AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1 / la compagnie d'assurances Helvetia, dont le siège social est ...,
2 / la société Indubois, dont le siège social est ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 7 mai 1996 par la cour d'appel de Montpellier (2ème chambre, section B), au profit de la société Delmas, société anonyme, dont le siège social est ...,
défenderesse à la cassation ;
Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 27 octobre 1998, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Rémery, conseiller référendaire rapporteur, MM. Grimaldi, Apollis, Tricot, Badi, Mme Aubert, M. Armand-Prevost, Mmes Vigneron, Tric, conseillers, Mmes Geerssen, Graff, conseillers référendaires, M. Raynaud, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Rémery, conseiller référendaire, les observations de Me Le Prado, avocat de la compagnie d'assurances Helvetia et de la société Indubois, de Me Foussard, avocat de la société Delmas, les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu l'article 1134 du Code civil ;
Attendu, selon l'arrêt attaqué, rendu sur contredit de compétence, que des grumes ont été chargées au port de San Pedro (Côte d'ivoire) à bord du navire "X... Sky" en vue de leur transport par voie maritime jusqu'au port de Sète par la société Maritime Delmas Vieljeux, devenue la société Delmas ; qu'un manquant ayant été constaté à l'arrivée, la société Indubois, qui en était destinataire, a été partiellement indemnisée par son assureur, la compagnie Helvetia ; que celle-ci, dans la mesure de sa subrogation, et la société Indubois, pour la partie du préjudice restant à sa charge, ont assigné en réparation la société Delmas devant le tribunal de commerce de Sète, dont la compétence a été déclinée par le transporteur maritime sur le fondement d'une clause du connaissement attribuant compétence au tribunal de commerce de Paris ;
Attendu que pour accueillir cette exception, l'arrêt, après avoir relevé qu'un mandataire de la société Indubois avait apposé sur le connaissement, outre sa signature, la mention "accompli", retient que par cette mention, le destinataire avait adhéré au contrat de transport, non pas seulement en son principe, mais qu'il en avait accepté toutes les clauses particulières, dont celle attributive de compétence territoriale ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que la clause de compétence figurant au connaissement doit faire l'objet d'une acceptation spéciale de la part du destinataire, laquelle ne résulte pas de l'accomplissement sans réserves du connaissement, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 7 mai 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Montpellier ;
remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Bordeaux ;
Condamne la société Delmas aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de la société Delmas ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du huit décembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.