AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par :
1 / M. Serge Z..., demeurant ...,
2 / M. Guy Y..., demeurant ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 12 janvier 1996 par la cour d'appel de Paris (1ère chambre, section B), au profit de M. François X..., pris en qualité de syndic à la liquidation judiciaire de la société Tetevuide-Havet, domicilié en cette qualité ...,
défendeur à la cassation ;
Les demandeurs invoquent, à l'appui de leur pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;
LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 23 juin 1998, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Grimaldi, conseiller rapporteur, M. Apollis, conseiller, Mme Piniot, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Grimaldi, conseiller, les observations de la SCP Urtin-Petit et Rousseau-Van Troeyen, avocat de M. Z... et de M. Y..., de Me Vuitton, avocat de M. X..., ès qualités, les conclusions de Mme Piniot, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique, pris en ses deux branches :
Attendu que MM. Z... et Y..., gérants de la société Tetevuide-Havet, en liquidation des biens, qui a fait l'objet d'un redressement fiscal, reprochent à l'arrêt confirmatif attaqué (Paris, 12 janvier 1996) de les avoir déboutés de leur action en responsabilité contre le syndic, alors selon le pourvoi, d'une part, que MM. Z... et Y... faisaient valoir dans leurs conclusions d'appel que le cabinet d'expertise comptable Europ Control chargé de la comptabilité de la société en liquidation avait conservé certains des documents comptables dont il ne s'était pas dessaisi, ainsi que cela résultait de son courrier au syndic en date du 27 décembre 1984, en sorte que l'incomplétude de la comptabilité ne pouvait leur être imputée ; qu'en ne s'expliquant pas sur cet élément précis, et notamment sur l'aveu contenu dans la lettre du 27 décembre 1984, dont il résultait que le syndic avait commis une négligence ne mettant pas en oeuvre tous les moyens nécessaires et utiles pour permettre au contrôle fiscal de s'opérer normalement à partir d'une comptabilité susceptible d'être complétée, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ; et alors, d'autre part, qu'il appartenait au syndic, seul représentant légal de la société en liquidation, de contester le redressement fiscal opéré, ne serait-ce que par prudence pour sauvegarder les droits éventuels de la société ; qu'en exonérant de toute responsabilité, nonobstant l'absence de recours formé contre les redressements fiscaux opérés par l'administration fiscale, au motif inopérant qu'à la date de recours il n'aurait pas disposé
d'éléments comptables permettant d'exercer utilement le recours, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 1382 du Code civil ;
Mais attendu qu'ayant, par motifs propres et adoptés, relevé, tout d'abord, que le syndic avait, le 20 septembre 1984, adressé à l'administration fiscale les coordonnées du cabinet d'expertise chargé des intérêts de la société avant sa liquidation, qu'il avait sollicité, au cours de la vérificatoin, contre une rémunération de l'ordre de 10 000 francs, l'assistance de ce cabinet qui lui avait été refusée, qu'il avait obtenu de celui-ci, le 24 octobre 1984, la remise de documents incomplets qu'il avait, le jour même, mis à la disposition des vérificateurs, que manquaient le livre d'inventaire, le livre journal, toutes les pièces ou documents comptables pour les exercices écoulés du 1er janvier 1980 au 1er octobre 1982 et du 1er octobre 1983 à la cessation d'activité, ainsi que toutes les pièces comptables pour l'exercice allant du 1er octobre 1982 au 30 septembre 1983, leur existence n'étant même pas acquise, et ayant relevé également que, par courrier recommandé du 16 avril 1984, le syndic avait rappelé à chacun des gérants la procédure de vérification en cours et la nécessité de prendre contact d'urgence avec les vérificateurs, qu'il leur avait adressé, le 14 novembre 1994, la copie du procès-verbal dressé par la direction générale des impôts en les invitant à faire le nécessaire, faute de quoi ils pouvaient être taxés d'office, que ceux-ci se sont désintéressés du contrôle dont ils étaient pourtant tenus informés, qu'il avait effectué les diligences qui s'imposaient, ne disposant pas personnellement d'éléments susceptibles de fonder une réclamation, la cour d'appel a pu exclure toute faute du syndic de nature à engager sa responsabilité ; d'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses branches ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne M. Z... et M. Y... aux dépens ;
Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette la demande de M. X..., ès qualités ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.