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15/10/1998 | FRANCE | N°96-42640

France | France, Cour de cassation, Chambre sociale, 15 octobre 1998, 96-42640


AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les pourvois n° F 96-42.640 et H 96-42.641 formés par la société Régie nationale des usines Renault, société anonyme, dont le siège est ... et ayant usine route de Tourville, 76410 Cléon,

en cassation de deux arrêts n° 3092/94 et 3093/94 rendus le 19 mars 1996 par la cour d'appel de Rouen (chambre sociale), au profit :

1 / de M. Pierre Y..., demeurant ...,

2 / de M. Hildebert X..., ayant demeuré ..., et actuellement ... des Hautes-Terres, 27370 Amfrevil

le-la-Campagne,

defendeurs à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 17 juin 1...

AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :

Sur les pourvois n° F 96-42.640 et H 96-42.641 formés par la société Régie nationale des usines Renault, société anonyme, dont le siège est ... et ayant usine route de Tourville, 76410 Cléon,

en cassation de deux arrêts n° 3092/94 et 3093/94 rendus le 19 mars 1996 par la cour d'appel de Rouen (chambre sociale), au profit :

1 / de M. Pierre Y..., demeurant ...,

2 / de M. Hildebert X..., ayant demeuré ..., et actuellement ... des Hautes-Terres, 27370 Amfreville-la-Campagne,

defendeurs à la cassation ;

LA COUR, en l'audience publique du 17 juin 1998, où étaient présents : M. Desjardins, conseiller le plus ancien faisant fonctions de président, M. Boinot, conseiller référendaire rapporteur, MM. Texier, Lanquetin, conseillers, M. Lyon-Caen, avocat général, Mlle Lambert, greffier de chambre ;

Sur le rapport de M. Boinot, conseiller référendaire, les observations de la SCP Delaporte et Briard, avocat de la société Régie nationale des usines Renault, les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu leur connexité, joint les pourvois n° F 96-42.640 et H 96-42.641 ;

Sur le moyen unique commun aux deux pourvois :

Attendu, selon les arrêts attaqués (Rouen, 19 mars 1996), que MM. Y... et X..., salariés de la Régie nationale des usines Renault (RNUR), étaient conducteurs poids lourds jusqu'au 1er septembre 1991, date à laquelle ils ont été affectés à une autre fonction en raison de la suppression de l'activité "Flotte Grands Routiers" ; qu'estimant avoir droit cumulativement à la pause accordée aux salariés travaillant en équipes ou postes successifs par l'article 38 de la Convention collective des industries métallurgiques de Rouen et Dieppe et aux temps supplémentaires personnels (TSP) reconnus dans l'entreprise par la note du 15 février 1988, ils ont saisi la juridiction prud'homale d'une demande en paiement d'un rappel de salaire correspondant à la pause casse-croûte et de l'indemnité de congés payés afférente ;

Attendu que la RNUR fait grief aux arrêts de l'avoir condamnée à payer à MM. Y... et X... un rappel de salaire pour le paiement de la pause casse-croûte et de l'indemnité de congés payés afférente, alors, selon le moyen, que, d'une part, le juge doit, en toutes circonstances, observer lui-même le principe de la contradiction et ne peut fonder sa décision sur des moyens de droit qu'il a relevés d'office sans avoir au préalable invité les parties à présenter leurs observations ; qu'en l'espèce, ni MM. Y... et X..., ni la RNUR ne s'étaient prévalus de ce que le temps supplémentaire personnel était applicable à tous les salariés de l'entreprise, chauffeurs compris ; qu'en procédant à cette affirmation, pour en déduire que le temps supplémentaire personnel ne pouvait être confondu avec le temps de pause prévu par l'article 38 de la convention collective, dont seuls bénéficiaient les salariés travaillant en équipes ou postes successifs, faute pour ces deux avantages d'avoir le même domaine ratione personae, la cour d'appel a relevé d'office un moyen sur lequel les parties n'avaient pas été appelées à s'expliquer, et partant, violé l'article 16 du nouveau Code de procédure civile ; que, d'autre part, le juge a l'obligation de ne pas dénaturer les documents de la cause ; que la note du 15 février 1988 relative au principe d'application des temps supplémentaires personnels stipulait expressément "s'appliquer aux secteurs tôlerie et ligne de montage" ; qu'en estimant que, selon cette note, le temps supplémentaire personnel était attribué à tous les salariés de l'entreprise, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ce document, et violé les articles 1134 du Code civil et 4 du nouveau Code de procédure civile ; qu'en outre, la lettre de l'inspecteur du travail du 24 août 1993, régulièrement produite, stipulait : "concernant la pause payée, il m'apparaît que les conditions de travail des chauffeurs quand ils exerçaient effectivement ce travail sont bien celles de salariés travaillant en équipes ou postes successifs d'une durée au moins égale à quatre heures. En application de l'article 38 de la convention collective des industries métallurgiques de Rouen et Dieppe, il m'apparaît qu'ils devaient donc avoir droit, soit à une demi-heure d'arrêt sans diminution de la rémunération, soit en plus de leur salaire journalier à un supplément de rémunération correspondant à une demi-heure de travail" ; qu'en estimant qu'il résultait de la réponse de l'inspection du travail en date du 24 août 1993 que le temps supplémentaire personnel devait être considéré comme un avantage interne à l'entreprise RNUR qui s'ajoutait aux dispositions générales de l'article 38 de la convention collective de la métallurgie et qui s'appliquait à tous les salariés de l'entreprise, chauffeurs compris, la cour d'appel a dénaturé les termes clairs et précis de ce document, et de nouveau violé les articles 1134 du Code civil et 4 du nouveau Code de procédure civile ; qu'ensuite, l'extension volontaire par l'employeur au profit de tout ou partie du personnel d'un avantage reconnu par la convention collective à certains salariés ne permet pas à ces derniers de profiter deux fois du même avantage et de cumuler l'application de la convention collective et du système instauré dans l'entreprise, lesdits salariés n'ayant droit qu'au système le plus avantageux ; qu'à supposer que le temps supplémentaire personnel ait été applicable à

tous les salariés de l'entreprise, la cour d'appel ne pouvait déduire de cette seule constatation que la pause prévue par l'article 38 de la convention collective devait se cumuler avec le temps supplémentaire personnel prévu par les règles internes de l'entreprise, sans rechercher préalablement si les avantages prévus par ces deux textes avaient des objets ou des causes distincts ; qu'en statuant comme elle l'a fait, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 135-2 du Code du travail et 38 de la convention collective des industries de Rouen et Dieppe ; qu'enfin, en estimant que MM. Y... et X... étaient bien fondés à réclamer le paiement du supplément de rémunération prévu subsidiairement en son alinéa 2 par la convention collective au cas où "les circonstances ou le genre de travail ne permettraient pas de donner effectivement au salarié" un temps de pause d'une demi-heure d'arrêt, sans rechercher, ainsi qu'elle y était invitée par les conclusions de la RNUR, si ces salariés n'avaient pas effectivement bénéficié "en nature" de la demi-heure d'arrêt sans diminution de rémunération prévue par l'alinéa 1er de l'article précité, la cour d'appel a privé sa décision de base légale au regard de l'article 38 de la convention collective des industries métallurgiques de Rouen et Dieppe et de l'article L. 135-2 du Code du travail ;

Mais attendu, d'abord, qu'abstraction faite du motif surabondant tiré de la référence à la lettre de l'inspection du travail du 24 août 1993, l'arrêt n'a pas dénaturé la note du 15 février 1988, en relevant que le principe d'un temps supplémentaire personnel était reconnu pour tous les salariés de l'entreprise ;

Et attendu, ensuite, que, tenue de trancher le litige conformément aux règles de droit qui lui étaient applicables, la cour d'appel, sans encourir le grief du moyen tiré du défaut de recherche relatif au bénéfice en nature de la demi-heure d'arrêt sans diminution de la rémunération, a, en relevant qu'il n'était pas démontré que la pause payée prévue par l'article 38 de la convention collective devait être confondue avec ledit temps supplémentaire payé et que le temps supplémentaire payé destiné à compenser la pénibilité du travail présentait un caractère forfaitaire comme la pause café prévue par la convention collective, fait ressortir que les deux avantages n'étaient pas de même nature et que les salariés concernés pouvaient cumuler l'avantage tiré de l'article 38 de la convention collective des industries métallurgiques de Rouen et Dieppe et celui qui correspondait au temps supplémentaire personnel alloué à l'ensemble des salariés de l'entreprise ; qu'elle a ainsi légalement justifié sa décision ; que le moyen des pourvois n'est pas fondé ;

PAR CES MOTIFS :

REJETTE les pourvois ;

Condamne la société Régie nationale des usines Renault aux dépens ;

Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par M. Texier, conseiller le plus ancien ayant participé au délibéré en remplacement de M. le président Desjardins, empêché, en son audience publique du quinze octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.


Synthèse
Formation : Chambre sociale
Numéro d'arrêt : 96-42640
Date de la décision : 15/10/1998
Sens de l'arrêt : Rejet
Type d'affaire : Sociale

Analyses

CONVENTIONS COLLECTIVES - Métallurgie - Durée du travail - Pause casse-croûte ou café.


Références :

Convention collective des industries métallurgiques de Rouen et Dieppe art. 38

Décision attaquée : Cour d'appel de Rouen (chambre sociale), 19 mars 1996


Publications
Proposition de citation : Cass. Soc., 15 oct. 1998, pourvoi n°96-42640


Composition du Tribunal
Président : Président : M. DESJARDINS conseiller

Origine de la décision
Date de l'import : 15/09/2022
Fonds documentaire ?: Legifrance
Identifiant ECLI : ECLI:FR:CCASS:1998:96.42640
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