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27/10/1998 | FRANCE | N°96-11049

France | France, Cour de cassation, Chambre commerciale, 27 octobre 1998, 96-11049


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. Henri Y..., demeurant ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 29 novembre 1995 par la cour d'appel de Paris (3e chambre B), au profit de M. François X..., mandataire judiciaire, demeurant ..., pris en sa qualité de représentant des créanciers et liquidataire judiciaire de la société à responsabilité limitée La Parthenaise, en liquidation judiciaire depuis le 5 juillet 1993,

défendeur à la cassation ;

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au pré...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE ET ECONOMIQUE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur le pourvoi formé par M. Henri Y..., demeurant ...,

en cassation d'un arrêt rendu le 29 novembre 1995 par la cour d'appel de Paris (3e chambre B), au profit de M. François X..., mandataire judiciaire, demeurant ..., pris en sa qualité de représentant des créanciers et liquidataire judiciaire de la société à responsabilité limitée La Parthenaise, en liquidation judiciaire depuis le 5 juillet 1993,

défendeur à la cassation ;

Le demandeur invoque, à l'appui de son pourvoi, les deux moyens de cassation annexés au présent arrêt ;

LA COUR, composée selon l'article L. 131-6, alinéa 2, du Code de l'organisation judiciaire, en l'audience publique du 23 juin 1998, où étaient présents : M. Bézard, président, M. Tricot, conseiller rapporteur, M. Grimaldi, conseiller, Mme Piniot, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Tricot, conseiller, les observations de la SCP Gatineau, avocat de M. Y..., de la SCP Monod, avocat de M. X..., ès qualités, les conclusions de Mme Piniot, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Attendu, selon l'arrêt déféré (Paris, 29 novembre 1995), qu'après la mise en redressement puis liquidation judiciaires de la société La Parthenaise dont M. Y... avait été le gérant, le liquidateur judiciaire, M. X..., a demandé au tribunal de prononcer le redressement judiciaire de M. Y... en application de l'article 182 de la loi du 25 janvier 1985 ; que le Tribunal, après avoir accueilli la demande par un premier jugement, a prononcé la liquidation judiciaire de M. Y..., qui a fait appel des deux décisions ; que la cour d'appel a joint les instances ;

Sur le premier moyen, pris en ses cinq branches :

Attendu que M. Y... reproche à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement qui a ouvert son redressement judiciaire alors, selon le pourvoi, d'une part, que la comptabilité fictive est celle qui propose une image volontairement infidèle des comptes de l'entreprise ; qu'en l'espèce, M. Y... avait confié à un cabinet comptable la tenue de la comptabilité de la société La Parthenaise au moins jusqu'au mois de septembre 1992, c'est-à-dire un mois à peine avant son départ, sans qu'aucune falsification comptable ne lui soit par ailleurs imputée ; qu'en prononçant le redressement judiciaire de M. Y... sans expliquer par quels agissements volontairement trompeurs ce dernier aurait créé une comptabilité fictive, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 182.5 de la loi du 25 janvier 1985 ; alors, d'autre part, qu'un dirigeant d'entreprise ne saurait être sanctionné pour des détournements d'actifs commis dans sa société si l'auteur de ces actes n'a pas été clairement identifié ; qu'en l'espèce, 286 937,02 francs ont bien été prélevés sans justificatif dans les caisses de la société La Parthenaise mais il n'a jamais été démontré que M. Y... était l'auteur de ces agissements ; qu'en prononçant le redressement judiciaire de M. Y... au seul motif qu'il était dirigeant de la société au moment de la disparition des fonds litigieux, les juges du fond ont violé l'article 182 de la loi du 25 janvier 1985 ; alors, en outre, qu'un dirigeant d'entreprise ne saurait être sanctionné pour les détournements d'actifs sans que les juges du fond indiquent les éléments de preuve qui permettent de lui imputer de tels agissements ; qu'en l'espèce les juges du fond se sont contentés d'affirmer qu'il était constant que M. Y... avait procédé à des prélèvements pour un montant total de 286 937 francs sur les sommes rentrées en espèces dans sa société ; qu'en refusant d'indiquer les documents d'où il résulterait que M. Y... est l'auteur des détournements litigieux, les juges du fond ont privé leur décision de base légale au regard de l'article 182 de la loi du 25 janvier 1985 ; alors, encore, que les juges du fond ne peuvent sous prétexte d'interprétation, méconnaître le sens clair et précis des conclusions déposées par les parties ; que, dans ses conclusions d'appel, M. Y... exposait que, sur un montant total de 286 937,02 francs, représentant les sorties de caisse non justifiées, 106 695,60 francs correspondaient aux frais de déplacement de M. Z... et qu'au moment où les 184 856,12 francs restant ont disparu, M. Z... gérait déjà en fait la société ; qu'en condamnant M. Y... au motif qu'il n'a jamais tenté, devant la cour d'appel, d'apporter une justification quelconque aux prélèvements qui lui sont reprochés, les juges du fond ont dénaturé ses conclusions d'appel et violé l'article 1134 du Code civil ; et alors, enfin, qu'un dirigeant de société ne peut être condamné au titre de l'exploitation déficitaire de sa société si celle-ci résulte d'un cas de force majeure et non d'erreurs de gestion ; que dans ses conclusions d'appel M. Y... démontrait qu'il ne pouvait être tenu pour responsable du déficit de l'année 1992 dès lors qu'il résultait d'un incendie ayant détruit une grande partie du stock de viande ; qu'en délaissant ce moyen, les juges du fond ont violé l'article 455 du nouveau Code de procédure civile ;

Mais attendu, en premier lieu, qu'en relevant que le Tribunal avait retenu la fictivité de la comptabilité, et en retenant qu'étaient établis à l'encontre de M. Y... les faits prévus à l'article 182.4 et 6 de la loi du 25 janvier 1985, la cour d'appel a écarté le grief tiré de cette fictivité dont fait état la première branche ;

Attendu, en second lieu, que le Tribunal ayant retenu que M. Y... avait effectué, sans justifications, des prélèvements d'un montant de 286 937 francs sur les rentrées d'espèces de la société, M. Y... ne saurait reprocher à la cour d'appel d'avoir dénaturé ou de n'avoir pas répondu aux conclusions déposées devant le Tribunal, griefs dont font état les quatrième et cinquième branches ;

Attendu, enfin, que l'arrêt retient souverainement, au vu du rapport d'expertise, qu'il est constant que M. Y... a procédé à des prélèvements de plus de 280 000 francs sur les sommes rentrées en espèces dans la trésorerie de la société et ne tente pas d'apporter une justification quelconque à ces prélèvements ; qu'il retient encore, en constatant que la cessation des paiements a été fixée au 15 novembre 1991, que l'activité déficitaire a été poursuivie sous la direction de M. Y... de février à novembre 1992 et que cette poursuite, au cours de laquelle le déficit s'est aggravé de plus de 1 200 000 francs, a été réalisée dans l'intérêt personnel du gérant qui, "s'il n'était pas rémunéré, a opéré les prélèvements mentionnés plus haut" ; qu'en l'état de ces motifs, la cour d'appel n'a fait qu'user des pouvoirs qu'elle tient de l'article 182.4 et 6 de la loi du 25 janvier 1985 en confirmant le jugement qui a ouvert le redressement judiciaire de M. Y... ;

D'où il suit que le moyen n'est fondé en aucune de ses cinq branches ;

Et sur le second moyen :

Attendu que M. Y... reproche à l'arrêt d'avoir confirmé le jugement qui a prononcé sa liquidation judiciaire alors, selon le pourvoi, que le Tribunal décide la continuation de l'entreprise lorsqu'il existe des possibilités sérieuses de redressement et de règlement du passif ; que pour prononcer la liquidation de M. Y..., la cour d'appel s'est contentée d'affirmer que ce dernier ne discutait que le principe de l'application de l'article 182 de la loi du 25 janvier 1985 ; qu'en s'abstenant de rechercher si, eu égard à l'importance du passif de la société et du passif personnel de M. Y..., un plan de continuation n'était pas souhaitable, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 69 de la loi du 25 janvier 1985 ;

Mais attendu que n'étant pas saisie d'un plan de cession de l'entreprise, la cour d'appel, qui a constaté que M. Y... ne proposait pas l'apurement du passif, a fait l'exacte application de l'article 8 de la loi du 25 janvier 1985 en prononçant la liquidation judiciaire de ce débiteur ; que le moyen n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE le pourvoi ;

Condamne M. Y... aux dépens ;

Vu l'article 700 du nouveau Code de procédure civile, rejette les demandes de M. X..., ès qualités et de M. Y... ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre commerciale, financière et économique, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-sept octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.


Synthèse
Formation : Chambre commerciale
Numéro d'arrêt : 96-11049
Date de la décision : 27/10/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Commerciale

Références :

Décision attaquée : Cour d'appel de Paris (3e chambre B), 29 novembre 1995


Publications
Proposition de citation : Cass. Com., 27 oct. 1998, pourvoi n°96-11049


Composition du Tribunal
Président : Président : M. BEZARD

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:96.11049
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