AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Joseph X..., demeurant ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 29 février 1996 par la cour d'appel de Versailles (13e chambre), au profit de Mme Laurence Y..., demeurant ..., prise en sa qualité de liquidateur à la liquidation judiciaire de la société à responsabilité limitée DBN Pivert,
défenderesse à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 10 novembre 1998, où étaient présents : M. Bézard, président, Mme Aubert, conseiller rapporteur, M. Grimaldi, conseiller, Mme Piniot, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mme Aubert, conseiller, les observations de la SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde, avocat de M. X..., les conclusions de Mme Piniot, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu les articles 182, 188, 189 et 192 de la loi du 25 janvier 1985 dans sa rédaction antérieure à la loi du 10 juin 1994 applicable en la cause ;
Attendu que si, en vertu du dernier de ces textes, le Tribunal peut prononcer, à la place de la faillite personnelle, l'interdiction de diriger, gérer, administrer ou contrôler dans l'un des cinq cas visés à l'article 189, il résulte de l'article 188 que la faillite personnelle est seule encourue par le dirigeant d'une personne morale qui a commis l'un des actes mentionnés à l'article 182 ;
Attendu que pour confirmer, à l'égard de M. X..., la décision d'interdiction de diriger, gérer, administrer et contrôler pendant une période de dix ans, la cour d'appel a énoncé que M. X... avait poursuivi une activité déficitaire parvenant artificiellement à réduire les pertes par la création de dettes fiscales et sociales au moyen de mesures de restructuration qui ont aggravé les charges sans apporter la contrepartie d'un chiffre d'affaires suffisant ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la législation applicable étant celle antérieure à la loi du 10 juin 1994, dès lors que la procédure de redressement judiciaire avait été ouverte le 14 février 1991, la poursuite abusive d'une exploitation déficitaire qui ne peut conduire qu'à la cessation des paiements ne pouvait être sanctionnée que par la faillite personnelle, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 29 février 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Versailles ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel d'Amiens ;
Condamne Mme Y..., ès qualités, aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du cinq janvier mil neuf cent quatre-vingt-dix-neuf.