Ransac, Chagny, conseillers, M. Frouin, Mme Girard, Mlle Barberot, Mme Lebée, MM. Richard de la Tour, Rouquayrol de Boisse, Poisot, conseillers référendaires, M. de Caigny, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Andrich, conseiller référendaire, les observations de la SCP Tiffreau, avocat de la société Bricard, les conclusions de M. de Caigny, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu leur connexité, joint les pourvois Z 96-42. 634 et A 96-42.635 :
Sur le moyen unique :
Attendu que la société Bricard a décidé, dans le cadre de la restructuration de ses activités, d'abandonner la fabrication des produits destinés au "froid", en a fait l'annonce aux institutions représentatives le 13 avril 1993 et a informé, le 7 juillet 1993, Mme X..., salariée depuis 1969, et Mme Y..., salariée depuis 1971, de la suppression de leur poste et leur a proposé de se porter candidates pour l'un des postes disponibles figurant à la liste indexée, à défaut de quoi, leur licenciement pour motif économique serait prononcé ; que les deux salariées ont accepté le 23 juillet 1993 un poste de ciseleur à mi-temps "suite à la suppression de leur poste" inhérent à l'activité "froid" ; qu'un avenant à leur contrat de travail a été régularisé le 13 décembre 1993, à effet du 1er janvier 1994 ;
Attendu que la société Bricard fait grief aux arrêts attaqués (Douai, 26 et 29 mars 1996) d'avoir déclaré sans cause et sans effet les avenants aux contrats de travail du 13 décembre 1993 et de l'avoir condamnée à payer aux salariées un rappel de salaire à compter de janvier 1994, alors, selon le moyen, que la cour d'appel ne pouvait déclarer, par des motifs inopérants, l'avenant du 13 décembre 1993 dépourvu de cause, sans avoir invité les parties à conclure sur ce point ;
que s'agissant d'un contrat synallagmatique, l'obligation souscrite par chacune des salariées trouvait sa contrepartie dans l'obligation souscrite par l'employeur dont il n'était pas soutenu qu'elle n'avait pas été exécutée ; et qu'enfin elle ne pouvait lui imputer des informations erronées tout en constatant que l'activité froid avait définitivement cessé fin 1995 ;
Mais attendu, d'abord, que les salariées soutenaient que l'avenant du 13 décembre 1993 était nul, que le moyen était nécessairement dans la cause ;
Attendu, ensuite, que la cour d'appel, se plaçant à la date de signature de l'avenant, a relevé que l'annonce trompeuse de l'arrêt de l'activité "froid" au 31 décembre 1993 et de la suppression des postes à plein temps, avait vicié le consentement des salariées ; que, dès lors, l'avenant du 13 décembre dont la cause était cette suppression était nul ;
Et attendu, encore, que, sous couvert du grief non fondé de contradiction de motifs, la quatrième branche du moyen ne tend qu'à remettre en discussion, devant la Cour de Cassation, les éléments de faits appréciés souverainement par les juges du fond ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois ;
Condamne la société Bricard aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du dix février mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.