AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1 / l'ASSEDIC de Bourgogne, dont le siège est ...,
2 / l'AGS, dont le siège est ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 6 juin 1995 par la cour d'appel de Dijon (1ère chambre, section 1), au profit :
1 / de M. X... principal des Impôts de Dijon-Nord, dont le siège est Hôtel des Impôts, ...,
2 / de M. Philippe Y..., domicilié ..., ès qualité de mandataire liquidateur de la liquidation judiciaire de la société Service hôtelier,
défendeurs à la cassation ;
Les demanderesses invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 13 octobre 1998, où étaient présents : M. Grimaldi, conseiller le plus ancien, faisant fonctions de président, M. Armand-Prevost, conseiller rapporteur, M. Apollis, conseiller, M. Jobard, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Armand-Prevost, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de l'ASSEDIC de Bourgogne, de l'AGS, de Me Foussard, avocat de M. le receveur principal des impôts de Dijon-Nord, les conclusions de M. Jobard, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu, selon l'arrêt déféré (Dijon,6 juin 1995), que la société Service hôtelier, en redressement judiciaire, n'ayant pas acquitté la TVA due pendant la période d'observation, le receveur des impôts de Dijon-Nord a notifié des avis à tiers détenteur à plusieurs clients de la société débitrice ; que M. Y..., ès qualités de représentant des créanciers a adressé une réclamation au directeur des services fiscaux tendant à obtenir la mainlevée de ces avis à tiers détenteurs au motif que la créance superprivilégiée de l'Assurance de garantie des salaires de Bourgogne (AGS) devait être payée avant la créance du Trésor public ;
qu'après le rejet de cette réclamation, le représentant des créanciers a saisi le juge de l'exécution, qui a prononcé la nullité des avis à tiers détenteur ;
Attendu que les ASSEDIC et l'AGS font grief à l'arrêt d'avoir constaté la validité des avis à tiers détenteurs délivrés le 16 décembre 1993 par le receveur divisionnaire des impôts de Dijon-Nord et dénoncés le 26 décembre à M. Y..., ès qualités, alors, selon le pourvoi, d'une part, que les créances superprivilégiées de salaires l'emportent de plein droit sur toutes les autres créances même celles nées régulièrement après le jugement d'ouverture d'une procédure collective, que celles-ci aient ou non fait l'objet d'une mesure d'exécution forcée ; qu'en refusant de conférer à l'AGS, subrogée dans les droits des créanciers superprivilégiés, la priorité absolue de paiement sur une créance fiscale née pendant la période d'observation et donc postérieurement à la naissance de la créance superprivilégiée, dès lors que le receveur des impôts de Dijon-Nord avait exercé son droit de poursuite antérieurement à l'AGS, la cour d'appel a violé l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985 ; et alors, d'autre part, que c'est à la date de la mesure d'exécution forcée diligentée par un créancier de l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985 qu'il convient de se placer pour examiner si le solde du compte de liquidation est suffisant pour apurer une telle créance après paiement des créances salariales superprivilégiées ; qu'en n'appréciant pas le solde de liquidation de la société Service hôtelier à la date de notification de l'avis à tiers détenteur émis par le receveur des impôts de Dijon-Nord, la cour d'appel a derechef violé l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985 ;
Mais attendu qu'après avoir exactement énoncé que la créance fiscale née au cours de la période d'observation a fait l'objet d'avis à tiers détenteur qui ont un effet d'attribution immédiate des fonds détenus par les tiers pour le compte du contribuable et de ceux qu'ils peuvent lui devoir, l'arrêt, qui relève que seul le receveur des impôts avait engagé une mesure d'exécution forcée, en a justement déduit que le premier saisissant est le premier payé et décidé que les avis à tiers détenteurs étaient valides, peu important l'existence d'autres créances bénéficiant d'un rang préférentiel dans l'ordre de classement établi par l'article 40 de la loi du 25 janvier 1985, sans que la cour d'appel ait à rechercher si des fonds étaient disponibles pour payer le créancier saisissant et celui dont le rang était prioritaire ; d'où il suit que surabondant en sa seconde branche, le moyen est mal fondé en sa première branche ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne l'ASSEDIC de Bourgogne et l'AGS aux dépens ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par M. le conseiller le plus ancien faisant fonctions de président en son audience publique du vingt-quatre novembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.