CASSATION PARTIELLE sur le pourvoi formé par :
- Y... Jean-Charles,
contre l'arrêt de la cour d'appel de Nîmes, chambre correctionnelle, en date du 20 juin 1997, qui, pour abus de confiance, l'a condamné à 7 mois d'emprisonnement avec sursis et a prononcé sur les réparations civiles.
LA COUR,
Vu le mémoire produit ;
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation de l'article 408 ancien du Code pénal, 593 du Code de procédure pénale, défaut de motifs, manque de base légale :
" en ce que l'arrêt attaqué a déclaré le prévenu coupable d'abus de confiance et l'a condamné pénalement et civilement ;
" aux motifs que celui-ci ne peut se retrancher derrière une éventuelle anomalie de gestion de la BNP au moment de la liquidation de la société, alors que l'abus de confiance était réalisé avant la mise en liquidation de celle-ci ; que les premiers juges ont caractérisé l'usage abusif que le prévenu a fait des fonds qui ne lui avaient été remis qu'à titre de mandat, à charge d'en faire un emploi déterminé ; qu'il a sciemment modifié l'affectation des sommes ainsi remises en ne les déposant pas sur un compte distinct de celui de la société, et les a utilisées de fait comme trésorerie pour celle-ci, dont il connaissait la situation précaire ainsi que les risques liés à un état de liquidation judiciaire qui n'a pas manqué de se concrétiser ; qu'il ne peut davantage s'abriter derrière la prétendue incompétence de ses salariés ; qu'il n'y a pas lieu à complément d'information ;
" alors que, d'une part, ni la preuve d'un déficit d'exploitation d'un fonds de commerce, ni l'usage de la chose confiée ne suffisent à caractériser l'abus de confiance ; qu'en déclarant le prévenu coupable d'abus de confiance au motif que les fonds confiés à la société qu'il gérait étaient entrés dans la trésorerie de celle-ci, qui avait été ensuite mise en liquidation judiciaire, et en estimant qu'il aurait dû déposer les sommes sur un compte distinct de celui de la société, sans préciser d'où résultait cette obligation, et sans caractériser un quelconque usage frauduleux desdites sommes, la cour d'appel a privé sa décision de base légale ;
" alors que, d'autre part, en se bornant à énoncer que le prévenu ne pouvait se retrancher derrière une éventuelle anomalie de gestion de la BNP au moment de la liquidation judiciaire, puisque l'abus de confiance était antérieur, sans s'en expliquer davantage, et en particulier répondre aux conclusions du prévenu faisant valoir que l'absence de restitution des fonds existants à l'actif du compte en banque au moment de la liquidation ne lui incombait pas, la cour d'appel a privé sa décision des motifs propres à la justifier " ;
Attendu qu'il appert de l'arrêt attaqué et du jugement qu'il confirme, que Jean-Charles Y..., gérant de la société de gestion immobilière Sogénim, qui collectait auprès des locataires de l'immeuble sis..., les loyers et autres dépenses locatives à charge de les reverser aux propriétaires, a confondu et utilisé les fonds ainsi recueillis entre janvier 1990 et septembre 1991 avec ceux de l'agence qu'il dirigeait, alors qu'il n'ignorait pas que celle-ci se trouvait en difficulté financière, devant être déclarée en liquidation judiciaire par un jugement du 21 octobre 1992, la cessation des paiements étant fixée au 21 avril 1991 ;
Attendu qu'en l'état de ces motifs, exempts d'insuffisance ou de contradiction, la cour d'appel qui a répondu comme elle le devait aux conclusions dont elle était saisie, a caractérisé en tous ses éléments constitutifs tant matériels qu'intentionnel le délit d'abus de confiance dont elle a déclaré le prévenu coupable ;
D'où il suit que le moyen ne peut être accueilli ;
Mais sur le second moyen de cassation, pris de la violation des articles 2, 418, 593 du Code de procédure pénale, 1382 du Code civil, défaut et contradiction de motifs :
" en ce que l'arrêt attaqué, tout en constatant que les parties civiles X... et Z... sont décédées, a néanmoins condamné le prévenu à leur payer des indemnités en réparation du préjudice qu'il leur aurait causé, sans constater que l'action civile ait été reprise par leurs ayants droit " ;
Vu les articles 2 et 3 du Code de procédure pénale ;
Attendu qu'il résulte de ces textes que les juges ne peuvent réparer le préjudice causé à une partie civile décédée en cours de procédure que si l'instance a été reprise par ses ayants droit ;
Attendu qu'après avoir constaté en cause d'appel le décès de Raymond X... et Reine Z..., qui s'étaient constitués parties civiles en première instance et avaient obtenu l'allocation des sommes de 26 620 francs et 9 660 francs à titre de dommages-intérêts mis à la charge du prévenu, la cour d'appel, confirmant le jugement entrepris, a maintenu lesdites dispositions ;
Mais attendu qu'en se déterminant de la sorte alors qu'il ne résultait d'aucunes conclusions qu'à la suite de leurs décès l'instance engagée par lesdites parties civiles eût été reprise par leurs héritiers, la cour d'appel, a méconnu les textes susvisés ;
D'où il suit que la cassation est encourue de ce chef ;
Par ces motifs :
CASSE ET ANNULE l'arrêt de la cour d'appel de Nîmes, en date du 20 juin 1997, en ses seules dispositions relatives aux réparations civiles accordées à Raymond X... et Reine Z..., toutes autres dispositions étant exprèssement maintenues ;
RENVOIE la cause et les parties devant la cour d'appel de Nîmes autrement composée.