AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Messaoud X..., demeurant "Le Plein Sud", ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 9 janvier 1996 par la cour d'appel d'Aix-en-Provence (18e chambre sociale), au profit de la société Rapides Côte d'Azur, société anonyme, dont le siège est "Le Quadra", Arenas, ...,
défenderesse à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 23 juin 1998, où étaient présents : M. Gélineau-Larrivet, président, M. Frouin, conseiller référendaire rapporteur, MM. Waquet, Carmet, Boubli, Le Roux-Cocheril, Ransac, Chagny, Bouret, conseillers, Mmes Pams-Tatu, Girard-Thuilier, Barberot, Lebée, Andrich, conseillers référendaires, M. Terrail, avocat général, Mme Ferré, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Frouin, conseiller référendaire, les observations de la SCP Boré et Xavier, avocat de la société Rapides Côte d'Azur, les conclusions de M. Terrail, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur les quatre moyens réunis :
Vu les articles L. 122-4 et L. 122-14-2 du Code du travail ;
Attendu que M. X... a été engagé le 13 octobre 1997 par la société Rapides Côte d'Azur en qualité de conducteur receveur ; qu'à la suite d'un entretien préalable à son licenciement, il a écrit à son employeur en se plaignant d'avoir été insulté pendant cet entretien par le représentant de l'employeur et en concluant ainsi sa lettre : "En conséquence, je me considère comme licencié brutalement et je ferai valoir mes droits" ; qu'il a saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement d'indemnités de rupture et de dommages-intérêts ;
Attendu que, pour débouter le salarié de sa demande, la cour d'appel a énoncé que l'employeur avait pris acte de la lettre du salarié par lettre du 7 avril 1989 dans les termes suivants : "Nous tenons à vous informer que M. Y... proteste véhémentement et s'inscrit en faux contre les allégations contenues dans la susdite lettre. Par ailleurs, nous notons que vous avez pris unilatéralement et brutalement l'initiative de la rupture de votre contrat de travail, sans même respecter le préavis que vous nous deviez", qu'il en résultait que c'est M. X... qui, par sa lettre du 4 avril 1989, avait pris l'initiative de mettre fin aux relations contractuelles le liant à la société Rapides Côte d'Azur ;
Attendu, cependant, que la démission s'entend d'une volonté claire et non équivoque du salarié de mettre fin au contrat de travail ;
D'où il suit qu'en statuant comme elle l'a fait, alors qu'il ne résultait pas de la lettre du salarié une volonté claire et non équivoque de rompre le contrat de travail et que la prise d'acte par l'employeur de la rupture à l'initiative du salarié, sans l'énoncé d'aucun motif, s'analysait en un licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse, la cour d'appel a violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 janvier 1996, entre les parties, par la cour d'appel d'Aix-en-Provence ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Nîmes ;
Condamne la société Rapides Côte d'Azur aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du vingt et un octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.