Statuant tant sur le pourvoi principal formé par la société à responsabilité limitée Marcel Chambon et compagnie et M. Urbain, commissaire à l'exécution de son plan, que sur le pourvoi incident relevé par M. X... ;
Attendu, selon l'arrêt déféré (Limoges, 22 mai 1995), qu'après la mise en redressement judiciaire de la société à responsabilité limitée Marcel Chambon et compagnie (la SARL) le 5 janvier 1990, le Tribunal, retenant l'offre présentée par M. X... tant en son nom personnel que pour le compte d'une société à constituer, a adopté, le 11 juillet 1990, un plan de redressement de l'entreprise, par cession, prévoyant la cession du fonds de commerce au prix de 100 000 francs, la cession des stocks de produits finis et de matières premières, et donnant acte à M. X... de la poursuite des contrats de crédit-bail ainsi que de trente et un contrats de travail ; qu'après la cession du fonds de commerce à la société anonyme Chambon (la SA), constituée entre-temps, cette dernière société a été mise en redressement judiciaire le 4 novembre 1992 ; que la SARL et le commissaire à l'exécution de son plan, lequel a déclaré à la procédure collective de la SA une créance d'un montant de 1 299 208,63 francs, ont demandé que M. X... soit personnellement condamné à leur payer cette somme ;
Sur le moyen unique du pourvoi incident, pris en ses deux branches, qui est préalable :
Attendu que M. X... reproche à l'arrêt d'avoir rejeté sa fin de non-recevoir dont il résultait qu'il n'était pas personnellement engagé par le plan de cession adopté par le Tribunal, alors, selon le pourvoi, d'une part, que l'autorité de la chose jugée qui s'attache à une décision de justice définitive ne peut être remise en cause à l'occasion d'un litige né de l'exécution de cette décision ; qu'en l'espèce, en retenant l'offre présentée par M. X... " tant en son nom personnel que pour le compte d'une société à constituer ", le jugement du 11 juillet 1990 avait expressément autorisé la substitution qui est intervenue ensuite lorsque la vente a été réalisée au profit de la seule société constituée à cette fin par M. X... ; qu'en décidant que ce dernier demeurait personnellement engagé par le plan de cession, au motif qu'il n'établissait pas avoir été déchargé de ses obligations, la cour d'appel a violé l'article 1351 du Code civil ; et alors, d'autre part, que lorsqu'un jugement arrête un plan de cession de fonds de commerce présenté par une personne physique tant en son nom personnel que pour le compte d'une société à constituer, le commissaire à l'exécution du plan, qui cède le fonds à la seule société constituée à cet effet, décharge nécessairement la personne physique de toutes ses obligations devenues sans contrepartie ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ;
Mais attendu qu'en application de l'article 62 de la loi du 25 janvier 1985, le plan désigne les personnes tenues de l'exécuter et mentionne l'ensemble des engagements qui ont été souscrits par elles et qui sont nécessaires au redressement de l'entreprise ; que, dès lors, si l'offre de cession est assortie d'une faculté de substitution, celle-ci, qui ne peut être exercée qu'en cas d'accord du Tribunal, ne décharge pas son auteur de ses obligations ;
Attendu que, saisi du litige portant sur l'obligation de M. X..., repreneur substitué, de garantir l'exécution du plan après la reprise par la SA substituante, la cour d'appel a énoncé, à bon droit, que l'auteur de l'offre demeurait personnellement engagé par le plan de cession adopté par le Tribunal ;
D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
Et sur le moyen unique du pourvoi principal, pris en ses deux branches :
Attendu que la SARL et le commissaire à l'exécution de son plan reprochent à l'arrêt d'avoir rejeté leur demande de paiement, alors, selon le pourvoi, d'une part, que le repreneur dont l'offre a été retenue par le jugement arrêtant le plan de cession est tenu d'exécuter ce plan ; que l'arrêt constate que M. X... est personnellement engagé par le plan de cession qu'il a présenté et qui a été arrêté par le Tribunal ; qu'en énonçant que la SARL et le commissaire à l'exécution de son plan n'apportent aucune justification de leur créance en paiement du prix de cession, la cour d'appel n'a pas déduit de ses propres constatations les conséquences qui en résultaient, violant ainsi, par refus d'application, l'article 62 de la loi du 25 janvier 1985 ; et alors, d'autre part, qu'il appartient au débiteur qui se prétend libéré de justifier de l'exécution de ses obligations ; qu'en retenant, à l'appui de sa décision, que la SARL et le commissaire à l'exécution de son plan n'apportaient aucune justification de l'exécution du plan, la cour d'appel a violé l'article 1315 du Code civil ;
Mais attendu qu'en application de l'article 1315 du Code civil, celui qui réclame l'exécution d'une obligation doit la prouver ; qu'il résulte des productions que l'acte de vente du fonds de commerce à la SA, établi en exécution du jugement du 11 juillet 1990, dispose que " les produits finis et matières premières figurant en stock ont fait l'objet d'un inventaire contradictoire entre les parties à la date du 15 juillet 1990 et seront valorisés et cédés à la société acquéreur dans les conditions et selon les modalités ci-après fixées " ; que faute par la SARL et le commissaire à l'exécution de son plan de rapporter la preuve de cette cession, en dépit de la déclaration de créance au passif de la SA, la cour d'appel, en rejetant leur demande, n'a violé aucun des textes cités au moyen ; que celui-ci n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE les pourvois tant principal qu'incident.