AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1 / la société UCAR, société en nom collectif, dont le siège est ...,
2 / la société Carbone Savoie SAS, dont le siège est ...,
en cassation d'un jugement rendu le 7 mai 1997 par le tribunal d'instance de Moûtiers, au profit :
1 / de M. Jean Z..., demeurant ...,
2 / de M. Pascal X..., demeurant ...,
défendeurs à la cassation ;
EN PRESENCE :
1 / de M. Alain C..., Carbone Savoie, demeurant ...,
2 / de M. Patrice E..., Carbone Savoie, demeurant ...,
3 / de M. Denis D..., UCAR demeurant, 73260 Notre-Dame-de-Briançon,
4 / de M. Gérard B..., UCAR, demeurant 73260 Notre-Dame-de-Briançon,
5 / de M. Jean-François Y..., UCAR, demeurant 73260 Notre-Dame-de-Briançon,
6 / de M. Jean Claude A..., demeurant ...,
LA COUR, en l'audience publique du 3 novembre 1998, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, Mlle Barberot, conseiller référendaire rapporteur, MM. Waquet, Carmet, Boubli, Le Roux Cocheril, Ransac, Chagny, Bouret, conseillers, M. Frouin, Mmes Girard, Lebée, M. Richard de la Tour, Mme Andrich, conseillers référendaires, M. Lyon-Caen, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de Mlle Barberot, conseiller référendaire, les observations de Me Delvolvé, avocat des sociétés UCAR et Carbone Savoie, SAS, les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu qu'à la suite d'accords au niveau des groupes UCAR et Péchiney, la SA Carbone Savoie, filiale de Péchiney ayant pour activité la fabrication de cathodes de carbone dans deux établissements, Notre-Dame-de-Briançon (255 salariés) et Vénissieux (105 salariés), devenue Carbone Savoie SAS, n'a plus conservé que 36 salariés et les activités de commercialisation des produits du carbone dans une partie du site de Vénissieux, tandis que tout le reste de son personnel a été transféré à la société UCAR SNC, filiale du groupe UCAR international qui exerce son activité dans le domaine des produits du graphite ; que, postérieurement à cette restructuration, M. Z... a été désigné en qualité de délégué syndical central de l'unité économique et sociale formée par ces deux sociétés, ainsi que représentant au futur comité central d'entreprise ;
Sur le premier moyen :
Attendu que les sociétés UCAR SNC et Carbone Savoie SAS font grief au jugement (tribunal d'instance de Moutiers, 7 mai 1997) d'avoir constaté l'existence d'une unité économique et sociale entre elles, d'avoir validé la désignation de M. Z... en qualité de délégué syndical central de cette unité économique et sociale et de représentant au futur comité central d'entreprise, et d'avoir enjoint aux parties d'engager les négociations en vue des élections professionnelles ;
alors, selon le moyen, qu'en violation des articles L. 412-15, R. 423-3, R. 433-4 et R. 435-1 du Code du travail, le tribunal d'instance n'avait pas convoqué les divers syndicats des sociétés en cause, mais seulement des personnes physiques et qu'en particulier, le syndicat FO de la société UCAR SNC n'avait pas été convoqué ;
Mais attendu que les parties qui n'ont pas été convoquées à l'audience peuvent seules se prévaloir de cette omission pour faire annuler la décision ; que le moyen ne peut être accueilli ;
Sur le deuxième moyen :
Attendu que les sociétés font encore grief au jugement d'avoir ainsi statué, alors d'une part que, en violation de l'article 455 du nouveau Code de procédure civile, le tribunal d'instance n'a pas répondu aux conclusions des sociétés suivant lesquelles l'opération avait été réalisée dans le cadre de l'alliance conclue entre la société UCAR Holding et la société Péchiney, et que celle-ci était restée actionnaire de la société Carbone Savoie, SAS, avec une participation de 30 % dans son capital et des droits importants que les statuts de cette société préservaient, ce qui était de nature à exclure l'existence d'une entité économique entre la société UCAR SNC et la société Carbone Savoie SAS ; alors, d'autre part que, en violation de l'article 1134 du Code civil, le tribunal d'instance a dénaturé la note d'information sur ce projet d'alliance, en date du 21 octobre 1996, qu'en effet il n'a pas tenu compte des énonciations de cette note concernant les droits importants qu'avait conservé la société Péchiney au sein de la société Carbone Savoie SAS et qui faisaient obstacle à la reconnaissance d'une unité économique et sociale entre celle-ci et la société UCAR SNC ; alors, en outre que, en violation des articles L. 412-12, L. 421-1, L. 431-1 et L. 435-1 du Code du travail, il n'a pas tiré toutes les conséquences de ses constatations suivant lesquelles l'entreprise UCAR avait par ailleurs d'autres activités différentes pour lesquelles l'unité économique pourrait être a priori moins évidente ;
Mais attendu qu'après avoir constaté entre les deux sociétés, la concentration des pouvoirs de direction, la complémentarité de leurs activités, l'unité de gestion du personnel qui relevait d'un directeur des ressources humaines unique et était soumis à un même règlement intérieur et à une même convention collective, le tribunal d'instance a pu en déduire, sans encourir les griefs du moyen, l'existence d'une unité économique et sociale entre ces deux sociétés ; que le moyen n'est fondé en aucune de ces branches ;
Sur le troisième moyen :
Attendu que les sociétés font encore grief au jugement d'avoir validé la désignation de M. Z... en qualité de représentant au futur comité central d'entreprise de cette unité économique et sociale, alors, selon le moyen, que le tribunal d'instance a violé l'article L. 435-4, dernier alinéa du Code du travail selon lequel un représentant syndical au comité central d'entreprise ne peut être choisi que parmi les représentants de l'organisation syndicale aux comités d'établissement ou parmi les membres élus de ces comités et qu'une telle désignation ne peut être faite avant que les comités d'établissement et le comité central de la nouvelle unité aient été constitué ;
Mais attendu qu'il ne résulte ni du jugement ni des conclusions des sociétés que ce moyen ait été invoqué devant le juge du fond ; que, dès lors, celui-ci est nouveau et, mélangé de fait et de droit, irrecevable ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du seize décembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.