AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l'arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par M. Jérome Y..., demeurant ...,
en cassation d'un arrêt rendu le 18 mars 1996 par la cour d'appel de Limoges (chambre sociale), au profit de M. Pierre X..., demeurant ...,
défendeur à la cassation ;
LA COUR, en l'audience publique du 17 juin 1998, où étaient présents : M. Waquet, conseiller doyen faisant fonctions de président et rapporteur, M. Texier, Mme Lemoine-Jeanjean, conseillers, M. Richard de la Tour, Mme Duval-Arnould, conseillers référendaires, M. Lyon-Caen, avocat général, Mme Molle-de Hédouville, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. Waquet, conseiller, les conclusions de M. Lyon-Caen, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Sur le moyen unique :
Vu les articles L. 122-38 et L. 143-2 du Code du travail ;
Attendu, que M. Y... a été engagé, le 23 novembre 1993, suivant un contrat de qualification d'une durée de 24 mois, par M. X... ; que faisant valoir que ses salaires ne lui étaient jamais régulièrement versés, il a, après deux courriers adressés à son employeur les 3 avril et 3 mai 1994, pris acte, le 20 mai 1994, de la rupture de son contrat de travail et saisi la juridiction prud'homale ;
Attendu que, pour débouter le salarié de sa demande en dommages-intérêts, la cour d'appel énonce que compte tenu des précisions fournies par M. X... pour expliquer ce retard du paiement et compte tenu surtout du fait que ce dernier s'était engagé à rémunérer M. Y... sur la base du SMIC, alors qu'un contrat de qualification n'exige pas une telle rémunération, il faut en conclure que la carence de l'employeur n'était pas suffisamment grave pour justifier la rupture du contrat de travail ;
Qu'en statuant ainsi, alors qu'elle avait constaté que l'employeur s'était toujours acquitté avec retard du paiement des salaires, manquant ainsi à l'une de ses obligations essentielles, la cour d'appel n'a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et ainsi violé les textes susvisés ;
PAR CES MOTIFS :
CASSE ET ANNULE, dans toutes ses dispositions, l'arrêt rendu le 18 mars 1996, entre les parties, par la cour d'appel de Limoges ; remet, en conséquence, la cause et les parties dans l'état où elles se trouvaient avant ledit arrêt et, pour être fait droit, les renvoie devant la cour d'appel de Poitiers ;
Condamne M. X... aux dépens ;
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de Cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l'arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de Cassation, Chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du quatorze octobre mil neuf cent quatre-vingt-dix-huit.