AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société Frio surgelés, société anonyme, aux droits de laquelle se trouve la société Meijac, société anonyme, dont le siège est ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 17 février 1995 par la cour d'appel de Toulouse (4e chambre sociale), au profit de M. Serge X..., demeurant ...,
défendeur à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 13 octobre 1998, où étaient présents : M. Waquet, conseiller doyen faisant fonctions de président et rapporteur, MM. Finance, Texier, Mme Lemoine-Jeanjean, conseillers, Mmes Trassoudaine-Verger, Duval-Arnould, conseillers référendaires, M. Terrail, avocat général, Mme Marcadeux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Waquet, conseiller, les observations de Me Luc-Thaler, avocat de la société Meijac venant aux droits de la société Frio surgelés, les conclusions de M. Terrail, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur les deux moyens réunis :
Attendu que M. X..., engagé le 7 mai 1989, comme responsable d'un centre de distribution de produits alimentaires, par la société Frio surgelés, aux droits de laquelle se trouve la société Meijac, a été licencié le 17 juin 1992 pour faute lourde ;
Attendu que l'employeur fait grief à l'arrêt attaqué (Toulouse, 17 février 1995) de l'avoir condamné à payer les indemnités de rupture et une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ainsi que d'avoir ordonné une expertise pour déterminer les rappels de salaire en donnant mission à l'expert d'apporter une aide technique aux parties en vue d'une transaction, alors que, selon le pourvoi, de première part, la cour d'appel, qui a reconnu expressément la qualité d'employeur à la société Frio surgelés, pour condamner ensuite la société Meijac comme elle l'a fait, sans constater l'existence d'un contrat de travail entre cette dernière société et M. X..., a privé sa décision de base légale au regard de l'article L. 121-1 du Code du travail ; alors que, de deuxième part, en statuant dans ces conditions, sans rechercher si, comme elle y était invitée, l'absence de citation en conciliation de la société Meijac ne constituait pas un vice substantiel de la procédure, la cour d'appel n'a pas donné de base légale au regard de l'article R. 516-13 du Code du travail ; alors que, de troisième part, le juge se doit de vérifier la réalité des faits et du motif invoqués par l'employeur à l'appui du licenciement ; qu'en l'espèce, selon les conclusions de l'employeur, M. X... avait avoué au cours de l'enquête de police préliminaire sa participation au délit ayant motivé son licenciement pour faute lourde, si bien qu'en refusant d'ordonner la communication du dossier pénal auquel la société Meijac n'avait pas accès avant de se constituer partie civile, la cour d'appel a violé l'article L. 122-14-3 du Code du travail ; alors que, de quatrième part, à aucun moment de la procédure l'employeur n'a proposé de transiger avec M. X... à l'effet de
l'indemniser du montant de ses demandes de rappels de salaire, si bien qu'en donnant mission sur ce point à l'expert afin d'apporter une aide technique aux parties utile à l'élaboration d'une transaction, la cour d'appel a méconnu les termes du litige et violé l'article 12 du nouveau Code de procédure civile ; alors qu'enfin, le contrat de travail du salarié ne stipulait pas en sa faveur le paiement de primes qualifiées de contractuelles par l'arrêt, si bien qu'en ne précisant pas si ces gratifications trouvaient leur origine dans la convention collective applicable ou un usage dans l'entreprise présentant les caractères de constance, de généralité et de fixité, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision au regard de l'article L. 140-1 du Code du travail ;
Mais attendu, d'abord, s'agissant des quatrième et cinquième griefs susénoncés concernant la mission d'expertise ordonnée par l'arrêt, que le pourvoi, en tant qu'il vise ce chef du dispositif, est irrecevable en application des articles 606 et 608 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu, ensuite, que les premier et deuxième griefs susénoncés manquent en fait, le mémoire ampliatif déposé au nom des sociétés Frio surgelés et Meijac reconnaissant que la société Meijac est aux droits de la société Frio surgelés ;
Et attendu, enfin, qu'appréciant les éléments de preuve contradictoirement discutés devant elle, la cour d'appel, qui n'était pas tenue d'ordonner la communication d'un dossier pénal, a estimé que les faits reprochés au salarié n'étaient pas établis ;
D'où il suit qu'aucune des critiques du pourvoi ne peut être accueillie ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la société Meijac venant aux droits de la société Frio surgelés aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-quatre novembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.