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17/11/1998 | FRANCE | N°96-16799

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 17 novembre 1998, 96-16799


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Befs Technologies, société anonyme, dont le siège est ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 11 avril 1996 par la cour d'appel de Paris (16e chambre, section B), au profit de la société Cargocaire France, société anonyme, dont le siège est ...,

défenderesse à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 6 octobre 1998, où étaient présents : M. Bézard, président, Mme Gar...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par la société Befs Technologies, société anonyme, dont le siège est ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 11 avril 1996 par la cour d'appel de Paris (16e chambre, section B), au profit de la société Cargocaire France, société anonyme, dont le siège est ...,

défenderesse à la cassation ;

La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, en l'audience publique du 6 octobre 1998, où étaient présents : M. Bézard, président, Mme Garnier, conseiller rapporteur, MM. Nicot, Vigneron, Leclercq, Dumas, Léonnet, Poullain, Métivet, conseillers, M. Huglo, Mme Mouillard, conseillers référendaires, Mme Piniot, avocat général, Mme Moratille, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Garnier, conseiller, les observations de la SCP Piwnica et Molinié, avocat de la société Befs Technologies, de Me Parmentier, avocat de la société Cargocaire France, les conclusions de Mme Piniot, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon les énonciations de l'arrêt attaqué (Paris, 11 avril 1996), que la société Befs Technologies (société Befs) s'est rendue acquéreur en 1989 pour le prix de un franc d'un fonds de commerce de récupération et élimination des solvants contenus dans les effluents gazeux exploité par la société Cargocaire sous l'enseigne Asolvair, qu'elle a pris en charge l'ensemble des obligations contractuelles ainsi que la responsabilité juridique et financière des affaires en cours, en promettant de lui reverser à mesure de l'exécution de ces contrats les sommes restant dues par les clients ; que la société Cargocaire lui a, de son côté, garanti qu'il n'y avait ni litige en suspens, ni contentieux pouvant affaiblir la valeur de la branche d'activité cédée et s'est engagée à payer la somme forfaitaire de 940 000 francs ; que la société Befs, faisant valoir qu'elle avait rencontré d'importantes difficultés à l'occasion de l'exécution d'un contrat Cebal-société Péchiney-emballage alimentaire, l'ayant obligée à exposer des frais supplémentaires, l'a assignée en paiement de dommages et intérêts ;

Sur le premier moyen, pris en ses trois branches :

Attendu que la société Befs fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande, alors, selon le pourvoi, d'une part, qu'aux termes des articles 2-4 de la convention du 28 octobre 1989 formée entre elle et la société Cargocaire, elle s'est engagée à prendre à sa charge l'ensemble des obligations contractuelles ainsi que la responsabilité globale juridique et financière de la totalité des affaires en cours définies à l'annexe 3, jusqu'à l'expiration de leurs périodes de garantie de sorte que la société Cargocaire ne soit jamais inquiétée, qu'elle s'est engagée à procéder à l'achèvement complet des chantiers en cours au 31 octobre 1989 et à les faire cautionner conformément aux dispositions contractuelles autorisant la libération des termes de garantie, qu'elle s'est engagée à apporter toute la diligence voulue sur ces points et à transmettre les obligations nécessaires à la société Cargocaire pour établir ces factures aux échéances contractuelles, qu'elle a également accepté de se substituer à la société Cargocaire dans ses obligations de garantie et de cautionnement concernant les affaires terminées avant le 31 octobre 1989, affaires répertoriées en annexe sur la liste n' 4, étant précisé "que ces prises en charge ne couvrent pas la "responsabilité civile de la société Cargocaire qui pourrait "être mise en cause relativement à l'exploitation de son "activité Asolvair antérieure à la cession" ; qu'en retenant, pour la débouter de sa demande en réparation du préjudice généré par le fait d'avoir dû assumer, à l'égard des clients de la société Cargocaire, des obligations contractuelles ainsi que de garantie à raison des erreurs de conception et des fautes commises par la société Cargocaire avant la cession, que la faculté de mettre en cause la responsabilité civile de Cargocaire relativement à l'exploitation de son activité Asolvair avant la cession ne couvrait pas les erreurs de conception et d'exécution commises avant la cession sur les affaires en cours, la cour d'appel a, en statuant ainsi, méconnu la loi des parties qui lui imposait, à l'égard des clients de la société Cargocaire de se substituer à elle dans l'exécution de ses obligations contractuelles et de garantie mais laissait, dans les rapports entre cédant et cessionnaire, la faculté au cessionnaire de mettre en cause la responsabilité civile de la société Cargocaire pour les erreurs commises par elle dans l'exploitation de l'activité cédée ; qu'en statuant ainsi, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ; alors, d'autre part, que l'article 2-4 de la convention formée entre elle et la société Cargocaire énonçant qu'elle s'engageait à prendre à sa charge l'exécution de différentes obligations contractuelles pesant sur la société Cargocaire ainsi que les obligations de garantie et ce, aussi bien pour les affaires en cours au 31 décembre 1989 que pour les affaires achevées à cette même date de telle manière que la société Cargocaire ne soit jamais inquiétée, la cour d'appel ne pouvait, sans méconnaître la loi des parties, affirmer que les prises en charge ainsi assumées par elle ne portaient que sur l'acceptation de se substituer à la société Cargocaire dans ses obligations de garantie et de cautionnement relatives aux affaires terminées et excluaient les obligations contractuelles pesant sur la société Cargocaire pour les affaires en cours au 31 octobre 1989 ;

qu'en statuant ainsi, pour lui dénier la faculté d'agir en responsabilité contre son cocontractant, la société Cargocaire, la cour d'appel a violé l'article 1134 du Code civil ; alors, enfin, qu'elle-même et la société Cargocaire ayant, par leur convention, opéré une distinction entre les obligations contractuelles qu'elle s'engageait à exécuter à l'égard des clients de la société Cargocaire et étant convenu de ce qu'elle assumerait les obligations de garantie que les cocontractants de la société Cargocaire seraient susceptibles de mettre en oeuvre, la cour d'appel ne pouvait sans méconnaître la loi des parties, refuser d'opérer une distinction entre d'un côté, les obligations contractuelles et de garantie qu'elle s'engageait à assumer à l'égard des clients de la société Cargocaire et d'un autre côté la responsabilité civile de la société Cargocaire à raison des fautes commises par elle avant la cession de son activité Asolvair, responsabilité qu'elle, en exécution du contrat et conformément au droit commun était en droit de mettre en cause ; qu'en n'opérant pas de distinction entre ses obligations à l'égard des clients de la société Cargocaire à laquelle elle succédait aussi bien pour les affaires en cours que pour les affaires terminées, et la responsabilité de la société Cargocaire à son égard à raison des fautes commises par la première avant la cession, la cour d'appel qui, sur le fondement de cette confusion, l'a déboutée de son action en réparation formée contre la société Cargocaire a, en statuant ainsi, violé l'article 1134 du Code civil ;

Mais attendu que répondant à la demande des parties, qui ne s'accordaient pas sur le contenu des clauses contractuelles, la cour d'appel, par l'interprétation souveraine desdites clauses, a rejeté la demande de la société Befs tendant à considérer que cette société avait pris l'engagement de se substituer à la société Cargocaire pour la responsabilité des affaires en cours, et que, pour cette raison, elle ne pouvait pas prétendre, sans contradiction, que celle-ci puisse rester civilement responsable des mêmes affaires ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

Sur les deuxième et troisième moyens, le deuxième étant pris en ses trois branches, les moyens étant réunis ;

Attendu que la société Befs fait grief à l'arrêt d'avoir rejeté sa demande alors, selon le pourvoi, d'une part, que conformément à l'article 1109 du Code civil, il n'y a point de consentement valable s'il a été surpris par dol ; qu'en l'espèce, il ressort du rapport d'expertise ainsi que de l'arrêt avant-dire droit du 30 avril 1993, que la société Cargocaire lui a transmis une information technique erronée qui a eu une importance décisive dans la certitude acquise par elle des performances du procédé Asolvair cédé par la société Cargocaire ; qu'en s'abstenant de prendre en considération le fait que la société Cargocaire lui avait transmis des informations techniques erronées pour apprécier l'existence d'une réticence dolosive imputable à la société Cargocaire, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de la disposition susvisée ;

alors, d'autre part, conformément à l'article 1116 du Code civil, le dol est caractérisé dans le cas d'une réticence imputable au cocontractant ou dans le cas de manoeuvres susceptibles d'induire en erreur l'acquéreur ;

que la cour d'appel qui a constaté que l'acquéreur n'avait que tardivement pris conscience de son erreur dans la qualité du procédé cédé par la société Cargocaire mais qui a néanmoins écarté l'existence d'un dol imputable à la société Cargocaire sans avoir recherché si la société Cargocaire ne l'avait pas induite en erreur a, en statuant ainsi, privé sa décision de base légale au regard de la disposition susvisée ; alors, de plus , que conformément aux articles 1134 et 1135 du Code civil, il appartient aux parties de s'informer pleinement sur l'objet de leur convention et de s'abstenir de retenir toute information susceptible d'avoir une influence sur le consentement du cocontractant ou d'en modifier les modalités de l'opération ; qu'en s'abstenant, bien qu'elle y était invitée par ses conclusions de rechercher si la société Cargocaire avait été de bonne foi dans ses rapports avec elle, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des dispositions susvisées ; alors, enfin, que dans ses conclusions, s'appuyant sur les conclusions expertales, faisait valoir que la société Cargocaire avait commis des erreurs de conception dans le procédé Asolvair, erreurs de conception qui n'avaient été révélées qu'après la cession et qui avaient les caractéristiques d'un vice caché indécelable pour elle en dépit de sa qualité de professionnel en son domaine ; qu'en s'abstenant de répondre à ces conclusions et d'apprécier le bien-fondé de ses prétentions au regard du vice caché allégué par elle, la cour d'appel a violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu qu'en retenant que les erreurs de conception relevées par les experts n'étaient apparues qu'en cours d'installation, que le procédé imaginé par la société Cargocaire était un prototype et que la société Befs, elle-même, en avait poursuivi la réalisation sans songer à en modifier la conception, que les malfaçons constatées par les experts à la charge de la société Cargocaire relèvaient de la mise au point de matériels et qu'enfin la preuve de défaillances techniques n'était pas rapportée, la cour dappel a procédé aux recherches prétendument omises et répondu en les rejetant aux conclusions ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Befs Technologies aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, condamne la société Befs Technologies à payer à la société Cargocaire France la somme de 15 000 francs ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du dix-sept novembre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 96-16799
Date de la décision : 17/11/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (16e chambre, section B), 11 avril 1996


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 17 nov. 1998, pourvoi n°96-16799


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BEZARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:96.16799
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