AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Y... Général des Impôts, Ministère de l'Economie et des Finances, domicilié ...,
en cassation d'un jugement rendu le 9 janvier 1995 par le tribunal de grande instance d'Auxerre, au profit de M. Bernard X..., demeurant ... Auxerroise, 89200 Avallon,
défendeur à la cassation ;
Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 6 octobre 1998, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Huglo, conseiller référendaire rapporteur, M. Nicot, conseiller, Mme Piniot, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Huglo, conseiller référendaire, les observations de Me Thouin-Palat, avocat de M. Y... Général des Impôts, de la SCP Guiguet, Bachellier et Potier de la Varde, avocat de M. X..., les conclusions de Mme Piniot, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le premier moyen, pris en sa quatrième branche :
Vu l'article 95 du Traité instituant la Communauté européenne ;
Attendu, selon le jugement déféré, que M. X... propriétaire d'un véhicule automobile d'une puissance fiscale de plus de 18 chevaux, a, après le rejet de sa réclamation le 13 juillet 1993, assigné le Directeur des services fiscaux devant le tribunal de grande instance pour obtenir la restitution de la taxe différentielle acquittée au titre des années 1991 à 1993 ;
Attendu que, pour accueillir cette demande, le Tribunal retient que le Directeur des services fiscaux qui invoque la circulaire du 12 janvier 1988 qui supprime la limitation du facteur K dans le mode de calcul de la puissance fiscale n'explique pas en quoi la modification de ce seul élément serait propre à répondre intégralement à la critique de la Cour de justice des Communautés européennes ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que, dans son arrêt du 17 septembre 1987 (Feldain), la Cour de justice des Communautés européennes a seulement jugé incompatible avec l'article 95 du Traité la limitation du facteur K dans le mode de calcul de la puissance fiscale introduite par la circulaire du ministre de l'Equipement du 23 décembre 1977 ; qu'il en résulte que la taxe perçue en 1991, 1992 et 1993 sur des véhicules dont le mode de calcul de la puissance fiscale n'a pas subi cette limitation est compatible avec l'article 95 dudit Traité et qu'il appartenait dès lors à M. X... de démontrer que, malgré les dispositions des circulaires du 12 janvier 1988 et du 20 septembre 1991, la puissance fiscale de son véhicule avait été déterminée de façon incompatible avec l'article 95 du Traité, le Tribunal a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS, et sans qu'il y ait lieu de statuer sur les autres griefs ;
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, le jugement rendu le 9 janvier 1995, entre les parties, par le tribunal de grande instance d'Auxerre ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit jugement et, pour être fait droit, les renvoie devant le tribunal de grande instance de Sens ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite du jugement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept novembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.