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19/01/1999 | FRANCE | N°96-44954

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 19 janvier 1999, 96-44954


Attendu que M. Chakroun X..., au service de la société PSR Apidec depuis le 6 avril 1992 en qualité de monteur suivant contrat à durée déterminée verbal, a été en arrêt de travail pour accident du travail de juin 1993 au 19 janvier 1994 ; que soutenant qu'à cette date, l'employeur s'était opposé à ce qu'il reprenne le travail et que la visite de reprise n'avait pas été effectuée, le salarié a, le 5 avril 1994, saisi la juridiction prud'homale afin de faire constater la rupture de son contrat de travail et obtenir des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et

sérieuse ; que le 13 avril 1994, il a été déclaré apte à reprendre ...

Attendu que M. Chakroun X..., au service de la société PSR Apidec depuis le 6 avril 1992 en qualité de monteur suivant contrat à durée déterminée verbal, a été en arrêt de travail pour accident du travail de juin 1993 au 19 janvier 1994 ; que soutenant qu'à cette date, l'employeur s'était opposé à ce qu'il reprenne le travail et que la visite de reprise n'avait pas été effectuée, le salarié a, le 5 avril 1994, saisi la juridiction prud'homale afin de faire constater la rupture de son contrat de travail et obtenir des dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ; que le 13 avril 1994, il a été déclaré apte à reprendre le travail par le médecin du Travail ; qu'il a été licencié pour motif économique le 12 juillet 1994, dans le cadre de la procédure collective ouverte à l'encontre de la société PSR Apidec ;

Sur le premier moyen :

Vu les articles L. 122-3-13, L. 122-14-1 et L. 122-14-5 du Code du travail ;

Attendu qu'en fixant, au passif de la liquidation judiciaire de la société PSR Apidec, la créance de M. Chakroun X... résultant de la requalification de sa relation de travail en contrat à durée indéterminée, sans accorder d'indemnité spécifique de requalification, la cour d'appel a relevé que pour qualifier le contrat de travail du salarié en contrat à durée déterminée, les juges ont noté l'existence sur plusieurs bulletins de salaire d'une prime de précarité, mais qu'un contrat à durée déterminée doit être établi par écrit ; qu'en l'absence d'écrit, le salarié est bien fondé à prétendre avoir été lié depuis sa date d'embauche par un contrat à durée indéterminée avec son employeur ; que cette requalification doit entraîner en moins prenant la restitution des indemnités de précarité indûment perçues ; qu'elle implique par ailleurs la reconnaissance au salarié de la créance d'indemnité de licenciement qu'il sollicite ;

Attendu cependant que, lorsqu'elle fait droit à la demande de requalification formée par le salarié, la juridiction saisie doit d'office condamner l'employeur à payer au salarié une indemnité qui ne peut être inférieure à un mois de salaire ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;

Sur le deuxième moyen :

Vu les articles L. 122-4 et R. 241-51 du Code du travail ;

Attendu qu'en vertu du premier de ces textes, l'employeur peut se voir imputer la responsabilité de la rupture du contrat de travail lorsque, par son fait, il rend impossible pour le salarié la poursuite dudit contrat ; qu'il résulte du second que le salarié , après une absence d'au moins 8 jours pour accident du travail, doit, lors de la reprise du travail et dans un délai de 8 jours, bénéficier d'un examen par le médecin du Travail, afin d'apprécier son aptitude à reprendre son ancien emploi, la nécessité d'une adaptation des conditions de travail ou de réadaptation et éventuellement de l'une et de l'autre de ces mesures ;

Attendu que, pour débouter M. Chakroun X... de ses demandes de dommages-intérêts pour rupture abusive de son contrat de travail, d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement, la cour d'appel a énoncé que si l'employeur a été particulièrement négligent dans la mise en place de son service médical, il n'est nullement établi qu'il ait décidé de se séparer du salarié en raison de son état de santé ; que cette accusation ne repose que sur les affirmations du salarié ; que le juge des référés a d'ailleurs donné acte à l'employeur qu'il n'avait nullement l'intention de rompre le contrat de travail ; que M. Chakroun X... n'explique pas pourquoi il n'a pas retiré la lettre recommandée par laquelle l'employeur s'étonnait de ce qu'il ne s'était pas présenté au travail après la visite médicale l'ayant déclaré apte et le convoquait à un entretien préalable ;

Qu'en statuant ainsi, alors qu'il résulte des constatations de l'arrêt, d'une part, que la rupture était effective depuis le 5 avril 1994, date à laquelle le salarié avait saisi la juridiction prud'homale pour la faire constater, ce dont il découlait qu'il ne pouvait lui être reproché de ne pas avoir retiré la lettre recommandée avec avis de réception du 27 mai 1994, et, d'autre part, que le salarié n'avait pu reprendre le travail dans les délais normaux en raison des carences de l'employeur qui avait tardé, d'une manière excessive, à prendre les dispositions nécessaires pour qu'il puisse bénéficier d'un examen par le médecin du Travail, ce qui rendait la rupture imputable à l'employeur, la cour d'appel qui n'a pas tiré de ses propres constatations les conséquences légales qui s'imposaient, a violé les textes susvisés ;

Sur le troisième moyen :

Vu l'article L. 212-1-1 du Code du travail ;

Attendu que, selon ce texte, en cas de litige relatif à l'existence ou au nombre d'heures de travail effectuées, l'employeur doit fournir au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié ; que le juge forme sa conviction au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l'appui de sa demande, après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d'instruction qu'il estime utiles ;

Attendu que, pour rejeter la demande du salarié en paiement d'une somme à titre d'heures supplémentaires, la cour d'appel a énoncé que cette demande n'est fondée que sur une simple affirmation du salarié qui ne produit aucune justification de ses prétentions ; qu'il résulte des attestations de collègues de travail de M. Chakroun X... que d'une manière générale, l'entreprise avait un horaire fixe, 8 heures, 12 heures, 13 heures 30, 17 heures 30 ; que si occasionnellement quelques heures supplémentaires ont pu être effectuées et être payées, il n'est nullement établi au vu de ces attestations que M. Chakroun X... ait effectué les heures supplémentaires dont il réclame le paiement ;

Attendu cependant, qu'il résulte du texte susvisé que la preuve des heures de travail effectuées n'incombe spécialement à aucune des parties et que le juge ne peut, pour rejeter une demande d'heures supplémentaires, se fonder sur l'insuffisance des preuves apportées par le salarié ; qu'il doit examiner les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié et que l'employeur est tenu de lui fournir ;

D'où il suit qu'en se déterminant au vu des seuls éléments fournis par le salarié, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;

PAR CES MOTIFS :

CASSE ET ANNULE, mais seulement en ce qu'il n'a pas accordé au salarié l'indemnité de requalification de son contrat de travail en contrat à durée indéterminée, en ce qu'il a rejeté les demandes de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, d'indemnité pour non-respect de la procédure de licenciement et de rappel d'heures supplémentaires, l'arrêt rendu le 23 septembre 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Paris ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Versailles.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 96-44954
Date de la décision : 19/01/1999
Sens de l'arrêt : Cassation partielle
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONTRAT DE TRAVAIL, DUREE DETERMINEE - Définition - Qualification donnée au contrat - Demande en requalification - Indemnité prévue à l'article L. 122-3-13 du Code du travail - Attribution - Pouvoirs des juges .

POUVOIRS DES JUGES - Applications diverses - Contrat de travail - Durée déterminée - Requalification - Indemnité prévue à l'article L. 122-3-13 du Code du travail - Attribution

Lorsqu'elle fait droit à la demande de requalification du contrat à durée déterminée en contrat à durée indéterminée formée par le salarié, la juridiction saisie doit d'office condamner l'employeur à payer au salarié une indemnité qui ne peut être inférieure à un mois de salaire.


Références :

Code du travail L122-3-13, L122-14-1, L122-14-5

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris, 23 septembre 1996


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 19 jan. 1999, pourvoi n°96-44954, Bull. civ. 1999 V N° 27 p. 19
Publié au bulletin des arrêts des chambres civiles 1999 V N° 27 p. 19

Composition du Tribunal
Président : Président : M. Waquet, conseiller doyen faisant fonction. .
Avocat général : Avocat général : M. Kehrig.
Rapporteur ?: Rapporteur : Mme Trassoudaine-Verger.
Avocat(s) : Avocats : la SCP Gatineau, M. Bertrand.

Origine de la décision
Date de l'import : 14/10/2011
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1999:96.44954
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