AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, DEUXIEME CHAMBRE CIVILE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Maison Pairot, société à responsabilité limitée, dont le siège est à Sainte-Marguerite, 66400 Ceret,
en cassation d'un arrêt rendu le 27 mars 1996 par la cour d'appel de Montpellier (1re chambre, section D), au profit de la société Allianz Via IARDT, société anonyme, qui se substitue aux droits et obligations de la compagnie Via assurances IARD, dont le siège ...,
défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 26 novembre 1998, où étaient présents : M. Buffet, conseiller le plus ancien non empêché, faisant fonctions de président, Mme Lardet, conseiller rapporteur, Mme Borra, MM. Séné, Etienne, conseillers, M. Mucchielli, conseiller référendaire, M. Monnet, avocat général, Mlle Laumône, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Lardet, conseiller, les observations de Me Blondel, avocat de la société Maison Pairot, de la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat de la société Allianz Via IARDT, aux droits de la compagnie Via assurances IARD, les conclusions de M. Monnet, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Attendu, selon l'arrêt attaqué (Montpellier, 27 mars 1996), que, dans un litige opposant la société Maison Pairot (la société) à la compagnie Allianz Via IARDT (la compagnie), la péremption d'instance a, devant la cour d'appel, été invoquée par cette compagnie en soutenant qu'aucune diligence n'avait été accomplie par les parties pendant 2 ans ;
Attendu qu'il est fait grief à l'arrêt d'avoir, sur l'appel du 2 février 1993, constaté la péremption de l'instance, alors, selon le moyen, que, d'une part, la péremption d'instance n'est pas acquise si, dans le délai de 2 ans, une partie accomplit une diligence, c'est à dire une démarche de nature à faire progresser l'affaire ; que constitue une telle démarche le courrier adressé par l'avoué de l'appelant, qui a régulièrement conclu à l'appui de son appel, à l'avoué de l'intimé pour lui enjoindre de conclure à son tour, peu important que ces courriers entre auxiliaires de justice, courriers non argués de faux, soient dépourvus de "date certaine" ; qu'en soumettant l'efficacité de tels courriers au regard des règles et principes qui gouvernent la péremption d'instance, courriers qui ne sont pas des actes au sens de l'article 1328 du Code civil, à l'exigence d'une "date certaine", la cour d'appel a violé par fausse application l'article 386 du nouveau Code de procédure civile ; alors que, d'autre part, et en toute hypothèse, il appartient à la partie qui entend se prévaloir de l'extinction par péremption de l'instance introduite par son adversaire d'établir l'absence de diligences pendant 2 ans, condition d'application des dispositions de l'article 386 précité ; que le doute subsistant sur l'existence ou non de diligences doit profiter à celui à qui on oppose l'exception de péremption ; qu'en accueillant ladite exception au motif d'une incertitude sur la date mentionnée sur les courriers opposés au titre des diligences -date qui n'était pas certaine-, la cour d'appel viole les règles et principes qui s'évincent de l'article 1315 du Code civil, ensemble ledit texte ;
Mais attendu que l'arrêt relève que la société fait vainement état de deux courriers prétendument adressés par son avoué à l'avoué de la compagnie et que ces courriers joints à un bordereau du 21 janvier 1996 n'ont pas date certaine avant l'expiration du délai de péremption ;
Qu'en l'état de ces seules énonciations, la cour d'appel n'a fait, hors de toute violation de l'article 386 du nouveau Code de procédure civile, qu'exercer son pouvoir d'apprécier les éléments de preuve qui lui étaient soumis ;
Et attendu que la cour d'appel a exactement retenu que la charge de la preuve des diligences interruptives du délai de péremption incombait à la société qui prétendait les avoir accomplies ;
D'où il suit que le moyen, pour partie inopérant, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Maison Pairot aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Deuxième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du sept janvier mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.