AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par l'association Comité Roannais de Vacances, dont le siège est ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 21 novembre 1995 par la cour d'appel de Lyon (chambre sociale), au profit :
1 / de l'Union de recouvrement des cotisations de sécurité sociale et d'allocations familiales (URSSAF) de Roanne, dont le siège est ...,
2 / de la Direction régionale des affaires sanitaires et sociales (DRASS) Rhône-Alpes, dont le siège est ...,
défenderesses à la cassation ;
La demanderesse invoque, à l'appui de son pourvoi, les trois moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, en l'audience publique du 2 juillet 1998, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, M. Ollier, conseiller rapporteur, MM. Favard, Gougé, Thavaud, Mme Ramoff, M. Dupuis, conseillers, MM. Petit, Liffran, Mme Guilguet-Pauthe, conseillers référendaires, M. de Caigny, avocat général, M. Richard, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Ollier, conseiller, les observations de la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat de l'association Comité Roannais de Vacances, de la SCP Gatineau, avocat de l'URSSAF de Roanne, les conclusions de M. de Caigny, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu qu'à la suite d'un contrôle, l'URSSAF a réintégré dans l'assiette des cotisations dues par l'association Comité Roannais de Vacances pour les années 1990 à 1992 l'indemnité de congés payés versée à l'issue de son contrat à une salariée employée par contrat emploi-solidarité, la part patronale correspondant à l'indemnité complémentaire versée par un régime de prévoyance à une salariée pendant les 2 mois suivant son licenciement pour cause de maladie prolongée, et des indemnités compensatrices de congés payés versées aux personnes recrutées à titre temporaire et non bénévole pour l'encadrement des mineurs dans les centres de vacances et de loisirs ; que l'arrêt attaqué (Lyon, 21 novembre 1995) a rejeté le recours de l'association ;
Sur le premier moyen, pris en ses deux branches :
Vu l'article L. 322-4-11 du Code du travail, dans sa rédaction applicable en la cause ;
Attendu que, selon ce texte, la rémunération versée aux salariés bénéficiaires d'un contrat emploi-solidarité est assujettie aux cotisations de sécurité sociale dues au titre des assurances sociales, des accidents du travail et des prestations familiales, mais qu'elle donne lieu, dans la limite du salaire calculé sur la valeur horaire du SMIC, à exonération de la part de ces cotisations dont la charge incombe à l'employeur ;
Attendu que pour rejeter le recours de l'association Comité Roannais de Vacances contre la décision de l'URSSAF de refuser l'exonération sur l'indemnité compensatrice de congés payés versée à la fin de son contrat à une salariée engagée pour six mois par contrat emploi-solidarité, l'arrêt retient que cette exonération ne porte que sur les sommes versées pendant la convention conclue entre l'Etat et l'employeur, et non sur l'indemnité compensatrice de congés payés, versée en plus de la rémunération convenue, après expiration des relations contractuelles ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que l'exonération porte sur la totalité de la rémunération versée aux salariés engagés par contrat emploi-solidarité, dans la limite du salaire calculé sur la valeur horaire du SMIC, et que l'indemnité compensatrice de congés payés, qui rémunère obligatoirement les droits à congés acquis par le salarié sans qu'il ait pu en bénéficier, fait nécessairement partie de cette rémunération, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Sur le deuxième moyen, pris en ses deux branches :
Vu l'article R. 242-1, alinéas 2 et 3, du Code de la sécurité sociale ;
Attendu que, selon ce texte, sont incluses dans la base des cotisations les allocations complémentaires aux indemnités journalières de sécurité sociale, versées au titre des périodes d'incapacité temporaire de travail consécutives à une maladie, un accident, une maternité, en application du contrat de travail ou d'une convention collective, lorsqu'elles sont destinées à maintenir en tout ou en partie, pendant ces périodes, le salaire d'activité, que ces allocations soient versées directement par l'employeur, ou pour son compte par l'intermédiaire d'un tiers ; que cependant ces dispositions ne sont applicables qu'aux allocations complémentaires versées au titre des périodes pendant lesquelles le contrat individuel de travail qui lie le salarié à l'employeur reste en vigueur ;
Attendu que pour rejeter le recours de l'association Comité Roannais de Vacances contre la décision de l'URSSAF de réintégrer dans l'assiette des cotisations les indemnités complémentaires versées par l'organisme auquel adhérait l'employeur jusqu'au 31 janvier 1991 à une salariée licenciée le 6 décembre 1990 pour inaptitude définitive au travail, l'arrêt énonce que, même versées par l'intermédiaire d'un tiers pendant la période du préavis dont la salariée n'aurait pas dû bénéficier, les indemnités constituent un substitut du salaire et, comme telles, sont incluses dans la base des cotisations ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que, selon ses propres constatations, la salariée était dans l'incapacité d'effectuer un préavis, et que le contrat de travail avait pris fin le jour du licenciement, ce dont il résultait que les allocations complémentaires n'avaient pas été versées au titre d'une période pendant laquelle le contrat de travail restait en vigueur, la cour d'appel a violé le texte susvisé ;
Et sur le moyen relevé d'office, après accomplissement des formalités de l'article 1015 du nouveau Code de procédure civile :
Vu l'article L. 242-1 du Code de la sécurité sociale, et l'article 2 de l'arrêté du 11 octobre 1976 relatif aux cotisations de sécurité sociale dues pour l'emploi des personnes recrutées à titre temporaire et non bénévole pour l'encadrement des mineurs dans les centres de vacances et de loisirs ;
Attendu que, selon le second de ces textes, les cotisations dues pour l'emploi des personnes mentionnées ci-dessus sont calculées chaque année sur des bases forfaitaires déterminées par référence à la valeur du salaire minimum de croissance en vigueur au 1er janvier de l'année considérée ;
Attendu que pour rejeter le recours de l'association contre la décision de l'URSSAF de réintégrer dans l'assiette des cotisations les indemnités compensatrices de congés payés versées aux personnes recrutées à titre temporaire et non bénévole pour l'encadrement de ses centres de loisirs et de vacances, l'arrêt retient que l'indemnité compensant les droits ouverts aux congés payés correspond à une certaine période assimilée à une période travaillée, et que les cotisations sont dues pour cette période ;
Attendu qu'en statuant ainsi, alors que les cotisations des intéressés sont calculées sur une base forfaitaire qui inclut l'indemnité de congés payés, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS et sans qu'il y ait lieu de statuer sur le troisième moyen :
CASSE ET ANNULE, sauf en ce qu'il a statué sur le redressement relatif aux contrats emploi-solidarité à temps partiel, l'arrêt rendu le 21 novembre 1995, entre les parties, par la cour d'appel de Lyon ; remet, en conséquence, quant à ce, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Dijon ;
Condamne l'URSSAF de Roanne et la DRASS Rhône-Alpes aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de l'URSSAF de Roanne ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt partiellement cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-neuf octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.
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