AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Olig, société à responsabilité limitée, dont le siège est ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 15 octobre 1996 par la cour d'appel de Versailles (5e chambre sociale A), au profit de M. Ludovic X..., demeurant ...,
défendeur à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 25 novembre 1998, où étaient présents : M. Merlin, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Soury, conseiller référendaire rapporteur, MM. Finance, Lanquetin, conseillers, M. Boinot, conseiller référendaire, M. Kehrig, avocat général, Mlle Lambert, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Soury, conseiller référendaire, les observations de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société Olig, les conclusions de M. Kehrig, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu que M. X... a été engagé par la société Olig le 1er octobre 1989 en qualité de technico-commercial à temps partiel ; qu'à son retour d'un congé sans solde le 6 juillet 1993, son employeur lui a proposé de travailler à temps complet ; qu'il a été licencié par lettre du 12 juillet 1993 pour avoir refusé la modification de son contrat de travail ;
que son employeur a mis fin à son préavis le 31 août suivant pour faute professionnelle consistant en l'utilisation à des fins personnelles du matériel de l'entreprise ; que M. X... a saisi la juridiction prud'homale pour obtenir paiement de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'une indemnité de préavis et de rappels de congés payés et de prime d'ancienneté ;
Attendu que la société Olig fait grief à l'arrêt attaqué (Versailles, 15 octobre 1996) de l'avoir condamnée à payer à M. X... une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, alors, selon le moyen, que d'une part, il appartient au juge, saisi d'une contestation du bien fondé du licenciement effectué à la suite d'une modification substantielle du contrat de travail consistant en une augmentation du temps de travail sans compensation salariale, de contrôler la réalité et le sérieux des difficultés invoquées pour justifier cette modification et non de se substituer à l'employeur pour décider des solutions les plus appropriées pour y faire face ; qu'en se déterminant au motif que la baisse d'activité de la société Olig aurait dû entraîner une baisse et non une augmentation de l'horaire du temps de travail, la cour d'appel a violé l'article L. 122-14-3 du Code du travail ; que d'autre part, la réalité des difficultés économiques résultant d'une baisse d'activité globale de l'entreprise n'est pas subordonnée à la diminution du temps de travail de tous les salariés ni exclusive de l'augmentation du temps de travail de certains d'entre eux ; qu'en décidant que le licenciement économique était dépourvu de cause réelle et sérieuse au motif que la proposition faite au salarié de passer à plein temps contredisait l'affirmation de l'employeur d'une baisse d'activité de l'entreprise qui aurait dû plutôt entraîner une réduction du temps de travail, la cour d'appel a violé l'article L. 321-1 du Code du travail ; qu'enfin, une réorganisation de l'entreprise rendue nécessaire en raison de difficultés économiques peut être menée par voie de toutes modifications des contrats de travail qui peuvent s'avérer utiles, dans la mesure où elles sont légales ; qu'aucune disposition légale n'oblige un employeur, dans le cadre d'une telle réorganisation pour baisse d'activité, à diminuer le temps de travail de ses salariés, et que la réorganisation peut être envisagée par voie d'augmentation du temps de travail de certains salariés, sans augmentation corrélative de salaire ; qu'en affirmant qu'une baisse d'activité doit avoir pour effet principal la réduction du temps de travail, la cour d'appel a encore violé les textes précités ;
Mais attendu que la cour d'appel, examinant les raisons de la modification du contrat de travail dont le refus par le salarié avait motivé son licenciement, a estimé, par motifs et adoptés, que la preuve des difficultés économiques alléguées par l'employeur pour justifier cette modification n'était pas rapportée ; qu'elle en a exactement déduit que le licenciement ne procédait pas d'une cause réelle et sérieuse ; que le moyen n'est pas fondé ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Olig aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt janvier mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.