AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur les pourvois n° S 96-42.834 et n° H 97-41.702 formés par M. Pierre X..., demeurant ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 9 avril 1996 par la cour d'appel d'Agen (chambre sociale), au profit de la société Soquerdis, société anonyme, dont le siège est ...,
défendeur à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 17 juin 1998, où étaient présents : M. Desjardins, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Texier, conseiller rapporteur, M. Lanquetin, conseiller, M. Boinot, conseiller référendaire, M. Lyon-Caen, avocat général, Mlle Lambert, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Texier, conseiller, les observations de la SCP Célice, Blancpain et Soltner, avocat de M. X..., les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu leur connexité, joint les pourvois n° S 96-42.834 et n° H 97-41.702 ;
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 132-1 du Code du travail et 12 du nouveau Code de procédure civile ;
Attendu que M. X... a été embauché le 1er mars 1993 par la société Soquerdis en qualité de magasinier, à la suite d'un stage effectué dans la même entreprise du 4 janvier au 28 février 1993 dans le cadre d'une convention conclue avec l'AFPA ; que le contrat de travail à durée indéterminée prévoyait une période d'essai de deux mois, à laquelle l'employeur a mis fin le 15 avril 1993 ; que le salarié a saisi la juridiction prud'homale en paiement de dommages-intérêts pour rupture abusive du contrat de travail ;
Attendu que, pour débouter le salarié de ses demandes, la cour d'appel énonce que la convention collective de l'ameublement a été dénoncée et est en cours de renégociation et que les parties peuvent, en l'absence de convention collective applicable ou en vigueur, déroger de manière explicite à la durée de la période d'essai, telle qu'elle résulte des usages, sauf à la partie qui s'en plaint de démontrer qu'une période d'essai excessivement longue constituerait une fraude à la réglementation qui régit le contrat de travail ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle devait rechercher, d'une part, si, bien que dénoncée, la convention collective n'était pas encore en application en vertu des dispositions de l'article L. 132-8 du Code du travail, d'autre part, si un accord de substitution n'était pas intervenu, la cour d'appel n'a pas donné de base légale à sa décision ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 9 avril 1996, entre les parties, par la cour d'appel d'Agen ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Toulouse ;
Condamne la société Soquerdis aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par M. Texier, conseiller le plus ancien ayant participé au délibéré en remplacement de M. le président Desjardins, empêché, en son audience publique du quinze octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.